Un convoi de 150 voitures et des klaxons à tue-tête. La manifestation régionale contre le mariage gay, hier à Poitiers, ressemblait à… un mariage.
Hervé est « monté » du sud de la Vienne avec son épouse Bérengère et leurs quatre enfants. C’est la troisième fois de sa vie qu’il manifeste : « Les deux autres c’était pour l’école libre en 1984 et contre le PACS en 1997. » Il a visiblement de la suite dans les idées, et avoue militer, aujourd’hui, « pour la loi naturelle, qui fait que, depuis la nuit des temps, il faut un homme et une femme pour que naissent des enfants ».
Sur le parking du cinéma de Fontaine-le-Comte, ils étaient plusieurs dizaines, comme lui, hier matin, qui décoraient les vitres de leurs voitures avant d’aller manifester en convoi sur les boulevards poitevins. « C’est la première manifestation d’ampleur régionale que nous organisons en Poitou-Charentes », explique Hervé Tertrais, porte-parole picto-charentais. Réunir un convoi de 150 véhicules, un dimanche matin, c’est le chiffre qu’il espérait. « On veut montrer au gouvernement qu’on ne lâchera rien, même si cette loi est votée mardi prochain, ajoute Antoine de Bérranger, coordinateur de la Manif pour tous dans l’Ouest. Nous avons libéré la parole sur ce sujet et on s’aperçoit que l’opinion publique nous est de plus en plus favorable. On ne comprend pas que le gouvernement reste totalement sourd à cette réalité. C’est frustrant. »
Le convoi s’est ébranlé un peu avant midi en direction de la capitale régionale. Objectif : le parc de Blossac pour un pique-nique, après un tour sur les boulevards périphériques et un passage devant la préfecture. La consigne était claire : « On ne s’arrête pas, mais on klaxonne tout le temps ! » Comme dans un vrai mariage, avec des décorations bleues et roses sur les jantes et les rétroviseurs. La manifestation se voulait avant tout familiale et pacifique, dans le respect des recommandations des organisateurs : pas de confrontation (voir ci-dessous). « Dites bien que nous condamnons les actes homophobes de ces derniers jours », insiste Antoine de Bérranger.
manif
Diesel pour tous ?
Les opposants au mariage homosexuel ont évidemment provoqué pas mal d’embouteillages, même si on était un dimanche matin. Surtout, avec leurs nombreux monospaces (familles nombreuses obligent…) au diesel, ils n’ont pas contribué à la pureté de l’atmosphère.
la phrase
« Nous sommes là pour écouter ce que les opposants à la loi ont à dire, ils ont un certain nombre de messages à faire passer. »
Le président départemental de l’UMP de la Vienne, Olivier Chartier, et un autre ex-candidat aux législatives, Enguerrand Delannoy, ont rejoint les manifestants contre le mariage pour tous, hier après-midi au parc de Blossac. Les organisateurs de la Manif pour tous avaient bien précisé que leur mouvement entend rester apolitique, mais les deux responsables de l’UMP ont néanmoins été accueillis à bras ouverts.
Philippe Bonnet, La Nouvelle République
22/04/2013
Des contre-manifestants tenus à distance
Il est 10 h 30, ce dimanche matin, et le parking de l’hypermarché Auchan de Poitiers-Sud connaît une fréquentation inhabituelle. Une trentaine de jeunes militants de gauche sortent leurs banderoles des voitures tandis qu’un fourgon et trois voitures de police viennent se garer à quelques dizaines de mètres d’eux.
Ces militants du Groupe d’action unitaire de la Vienne contre l’extrême-droite comptent bloquer les voitures de la Manif pour tous qui doivent se rassembler au même endroit une demi-heure plus tard.
Mais les opposants au mariage homosexuel ont été prévenus par la police qu’un comité d’accueil les attendait et ils ont finalement changé de lieu de rassemblement (lire ci-dessus).
Les jeunes du NPA et des Jeunes communistes sont donc bien esseulés, face aux policiers qui leur rappellent qu’ils n’ont pas déclaré leur manifestation et qu’ils sont donc passibles de peines de prison ferme et de fortes amendes s’ils troublent l’ordre public.
« Nous condamnons fermement l’action des forces de l’ordre qui ont clairement aidé les homophobes en leur indiquant le parking du CGR comme point de repli, puisque nous étions sur celui d’Auchan, commentait, après coup, le porte-parole du NPA, Alexandre Raguet. Nous revendiquons notre droit à nous exprimer, en tant que progressistes, comme bon nous semble et où bon nous semble ! Les idées de l’extrême-droite ne feront pas la loi. »
sénats
Alain Fouché éclaircit sa position
Alain Fouché n’a pas participé au vote sur le mariage pour tous il y a dix jours au Sénat : « Il devait avoir lieu dans l’après-midi, il a finalement été avancé au matin. Du coup, il n’y avait qu’une quarantaine de sénateurs. » Le groupe UMP a demandé que soient au moins rendues publiques les intentions de vote. Ainsi, peut-on lire sur le site du Sénat que le sénateur chauvinois avait l’intention de s’abstenir.
« J’ai toujours dit que j’étais favorable à un contrat d’union civil pour les homosexuels, justifie Alain Fouché, c’est-à-dire une cérémonie officielle et publique devant le maire, qui règle les problèmes de succession, de réversion de retraite… Bref, un mariage qu’on appellerait autrement, mais qui exclurait la question de la filiation, sur laquelle je suis beaucoup plus réservé. J’avais donc l’intention de m’abstenir. Dans les dernières heures avant le vote, le gouvernement a présenté le texte comme conduisant inexorablement vers la filiation, l’adoption, la PMA, avec toutes les dérives que cela entraîne. C’est pourquoi j’aurais finalement voté contre. Même si j’ai été tenté, un temps, de m’abstenir. »
En janvier 2010, Alain Fouché faisait partie des 60 sénateurs de tous bords signataires d’une proposition de loi visant à légaliser la Gestation pour autrui (GPA). Il assure qu’il avait retiré quasi immédiatement sa signature.
Laurent Favreuille, La Nouvelle République
22/04/2013