Archives de catégorie : Riposte athée

Congrès CFTC : le Futuroscope a la jaunisse !

Congrès CFTC : le Futuroscope a la jaunisse !

Jusqu’à jeudi soir, l’Union régionale CFTC Poitou-Charentes accueille le 51e congrès de son « syndicat » la CFTC (confédération française des travailleurs chrétiens) , à l’amphithéâtre du palais des congrès du Futuroscope de Poitiers.

Congrès d’entrée de jeu annoncé par un marketing publicitaire douteux : une vague bleue d’affiches où figurait la phrase : « Elle arrive le 15 ! »… On aura peut-être d’abord cru à Marine Le Pen ?… On n’en était pas très loin, dans le discours interclassiste aux relents cathos et antisocialistes primaires.

Jacques Voisin, président confédéral sortant, a prononcé le discours d’ouverture du congrès, en déclarant «assumer sans complexe, une démarche originale inspirée des valeurs sociales chrétiennes». « Originale« , cette démarche l’est en effet.

Dans ses statuts, ce pseudo- « syndicat » s’inspire de l’encyclique anti-socialiste catholique Rerum Novarum, pondue par le pape Léon XIII en 1891, au moment de la montée des organisations de classes, en réaction au « socialisme athée ». A l’époque, la combativité ouvrière frappait en effet aussi bien le patronat et l’Etat… que l’Eglise, leur sbire zélé de longue date. Or ce syndicat en appelle à la« morale sociale chrétienne » et se démarque explicitement de la lutte des classes (qualifiée d’ « antagonismes de classes« , brrrr…).

Sa stratégie clairement affichée était de mener le mouvement ouvrier à la collaboration avec l’Etat et le Capital : « associer le syndicalisme ouvrier à la politique économique du pays« …  à une époque ou le Capital craignait les discours révolutionnaires autogestionnaires contre le parasitime capitaliste, elle prône au contraire la pérennisation du capital et de son corollaire le salariat, en estimant « nécessaire de transformer ces conditions [de la production] de manière à assurer un meilleur emploi des forces productrices et une répartition plus équitable des fruits de la production entre les différents éléments qui y concourent. » (comprendre : entre capital et travail aliéné).

Briseuse d’action directe, la CFTC pousse donc à la négociation et au compromis interclassiste au détriment de toute action instauratrice de réels rapports de force (en particulier la « grève« , qui n’est vue que comme un recours extrême). De fait, la CFTC a accompagné toutes les sales réformes des gouvernements le petit doigt sur la couture du pantalon… comment parler d' »unité syndicale » avec une organisation pareille ?

Ce qui explique sans doute la désaffection croissante des travailleurs-euses aux élections professionnelles. Désaffection qui remet en cause, au grand dam de ses permanents, la représentativité du syndicat… Qui se maintient surtout dans certaines branches bien spéciales du privé (dont l’enseignement catho et le commerce…).

Fidèle à sa tradition catho, le congrès célèbre donc une messe le mardi (on y aura sans doute entendu un sermon moralisateur sur les méchants financiers et un retour souhaité à un bon capitalisme à la papa ?).

Fidèle à sa tradition de compromis dégueulasse avec les représentants du  pouvoir politique et capitaliste, le congrès CFTC reçoit aussi le ministre du travail de l’emploi et de la santé (l’inénarrable Xavier Bertrand) le jeudi matin ; la secrétaire d’Etat aux solidarités et à la cohésion sociale (Marie-Anne Montchamp) l’après-midi ; et le vendredi, toute le gotha politicard local : maire de Poitiers, président du conseil régional, présidente du conseil régional…

Com-pro-mis on vous dit ! La CFTC est tellement fan du compromis qu’en guise de « partenaires » du Congrès, on retrouve ces indéfectibles soutiens du service public que sont… les organismes privés MACIF, AG2R la mondiale, Malakoff Médéric. Pour les « exposants » idem : fonds privés de prévoyance et retraites, boîtes privées de management et de consulting… http://cftc-congres2011.fr/partenaires-exposants/nos-exposants/

Bref, la CFTC n’est ni plus ni moins qu’une caricature de jaunisme syndical (1).

Nous ne déplorons donc certainement pas sa perte d’influence chez les salariéEs, bien au contraire. Même si nous déplorons en revanche que le sale boulot de compromission (ceci explique cela) soit surtout désormais le fait… de bureaucraties à la tête de syndicats tels que CGT et CFDT, à l’origine plus combattifs et sensés suivre les principes de base du syndicalisme, comme la Charte d’Amiens (2).

C’est aux exploitéEs, au taf ou au chômedu, d’ici ou d’ailleurs, syndiquéEs ou pas, de s’organiser à la base, pour se défendre sur des bases autonomes contre leurs proprios, leurs exploiteurs, leurs soi-disants « représentants » politiques… et syndicaux.

Ni Dieu ni maître !

(1) un syndicat « jaune » est à l’origine un syndicat créé par les patrons pour briser les grèves et la contestation ouvrière. Aujourd’hui, cette expression qualifie souvent les syndicats refusant le conflit de classe et-ou entraînant les travailleurs dans la négocation avec le patronat et l’Etat.
(2) La charte d’Amiens (1906) prônait la lutte de classe, indépendante des partis, visant l’expropriation, l’abolition du salariat et du patronat, de l’Etat et du Capital, de l’exploitation et de l’oppression « tant matérielle que morale », sous toutes ses formes. Pour les remplacer par la réorganisation complète de la société en groupement de production et de répartition égalitaires. Même vidée de son contenu originel par des décennies de main-mise léniniste sur les bureaucraties syndicales et de compromissions toujours plus honteuses, cette charte demeure la référence du syndicalisme en France (sauf bien sûr pour la CFTC).

Groupe Pavillon Noir, Fédération Anarchiste 86, 16 novembre 2011

Tract d’appel au rassemblement contre les intégristes cathos, et pour les droits des femmes, samedi 19 novembre

 Ah si Marie avait connu l’avortement…
… on n’aurait pas tous ces emmerdements !

 Rassemblement contre les cathos intégristes anti-IVG et pour les droits des femmes
Poitiers, samedi 19 novembre à 14h30, parvis de notre-Dame

 Les forces réactionnaires, de la droite sécuritaire aux lobbies catho-intégristes, fourbissent leurs armes.  Politiques liberticides, rassemblements tapageux d’intégristes cathos contre la liberté d’expression, matraquage du « rôle des religions » sur la place publique, fachos et intégristes cathos sont main dans la main… Les rassemblements et prières publiques anti-IVG se multiplient sous l’œil bienveillant des forces de “ l’ordre ”. Différents groupes obscurantistes, dont l’association SOS tout-petits et son président Xavier Dor (qui n’hésite pas à comparer avortement et génocide et qui a été condamné à plusieurs reprises pour entrave à L’IVG), mènent encore campagne cette année contre le droit des femmes à disposer librement de leurs corps, tout en persiflant contre les homosexuelLEs. Un de nos compagnons militants, homosexuel et séropositif, a même été tabassé par l’un de leurs nervis en 2004 à Paris, alors qu’il défendait le droit à l’IVG.

 Un droit acquis par la lutte : l’avortement n’est autorisé en France que depuis 36 ans. 200 000 avortements y ont encore lieu chaque année, ce qui témoigne toujours du manque d’information sur la contraception. Précédemment, l’IVG était considéré comme un crime, ce qui provoquait des milliers de décès dus à des avortements réalisés clandestinement dans des conditions dangereuses. Aujourd’hui encore dans le monde, près d’une femme meurt des suites d’un avortement clandestin toutes les 7 minutes. Dès la fin du XIXème siècle, les anarchistes ont multiplié brochures et conférences sur l’éducation sexuelle, sur la contraception, l’amour libre. Dans les actes, ils et elles pratiquaient eux-elles mêmes des vasectomies et des avortements, ce qui provoqua bien souvent une répression par les tenants de l’ordre moral. Ce droit, imposé par des décennies de luttes, est aujourd’hui remis en question par le démantèlement du service public de santé par la politique antisociale du gouvernement. Il est de plus en plus difficile d’avoir un accès réel à l’IVG par le manque d’informations, d’hôpitaux et de médecins pratiquant cet acte.

 Le contrôle des naissances est un droit inaliénable : aujourd’hui, nous sommes nombreux, hommes et femmes, a avoir fait le choix de vivre notre sexualité en toute liberté tout en contrôlant notre parentalité et éventuellement, si tel est notre désir, de ne pas procréer. Ce choix nous apparaît comme une évidence tant les conditions dans lesquelles sont tenues l’immense majorité des femmes dans le monde, l’absence de planning familial, de moyens contraceptifs, le poids insupportable de la morale religieuse et du sexisme, génèrent  familles nombreuses et misérables, le plus souvent dans les classes défavorisées. Nous proclamons le droit pour chaque individu, hommes ou femmes, de disposer de sa vie et de son corps tel que bon lui semble. L’augmentation démographique ne se confronte pas tant à une limite réelle des ressources naturelles, qu’au fait qu’elles soient accaparées par une poignée de riches. Nous savons bien que le système capitaliste, étatique, patriarcal et religieux lutte activement contre le contrôle des naissances (information, contraception, IVG…), car il dépend de cette croissance exponentielle des populations, de leur mise en concurrence par le maintien délibéré de la misère.

 L’anticléricalisme et la lutte antireligieuse demeurent une nécessité. Que ceux qui les jugent désuets regardent en France et ailleurs. Certes la calotte paraît moins puissante en France, elle a perdu de sa superbe, semble moins influencer la vie quotidienne, mais il faut creuser un peu. Pas un comité éthique où elle n’ait sa place et son mot à dire. A chaque problème dit sociétal, sont consultés curés, pasteurs, rabbins, imams et autres gourous. Et écoutés. Trop souvent leurs avis sont relayés par les gouvernements. Dernière pression en date, l’appel à retirer des manuels de SVT l’enseignement du genre. Inutile l’anticléricalisme ? Sans quitter l’Europe, l’Eglise impose encore sa morale archaïque au Portugal, en Irlande ou en Pologne : l’IVG reste interdite dans ces deux derniers pays, et dans d’autres, la multiplication de mesures restrictives aboutit presque au même résultat. Une grande partie des services de santé en Afrique est tenue par les missions chrétiennes : on mesure les conséquences dramatiques de leur influence avec la progression de la pandémie du sida. Dépassé l’anticléricalisme ? Vu ce qui se passe dans les Amériques, entre les fondamentalistes protestants du Nord, et les cathos intégristes du Sud excommuniant une gamine de neuf ans violée parce qu’elle a avorté ?

 Aujourd’hui comme toujours, ici comme dans le monde entier, luttons pour la contraception et l’avortement libres, gratuits et accessibles. Nous ne laisserons pas ces droits être remis en cause par les capitalistes et les curetons. Pour une société garantissant le droit aux femmes d’interrompre leur grossesse, par un projet anarchiste d’égalité sociale et économique, fédéraliste et internationaliste !

 Groupe Pavillon Noir -Fédération anarchiste 86 

 MAJ : Voir aussi le tract de la CNT-FAU 86 :

http://www.cnt86.ouvaton.org/article.php3?id_article=320

Et l’affiche du concert !

http://nidieuxnimaitrenpoitou.over-blog.com/article-poitiers-street-concert-contre-l-ordre-moral-19-nov-2011-88388763.html

Appel à deux rassemblements

Dans le cadre des attaques globales portées, contre les populations du monde entier par les institutions militaires, et contre la dignité des femmes, des homosexuelLEs et transgenres par le lobby catholique intégriste pro-IVG, le groupe Pavillon Noir appelle à DEUX rassemblements, qui auront lieu dans les jours à venir :

http://fa86.noblogs.org/?page_id=325

Vendredi 11 novembre, Poitiers, Place d’armes, 16h : rassemblement antimilitariste.

Samedi 19 novembre, Poitiers, parvis de Notre-Dame, 14h30 : contre-rassemblement contre les intégristes anti-IVG de « SOS tout-petits ».

Et parce qu’il ne s’agit pas que de lutter contre, mais aussi POUR tisser
ici et maintenant des liens solidaires et des alternatives concrètes au
désastre social en cours, nous vous rappelons aussi cet événement :

Mercredi 16 novembre, Poitiers, Biblio Café, Rue de la Cathédrale, 19h-20H30 : L’autogestion : échange d’expériences et de projets. Proposé par le groupe Pavillon Noir (Fédération Anarchiste 86). Entrée libre.

Groupe Pavillon Noir, Fédération Anarchiste 86

Des jeunes cathos intégristes font le siège du Théâtre de la ville de Paris

Des jeunes cathos intégristes font le siège du Théâtre de la ville de Paris

Blasphème

Des jeunes cathos intégristes font le siège du Théâtre de la ville de Paris

Ajout du témoignage de Evelyne Sire-Marin et de la vidéo des perturbations de jeudi soir.

Entourés de rouge, des intégristes menacent les spectateurs du Théâtre de la ville de Paris (Thomas Schlesser)

Paris, dimanche 23 octobre, 15 heures. « Le théâtre de la ville est entouré de CRS », nous raconte Evelyne Sire-Marin, vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme. « A l’intérieur de la salle, des dizaines de vigiles gardent la scène. » Une troisième fois, la pièce de Roméo Castellucci, « Sur le concept du visage du fils de Dieu », est interrompue par des hurlements des militants du Mouvement de la jeunesse catholique de France (MJCF), les mêmes catholiques intégristes qui ont détruit en avril la photographie d’Antonio Serrano, « Piss Christ », à Avignon.Ils crient « non au blasphème, non a la christianophobie ». La pièce porte sur le désastre de la vieillesse, sur fond d’un visage impassible du Christ peint par Antonello da Messina, peintre de la renaissance italienne. On sort du théâtre entre les bottes et les casques de CRS. On est en France, en 2011. La France, pays de la liberté d’expression ?Le vendredi précédent, au premier étage du Théâtre de la ville, deux maigres silhouettes sont perchées sur le balcon et menacent de déverser sur la foule de l’encre et de l’huile de vidange – comme, au Moyen-Age, on lançait divers matériaux des machicoulis des châteaux-forts.Les individus souillent le public venu assister au spectacle de Romeo Castellucci « Sur le concept du visage du fils de Dieu ».La veille, ils avaient déjà perturbé le spectacle. Voici la vidéo de la scène filmée et mise en ligne par les intégristes cathos eux-mêmes.

http://www.youtube.com/watch?v=EuPCF238ejI&feature=player_embedded

Au Théâtre de la ville, jeudi 20 octobre, filmé par « Renouveau français »

« Je suis chrétienne, moi, comme eux ! »

Projection du Christ d’Antonello de Messine, « Sur le concept du visage du fils de Dieu » de Roméo Castellucci (Théâtre de la ville de Paris)

L’œuvre met en scène une confrontation de l’indigence humaine (un père incontinent) et de son Sauveur (la projection d’un immense visage du Christ peint par Antonello de Messine). Elle s’interroge sur les limites possibles de la pitié, de la miséricorde, de la bienveillance.Le Christ finit par être saccagé, à coups de grenades et d’excréments.Déjà, ce jeudi 20 octobre, des protestations de l’Institut Civitas avaient considérablement perturbé la représentation. Cela recommence. Les gens s’agacent. Une jeune étudiante en théâtre explique :« Je suis chrétienne, moi, comme eux, et si ça trouve, ça va me choquer et ça ne me plaira pas, mais je ne vais pas empêcher des gens de rentrer ! La liberté, c’est ça aussi. »

Trouver refuge au café Sarah Bernhardt

Sur la place du Châtelet, au cœur de Paris, on est frappé par le déploiement d’un cordon de sécurité. De nombreux CRS entravent les accès. Dans le café Sarah Bernhardt, qui jouxte le Théâtre, des gens se réfugient, viennent se laver après avoir reçu des projectiles.

Le public et les badauds s’étonnent : il suffit donc de l’incursion de deux individus au balcon de la façade d’un théâtre pour susciter une véritable panique ? En fait, de l’aveu d’un policier, c’est surtout par peur de l’accident : il faut éviter par exemple qu’un manifestant ne tombe…

Des caricatures de Mahomet à l’intégrisme catho

L’intégrisme catholique ne constitue certainement pas le paroxysme de la censure et il est très simple de taper dessus sans craindre de s’exposer soi-même. Mais l’intégrisme catholique est au fond une cible pratique.

Aussi, avant de le critiquer, faut-il rappeler, pour défendre sans réserve la liberté d’expression, qu’il n’y a aucune raison de taire de force la voix de ceux qui se sentent insultés dans leur foi. Mieux : la liberté d’expression doit pouvoir garantir les formulations de hargne voire de malveillance de ceux-là qui se sentent injuriés.

En 2005, le point de vue de quelques musulmans militant contre les caricatures de Mahomet ; celui de quelques catholiques militant contre les représentations scabreuses de leur Dieu sont légitimes, audibles.

Mais défendre la possibilité d’un point de vue ne revient pas à permettre sans riposte son déploiement agressif ni son prolongement par l’action violente.

Le précédent « Piss Christ »

Après l’affaire « Piss Christ » (œuvre d »Andres Serrano vandalisée à Avignon en avril), les modes opératoires choisis par la branche dure du catholicisme, tournent à la censure aveugle, et même stupide.


Affiche de promotion de la campagne contre « Piss Christ » d’Andres Serrano

Or, ces actes sont souvent suivis dans les médias par des discussions portant sur la provocation et plus généralement sur le rôle et la nature de l’art. Fausse route. Le simple fait d’examiner ce genre de problèmes, dans la foulée des interventions brutales de l’Institut Civitas qui prône « la restauration de la royauté sociale de Notre-Seigneur Jésus-Christ » ou d’autres organisations fondamentalistes, cautionne partiellement la violence desdites interventions.

Par conséquent, en amont de toute considération sur la qualité d’une œuvre, plastique ou théâtrale, il faut écraser avec intransigeance ceux qui en entravent l’expression.

La destruction d’une œuvre d’art, atteinte au bien commun

L’antichristianisme de notre société est-il fantasmé ? Est-il réel ? Peu importe. Dans les deux cas, s’il se manifeste à travers des productions de l’esprit et des œuvres d’art – qu’on les apprécie ou non –, il est absolument intolérable de les voir attaquées et censurées.

On pouvait déjà s’étonner de la tiédeur de la réaction officielle de Frédéric Mitterrand lors de l’affaire « Piss Christ », confiant, après s’être indigné du saccage, qu’il pouvait en comprendre le caractère choquant pour certains publics.

La destruction d’une œuvre d’art, quelle qu’elle soit, et en admettant même sa médiocrité, est une atteinte au bien commun. La règle doit être infaillible : toute idée, même la plus épouvantable, est formulable dans une démocratie où prévaut la vraie liberté d’expression.

Mais l’Institut Civitas n’use plus de ce droit ; il prend des résolutions visant à éteindre de force celui d’autrui, au nom d’une opinion particulière. La sanction à son encontre ne doit souffrir aucune ambiguïté

Gare ! Les censeurs repèrent les brèches

Faudra-t-il attendre que les vandales détruisent un tableau de Caravage ou brûlent des exemplaires des « Fleurs du mal » de Baudelaire pour enfin entendre les autorités brandir de très sérieuses menaces contre eux ?

Car, dans la foulée de l’affaire « Piss Christ » et après les premières représentations perturbées du spectacle de Castellucci, il n’y a pas eu de déclaration tapageuse du ministère de l’Intérieur, dont c’est pourtant la fonction. Celui-ci n’a pas annoncé de réprimande sévère, et même exemplaire, contre les exactions commises.

A chaque fois, les troupes de censeurs en tout genre, bien au-delà des sphères religieuses et de l’ordre moral, marquent des points et repèrent les brèches où s’engouffrer.

Il ne faudrait pas que cette haine de la culture, dépourvue de tout sens critique, s’installe trop facilement dans notre société. Elle commence à en prendre le chemin, dans une indifférence pesante. Même à ce stade embryonnaire, elle mérite une vigilance totale.

Rue 89, Tomas Schlesser, 22/10/2011

« L’indigné » Père Patrice et France 3, contre les indignéEs et « l’anarchie »

« L’indigné » Père Patrice et France 3, contre les indignéEs et « l’anarchie »

France 3 nous a concocté ce lundi une belle interview : celle de la nouvelle mascotte « indignée »/anti-indignéEs des médias, au service d’un pouvoir que les mouvements sociaux dérangent :

http://www.dailymotion.com/video/xlwc0j_patrice-gourrier-le-pretre-indigne_news

On y voit des extraits vidéo de gens au visage dissimulé, défiant la police, passer à l’écran au moment même où père Patrice dénonce les indignés locaux de Poitiers. En ayant le culot (que lui confère la calotte ?) de les assimiler à des « récupérateurs » de l’indignation. Au final, cette séquence n’est pas tant l’indignation d’un curé, qu’une dénonciation des indignéEs.

Qu’il ne s’agisse pas d’images locales mais d’un bidouillage vidéo pathétique ne semble pas avoir dérangé au montage (à moins qu’il y ait un espèce de Colisée à Poitiers et que j’aie raté un coche dans les projets pharaoniques de coeur d’agglo ?). Pas plus que de donner tribune et semblant de crédibilité à quelqu’un qui juge les indignéEs sans jamais être venu à la moindre assemblée : belle démonstration d’investigation journalistique ! Passons sur l’assimilation, acceptée par la journaliste sans sourciller, de « l’anarchie » à la « violence » (on a l’habitude). Mais que dire enfin de la « laïcité » prétendue d’un service public de journalisme, qui d’un côté tait ou minimise les assemblées d’indignéEs à Poitiers, et de l’autre légitime les analyses ahurissantes d’un type sous prétexte qu’il porte une soutane, sans broncher lorsqu’il conclut sur l’affirmation que l’indignation des chrétiens est la seule issue ?

Puisque la journaliste martèle que Père Patrice est un « indigné », voyons toute la crédibilité à donner à cette indignation, en rappelant les propos que le curé tenait sur un plateau télé, il y a de cela quelques années :

http://www.dailymotion.com/video/xf99fp_patrice-gourrier-lettre-ouverte-au_news#rel-page-1

A l’époque de sa « lettre ouverte au prochain pape », on y constate que père Patrice :

-critiquait la soutane en refusant de la porter à la télé (« j’ai jamais aimé les robes », « la tradition demande la simplicité des vêtements »)… mais qu’il ne semble avoir à présent aucune répugnance à parader en robe noire dans les colonnes de la PQR ou sur les plateaux télé (la soutane, on a beau dire, ça pose son homme quand la nécessité de casser les mouvements sociaux l’impose).

-critiquait le fait qu’un pape exerce encore ses fonctions après 75 ans, quand la tradition exige des évêques, y compris celui de Rome, qu’ils renoncent à leur charge passé cet âge fatidique… alors que père Patrice encense aujourd’hui dans la presse un pape Benoît XVI qui déclare pas moins de quatre-vingt quatre piges au compteur !

-condamnait par ailleurs le même Ratzinger (aujourd’hui Benoît XVI) comme faisant partie de ces conservateurs intégristes grenouillant autour de Jean-paul II de façon « sordide », en « profitant » de prendre le pouvoir sur le pape… à présent, père Patrice ne tarit plus d’éloges pour Benito seizième, aux positions violemment sexistes, homophobes et transphobes, anti-avortement et anti-contraception. Positions que Patrice Gourrier dénonçait aussi hier, et semble avoir aujourd’hui absoutes… sans doute ses priorités ont-elles changé ?

Pour un curé qui assène, à chaque communiqué dans les médias, sa détestation de « l’anarchie », on peut donc trouver ses positionnements un peu anarchiques… à moins que sa véritable priorité, et celle des médias qui relaient largement son discours, soit de discréditer les indignéEs qui se rencontrent pour de vrai, sans l’intermédiaire d’un journaliste ou d’un curé.

Mais c’est pas comme si on avait pas l’habitude : si l’indignation de l’Eglise a souvent été à géométrie variable en fonction du contexte, elle a toujours été en bonne place, aux côtés de la propagande de l’Etat et des patrons, pour la répression des mouvements sociaux. Lorsque le pouvoir est en position de force pour cogner, silence religieux. Lorsqu’il est mis en difficulté, on se positionne bien vite contre ses contestataires, au nom du tri du bon grain de l’ivraie…

Médias, curés, vous aurez beau cracher sur les gens, sur leur « poing levé » en signe de cette solidarité et de cette indépendance que vous haïssez… sachez qu’il y en aura toujours pour dénoncer vos pauvres petits sermons !

Juanito, 25 octobre 2011