Archives de catégorie : Questions de genres

Habent papam…

Habent papam…

Le nouveau pape, « François Ier », a été élu ce mercredi soir. Il s’agit du cardinal Jorge Bergoglio. L’Eglise catholique, après avoir imposé un pape Benoît XVI, très conservateur, a donc choisi un pape sud-américain, un argentin plus précisément.

Bergoglio est un homme réputé d’origine modeste et au train de vie modeste ; nombre de médias se complaisent à clamer qu’il vit dans un appartement, qu’il se déplace en métro et qu’il fait sa cuisine tout seul. Si cela suffit à le rendre saint, alors les milliards de prolos que compte la planète sont une armée de saints… Bref Bergoglio, qui annonce vouloir « lutter contre la pauvreté », est annoncé par les médias comme humble et proche des pauvres. Le nom même de « François », que Bergoglio s’est choisi, se rapporte d’ailleurs au fondateur de l’ordre des franciscains, ordre de moines mendiants fondé au Moyen-Âge. Nombre de chefs d’Etat ont donc, comme il se doit salué cette élection (dont Hollande, comme nous le verrons plus loin). Les médias ont évoqué un tournant possible au sein d’une Eglise passablement passéiste.

Mais l’Eglise a-t-elle vraiment décidé de tourner la page du conservatisme en nommant un sud-américain ? On peut en effet y voir aussi un enjeu stratégique, pour récupérer une population sud-américaine délaissant de plus en plus l’Eglise catholique, pour se tourner vers les églises protestantes qui pullulent. Cette préoccupation se traduit bien chez ce nouveau pape, qui avait vitupéré dès septembre dernier contre les prêtres refusant de faire baptiser les jeunes enfants nés hors-mariage.

En réalité, le parcours de ce jésuite n’est pas franchement celui d’un réformateur. Le nouveau pape se traîne même de sacrées casseroles !

Si celui-ci se déclare contre le libéralisme, il a de fait toujours combattu (tout comme son prédécesseur Benoît XVI) la théologie de la libération, un courant progressiste et « social » de l’Eglise catholique sud-américaine, inspiré en partie par le marxisme. « L’apolitisme » de la compagnie de Jésus, revendiqué par Bergoglio, est à géométrie très variable…

Ce n’est pas tout. Pendant la dictature des généraux en Argentine, ayant fait 30.000 morts, Bergoglio n’a jamais dénoncé les crimes des généraux… à l’image de l’institution catholique argentine, qui fut clairement complice de la dictature. Un autre Jorge, le général dictateur Videla, a pourtant frappé un certain nombre de prêtres engagés dans la théologie de la libération, dont des gens que Bergoglio connaissait. Botus et mouche cousue : apolitisme on vous dit ! Il faut dire que Videla déclarait vouloir restaurer  » la civilisation catholique occidentale ». Ca valait sans doute bien quelques dizaines de milliers de tortures et d’assassinats… les desseins de Dieu sont impénétrables, rendez à César ce qui est à César, tout ça tout ça.

Même devenu évêque, Bergoglio a refusé de dénoncer la complicité flagrante de l’institution catholique. Pire, il a affirmé que les procès intentés contre des évêques catholiques accusés d’avoir participé aux séances de torture, étaient une « campagne de calomnie menée contre l’Eglise ».

L’histoire ne s’arrête pas là. Un bouquin paru en 2005, El Silencio, révèle que Bergoglio aurait retiré sa protection à deux prêtres jésuites travaillant dans les bidonvilles, et donné son feu vert en 1976 à l’armée pour les enlever… Entendu comme témoin par des juges dans cette affaire, Bergoglio a parlé de « diffamation », et affirmé vouloir parler sans tabous de l’Eglise sous la dictature. Pour lui, l’Eglise n’aurait rien à se reprocher, à part quelques individus isolés complices du pouvoir.

Bergoglio n’est pas un complice des fachos que sur le plan du positionnement politique. Sur le plan des libertés des homos et des femmes, ce n’est guère mieux. En 2010, Jorge Bergoglio a ainsi déclaré que l’homosexualité était « un démon infiltré dans les âmes« , et que les marches pour le mariage gay étaient de « la main du diable« … Diantre !

Bergoglio ne s’arrête pas à de simples déclarations. C’est lui, en personne et avec une virulence toute particulière, qui a mené la fronde contre la loi légalisant le mariage homosexuel en Argentine. Ainsi que contre le droit donné aux transsexuel-le-s de changer de sexe pour l’état civil. Ou encore contre le développement de l’éducation sexuelle… De fait, le cardinal a pris la tête d’un véritable affrontement de l’Eglise catholique argentine contre Cristina Kirchner (présidente de centre-gauche). Dans cette fronde, Bergoglio (cet « ami des pauvres ») n’a d’ailleurs pas hésité à s’afficher officiellement avec les partis les plus réacs, ainsi qu’avec les patrons et les milieux d’affaires !

On ne s’étonnera pas non plus qu’il se soit toujours farouchement opposé aux droits des femmes. Notamment à la contraception et au droit à l’avortement, toujours interdit en Argentine… sous la pression de l’Eglise.

Tout cela n’empêche pas un autre François, le très laïque président Hollande, de proclamer dans un communiqué : « J’adresse au Pape François 1er mes félicitations les plus chaleureuses et mes voeux très sincères pour la haute mission qui vient de lui être confiée à la tête de l’Eglise catholique pour faire face aux défis du monde contemporain« . « La France, fidèle à son histoire et aux principes universels de liberté, d’égalité et de fraternité qui fondent son action dans Le Monde, poursuivra le dialogue confiant qu’elle a toujours entretenu avec le Saint-Siège, au service de la paix, de la justice, de la solidarité et de la dignité de l’homme« .

Une belle leçon de solidarité entre hommes de pouvoir.

Juanito, Pavillon Noir (FA 86), 14 mars 2013

NdPN : notons que pas un mot sur ces points noirs du nouveau pontificat n’a été signalé, ni par l’archevêque de Poitiers, ni par la Nouvelle République. Alleluia !

[86] Quand les institutions surfent sur la journée de la femme

Nos chères institutions n’en ratent décidément pas une quand il s’agit de faire les louanges de la LGV Tours-Bordeaux, ou plus généralement de l’esclavage salarial. Relayées comme il se doit par notre chère presse locale (pour changer). Deux articles de la Nouvelle République évoquent ainsi deux événements médiatiques surfant sur « la journée de la femme », avec des femmes… de pouvoir.

L’un avec la nouvelle préfète de la Vienne, rencontrant la responsable de la comm de Lisea (filiale de Vinci), vantant les mérites de la mixité pour construire la LGV Vinci. Après l’argument de l’emploi, et les enfants handicapés, la promotion des femmes ! L’Etat et Vinci ne reculent devant rienpour imposer leur chantier en forme de désastre social et écologique.

L’autre d’une eurodéputée « socialiste », qui propose une « carte professionnelle européenne », non sans une vibrante tirade : « aujourd’hui, c’est la journée des femmes. Le poète dit que la femme est l’avenir de l’homme, moi je rajoute que la jeunesse est l’avenir de l’Europe »

PS : Rien à voir, mais hier a eu lieu à Paris une manif à l’occasion de la journée de la femme. La Fédération Anarchiste avait appelé à constituer un cortège libertaire, pour défendre l’autonomie des luttes antipatriarcales, contre les récupérations institutionnelles. Le service d’ordre du PCF, sans doute pour fêter à son humble mesure les 60 ans du regretté Staline, a gazé le cortège anarchiste au départ de la manif (à Stalingrad, ça ne s’invente pas). Compagnons et compagnes ont été visé-e-s : il faut bien défendre la parité… un communiqué fédéral suivra bientôt.

Pavillon Noir, 9 mars 2013

Antisexisme un jour, patriarcat toujours

Antisexisme un jour, patriarcat toujours

Comment prétendre combattre l’esclavage capitaliste et étatique et la société de classes, si nous reléguons au second plan la question de la division entre genres, âges, émotions, si nous continuons à faire nôtre l’idée absurde que femmes ou enfants seraient des êtres inférieurs qu’il conviendrait de discipliner ou de guider avec paternalisme ?

La misère frappe majoritairement les femmes, victimes expiatoires des souffrances de ce monde. Moins bien payées, toujours aussi sollicitées pour accomplir les tâches les plus ingrates et les plus répétitives. Et servir de défouloir émotionnel et sexuel à la violence masculine. Dans le monde, une femme sur cinq sera victime de viol ou de tentative de viol, au cours de son existence.

La division sociale se nourrit du sexisme ou, pour employer un terme plus pertinent, de la domination masculine. Le système patriarcal attribue aux individus désignés comme « femmes » ou « hommes », selon la configuration du sexe biologique, des caractéristiques particulières sur lesquels il faudrait se mouler. En particulier les femmes, qui auraient le goût pour la dépense et les choses légères, peu de compétences en géométrie, auraient une propension à l’« l’hystérie » et autres fadaises comme l’incompétence à la lecture des cartes routières. Ayant pour contrepartie d’autres « qualités » décrétées, telles que l’écoute, la disponibilité, la douceur, et tant d’autres choses qu’on exige en général d’un-e esclave bien soumis-e.

Les femmes sont affublées par le capitalisme des tâches de reproduction et d’entretien de la main-d’œuvre, tâches bien évidemment non rémunérées, et donc non valorisées socialement. Les femmes peuvent ainsi demeurer le réceptacle de la violence subie par les hommes au travail : viols, coups, et meurtres. Une femme meurt tous les trois jours en France sous les coups de son « compagnon ».

Il est là aussi intéressant de noter combien l’Etat, à travers ses lois, a pu jouer un rôle actif dans la production de ces normes inégalitaires et atrophiantes. La notion même de famille mononucléaire, du couple hétérosexuel avec enfants, où femme et enfants obéissant au pouvoir patriarcal du « chef de famille », a été largement construite par la bourgeoisie industrielle, et codifiée dans la régression terrible que constitua le code civil de Napoléon Bonaparte en matière de droits sociaux.

Face à ces injustices insupportables, face à la violence masculine, les féministes se sont organisées en ne comptant que sur elles-mêmes, en constituant elles-mêmes des réseaux d’entraide et de lutte, obtenant ainsi de significatives avancées comme le droit à l’avortement.

Une grande partie du mouvement féministe a hélas été digérée par le pouvoir. L’Etat a mis en place des lois de parité qui non seulement maintiennent pour discriminant social la distinction des individus en sexes biologiques, mais conduisent des révoltées à commuer leurs révoltes en revendications, sous les fourches caudines de la médiation de l’Etat, où à reléguer les questions de classes, faisant ainsi la même erreur que nombre de militants masculins reléguant les luttes féministes au second plan.

Nous sommes contraint-e-s de reconnaître notre oppression pour la subvertir. De nous reconnaître « prolétaires », « femmes », « arabes », « homos », de partir de la situation concrète d’une catégorisation du pouvoir qui nous enferme, sur les bases d’une situation commune. Sans nous laisser pour autant « représenter ». Nous devons par ailleurs garder en tête que notre but est l’abolition de ces catégories mêmes de la discriminations, qui sont celles de la domination.

Ce n’est pas parce que je suis catégorisée « femme » qu’on achètera mes désirs d’en finir avec la sclérose des normes genrées et la domination masculine, pas parce qu’on me dit femme que je vais me satisfaire de l’aliénation d’un bulletin de vote, d’une place paritaire sur une liste électorale, d’un salaire d’esclave féminin tendant à devenir égal à celui d’un esclave masculin, de l’extension aux mecs de la torture de l’épilation à la cire. Ce n’est pas parce que je suis prolétaire que je suis heureuse d’être l’esclave salarial d’un patron ou d’un « Etat social », que je jubile de me voir représentée sur les affiches caricaturales de gauche en bleu de travail à casquette, une clé à molette à la main. Ce n’est pas parce qu’on me catégorise comme noire de peau, que je me réjouis d’une « discrimination positive » hissant des vedettes « issues de la diversité » à l’écran pour y exhiber leur opportunisme et leur lâcheté, ou des salauds à des postes de pouvoir qui vont m’exploiter, me fliquer ou me virer. Ce n’est pas parce que je suis catégorisé-e « homo » qu’on va acheter mon adhésion au système hétéroflic par la bague au doigt pour tou-te-s, ou un événement gay-pride où je vais jouer la lesbienne folklorique pour les badauds citoyennistes. Marre des journées exutoires d’un jour.

Dès que la lutte radicale pour l’abolition de ces outils du pouvoir, qui permet de rogner du terrain (sous forme de réformes ou de « droits » concédés par l’adversaire), cède le terrain à un identification positive et sclérosante aux catégories étanches qui nous enferment, la puissance subversive de la lutte est étouffée, puis récupérée, digérée. Au final, les réformes et les droits se retournent contre nous, lorsque nous nous en contentons.

Nous ne voulons pas d’une cage plus grande et aux barreaux repeints en couleur dorée. Nous voulons faire un beau feu de joie de toutes les cages qui nous enferment, de toutes les étiquettes qui nous cantonnent à des rôles. Des droits, des droits… les libertés se prennent, elles ne se demandent pas. Les ténors du barreau parlotent ? Mettons ce temps à profit pour limer tous les barreaux.

à bas les étiquettes

Terminons sur l’un des prétextes les plus grossiers donnés par les Etats « démocratiques » à leurs interventions militaires : la fameuse « défense des droits des femmes ». L’Occident a beau jeu de vilipender le voile islamique sous toutes ses formes, alors qu’il véhicule un discours genré, masculiniste et sexiste à longueur de discours politiciens, médiatiques et publicitaires !

Les clichés sexistes surabondent dans la sphère d’influence des Etats d’Occident, des plateaux télés aux publicités, avec des modèles féminins affligeants, amaigries par des régimes délirants, bimboïsées, aussi érotisées que dénuées de tout véritable érotisme. Les femmes sont violemment incitées par la publicité, vomie par toutes les pores du système marchand, à dépenser leurs maigres salaires en fringues, en régimes dangereux ou en maquillages chimiques, dans l’injonction permanente de rester sexy, bref soumises et disponibles à la domination masculine. Tant pis pour les innombrables jeunes femmes tombant dans la spirale destructrice de l’anorexie, pour les « garçons manqués », pour les « camionneuses », pour les « moches », pour les « vieilles » passée la quarantaine. Tant pis pour toutes celles qui, faute d’argent, de temps ou d’envie, sont considérées comme des boudins parce qu’elles commettent la faute impardonnable de « ne pas assez prendre soin d’elles ».

Le spectacle médiatique contraint les femmes à se soumettre au salariat ou au cirque citoyenniste. Les rares femmes parvenant à des postes de domination, au sein d’entreprises ou d’appareils étatiques, sont contraintes d’afficher encore plus de froideur émotionnelle, de volontarisme ou d’autoritarisme que les hommes pour s’intégrer au système patriarcal, car les médias ne manqueront pas de leur tailler un short au moindre faux pas. Les juges, les autorités religieuses et autres « spécialistes » de l’éducastration continuent d’imposer aux femmes l’éducation exclusive des enfants, véhiculant le mythe de « l’instinct maternel ». Les femmes qui n’auront pas d’enfants, passés trente-cinq balais, seront les victimes de remarques incessantes. L’avortement continue d’être attaqué dans la sphère politique par une réduction des budgets des plannings familiaux, et sur la place publique par des associations religieuses obscurantistes et fascisantes, protégées par des cordons de police et auxquelles les médias ouvrent leur tribunes au nom du « débat public ».

Pour le capitalisme, qui veut que la force de travail se reproduise à ses propres frais dans la sphère dite « privée », le fait est qu’en Occident, la tâche de reproduction du prolétariat reste autoritairement dévolue aux femmes. Voter pour des chefs (par ailleurs largement masculins), bosser comme une esclave à temps partiel et mal payée, veiller à se montrer performante sexuellement tout en continuant à torcher les lardons, à faire les courses et à repriser les chaussettes, voilà la conception de la liberté féminine à la mode occidentale. Et l’on reprochera encore aux femmes, placées sous une pression sociale insupportable, d’avoir une propension à « l’hystérie »…

Si le voile est une discrimination sexiste révoltante parmi d’autres, dans les régions du globe sous le joug de machos islamistes prétextant de lois religieuses pour maintenir leur domination abjecte sur les femmes, l’islamisme n’a hélas pas le monopole du patriarcat. Voir les Etats occidentaux intervenir au nom des « droits des femmes » a de quoi donner l’envie de bons grands coups de pieds dans les couilles.

Revendiquer un jour un seul sur les 365 que compte une révolution planétaire, voilà qui en dit long sur l’institutionnalisation des luttes féministes. Il y a pourtant, ici et maintenant, matière à faire la révolution au quotidien.

J., groupe Pavillon Noir, 8 mars 2013

Nantes au coeur de l’offensive masculiniste

Nantes au coeur de l’offensive masculiniste

« Cause des pères » ou offensive masculiniste ?

Ce weekend ont eu lieu à Nantes deux actions spectaculaires et coordonnées que les médias attribuent aux militants de la « cause des pères » et que nous qualifions de masculinistes (1). Cette occupation de grues par des militants d’associations masculinistes s’est déroulée quelques jours seulement avant la manifestation qu’ils organisaient à Nantes. Nul hasard. Cela s’inscrit bien dans une stratégie de lobbying bien ficelée. Il est grand temps de réagir pour stopper l’offensive et en finir avec la complaisance médiatique et politique à l’égard de ces hommes revanchards.

Vendredi 15 février 2013, Serge Charnay, un homme de 42 ans, monte sur une grue des anciens chantiers navals de Nantes, où il déploie une banderole sur laquelle on peut lire « Benoit, 2 ans sans papa ». Samedi 16 février, Nicolas Moreno, membre des associations de « droits des pères » SVP papa et SOS papa escalade lui-aussi une grue et déploie deux banderoles « pères en galère, pères solidaires » et « père un jour, père toujours ». Il descendra quelques heures plus tard, alors que Serge Charnay sera resté quatre jours sur son perchoir, après avoir tagué l’inscription « sauver nos enfants de la justice ». Ces deux pères estiment être privés de leurs enfants, victimes d’un pouvoir judiciaire qui détruirait les pères.
Derrière la « cause des pères » : le mouvement masculiniste(1).
Les revendications émises, les slogans utilisés et les associations mobilisées autour de ces événements ne laissent planer aucun doute : reprenant à l’identique les modes d’actions de l’organisation « Fathers 4 Justice » (2), la branche française du mouvement masculiniste effectue là ses premières actions spectaculaires. Le masculinisme est un mouvement organisé d’hommes hostiles à l’émancipation des femmes, souhaitant conserver leurs privilèges et leur position de pouvoir au sein de la société. Leurs thèmes de prédilection sont les droits des pères, les violences faîtes aux hommes et la crise de la masculinité. Les masculinistes estiment que les hommes sont victimes d’une société où les femmes auraient pris le pouvoir. Les actions de Nantes n’arrivent bien évidemment pas au hasard. Elles sont l’expression de la stratégie politique de ce mouvement. L’occupation des grues tombe quelques jours avant l’examen de la loi sur la résidence alternée, alors que les associations de pères divorcés pratiquent depuis des années un intense lobbying pour rendre celle-ci obligatoire. Par ailleurs, mercredi 20 février aura lieu, toujours à Nantes, une manifestation organisée par SVP papa. Les coups d’éclats de ce weekend permettent à cet événement plutôt confidentiel d’être amené sur le devant de la scène. Les masculinistes passent donc à l’offensive, médiatiquement et politiquement.
Les complaisances médiatique et institutionnelle
Ceux-ci rencontrent un énorme écho dans les médias nationaux, qui ont tous largement relayé les évènements de ce weekend. Les thèmes des « droits des pères », des « pères en colère » ou encore de « la cause des pères » se retrouvent ainsi propulsés à la une. Comme pour le colloque de SOS hommes battus il y a quelques mois, qui n’a rassemblé que quelques dizaines de personnes, la couverture médiatique est surdimensionnée. Cela nous prouve une fois de plus que les hommes qui se plaignent bénéficient instantanément d’un large soutien, sous couvert d’ « originalité ». Les actions ont aussi bénéficié d’un fort soutien institutionnel. Christian Galliard de Lavernée, préfet de Loire-Atlantique, a ainsi passé quelques coups de téléphone au président du Tribunal de Grande Instance pour s’assurer que le dossier de Serge Charnay bénéficierait d’une requête expresse. Le préfet a aussi indiqué qu’il ne ferait pas intervenir les forces de l’ordre. Des personnes en lutte contre la construction de l’aéroport de Notre-Dame Des Landes ou des féministes qui protesteraient contre les violences faîtes aux femmes auraient-elles bénéficié d’autant de mansuétude de la part de Monsieur Galliard de Lavernée ? Enfin, le premier ministre Jean-Marc Ayrault, attiré par tant d’agitation dans « sa » ville, a demandé aux ministres de la Justice et de la Famille de recevoir SOS Papa chose qui fût faite dès Lundi 18 février. Ces larges soutiens médiatiques et politiques, nous montrent de manière consternante que le masculinisme est bien une facette de l’idéologie ambiante.
Les réalités sociales sur l’implication des pères
En réponse, rappelons simplement quelques réalités sociales. Lorsque certains pères se plaignent que « dans 80% des séparations, c’est la mère qui obtient la garde des enfants », ils oublient de dire que cela est à la demande des deux parents. Autrement dit, l’écrasante majorité des pères divorcés s’accomodent très bien de ne pas avoir à s’occuper de leurs enfants (nombreux d’ailleurs sont les pères revendicateurs qui se « découvrent » pères au moment du divorce, après avoir été très peu impliqués dans l’éducation des enfants auparavant). Dans les cas restants, quand il y a litige, celui-ci porte sur le montant de la pension alimentaire, que les pères trouvent trop élevé. Rappelons aussi que la résidence alternée est loin d’être la solution idéale qu’on nous dépeint, en particulier dans le cas de pères violents ou incompétents. Quant à savoir si, au final, dans le nombre infimes de pères de bonne foi qui auraient pû être « lésés », la Justice a agi de manière injuste, c’est fort possible. C’est aussi le cas lorsque des femmes violées doivent démontrer que ce ne sont pas elles les coupables. Elles sont des dizaines de milliers en France, quand les pères mécontents représentent tout au plus quelques centaines de personnes. La justice est effectivement sexiste, comme le reste de la société. Mais n’inversons pas les rôles : la « cause des pères » est, avant tout, la réaffirmation du pouvoir des hommes sur les femmes, les enfants, et l’ensemble de cette société.
Serge Charnay et Nicolas Moreno : des cas d’école des pères revanchards.
A titre indicatif, même s’il n’est pas indispensable de s’arrêter sur chaque cas personnel, il est intéressant de se pencher sur l’histoire de ces deux « pères en colère ». Pourquoi n’ont-ils pas la garde de leurs enfants ? Qu’ont à dire leurs ex-compagnes ? Des questions que peu de monde a pris la peine de se poser jusqu’à maintenant… Serge Charnay avait perdu le droit de garde, le droit de visite ainsi que l’autorité parentale (fait rarissime) après avoir disparu pendant deux mois et demi avec son fils, suite à un enlèvement perpétré avec violence. Il a pour cela été condamné à quatre mois de prison ferme. Il demande aujourd’hui l’annulation pure et simple de ces diverses décisions de justice. Nicolas Moreno est un plutôt un habitué des actions militantes de « droits des pères » : après une grève de la faim de trois semaines devant le tribunal de Valence, il organisait avec SVP papa un rassemblement devant tribunal de Grenoble le jour du procès où, en appel, il demandait la garde principale de ses enfants. Accusé par son ex-compagne de violences conjugales et maltraitance (accusations qu’il récuse), il ne supporte pas le fait que celle-ci ait choisi de déménager loin de chez lui. Rappelons enfin que l’association SOS papa, qui soutient l’action de Serge Charnay, propose aux pères divorcés des conseils juridiques pour payer moins de pension alimentaire ou faire réviser les jugements, y compris pour les hommes reconnus coupables de violences sur leur ex-conjointe ou sur les enfants.
Contrer ce mouvement dangereux dès maintenant !
A travers les actions de ce weekend et l’écho tristement favorable qu’elles ont rencontré, nous avons affaire à une montée en puissance du mouvement masculiniste. Il n’est pas étonnant de constater que celle-ci s’effectue par le biais de la « cause des pères », qui constitue un cheval de Troie particulièrement efficace. Il est de notre devoir de répondre immédiatement à cette percée et de stopper les avancées de toute idéologie réactionnaire, ce à quoi nous nous employons déjà. Pour nous aider, merci de faire circuler largement ce communiqué.
Collectif Stop Masculinisme, mardi 19 février 2013.
(1) Pour des précisions sur le mouvement masculiniste que, pour des raisons de place et de compréhension nous ne développerons pas ici, lire les brochures « Contre le masculinisme, petit guide d’autodéfense intellectuelle », « Un mouvement contre les femmes. Identifier et combattre le masculinisme » ou encore « La percée de la mouvance masculiniste en Occident », disponibles sur le site http://lgbti.un-e.org. Lire aussi l’ouvrage de Mélissa Blais et Francis Dupuis-Déri « Le mouvement masculiniste au Québec, l’antiféminisme démasqué », aux éditions Remue-ménage, 2008.
(2) Organisation anglo-saxonne de « droits des pères » particulièrement virulente, dont un des modes d’actions favoris consiste à escalader et occuper des bâtiments publics.

Vu sur Indymedia Nantes, 21 février 2013

[Poitiers] Egalité hommes-femmes oui, mais seulement pour les entrepreneures…

NdPN : Egalité hommes-femmes oui, mais seulement pour les entrepreneures… La parité : « positive » ou pas, c’est toujours de la discrimination ! Rien à attendre de l’Etat ou de la Région, les libertés se conquièrent, elles ne se demandent pas et ne se négocient pas.

La ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem le 25 février à Poitiers

La présidente du Conseil régional Poitou-Charentes va réunir cent femmes entrepreneures de la région à l’occasion de la visite de la ministre des Droits des femmes le lundi 25 février. Ségolène Royal approuve la volonté de Najat Vallaud-Belkacem, «de s’appuyer sur l’expérience de la Région et de venir voir les réalisations intéressantes en matière d’accès à l’égalité et à la parité pour mener les actions innovantes de son ministère.» La ministre sera en déplacement à la Maison de la Région à Poitiers pour une rencontre avec 100 femmes qui ont mené une action exemplaire en Poitou-Charentes, suivie d’un débat sur l’entreprenariat féminin à partir des expériences menées en région et pouvant servir d’exemple nationalement.

Dépêche Nouvelle République, 13 février 2013