Archives de catégorie : Construction du désert

A 831, le grand projet inutile se précise

NdPN : Royal était contre la consultation sur le projet de nouvelle autoroute A 831 qui traverserait le marais poitevin, préférant promouvoir une autre forme de capitalisme « durable » (avec son cortège de voitures électriques tournant au nucléaire et autres projets productivistes badigeonnés de verdâtre ?). Mais des pontes du grand ouest, dont l’inénarrable Auxiette (l’un des plus gros promoteurs du projet de second aéroport nantais), ont obtenu du premier ministre Valls le lancement d’une consultation. La menace d’un nouveau saccage environnemental se précise avec ce nouveau grand projet inutile : à surveiller de très près !

Autoroute A 831 : Manuel Valls prend le contrepied de Ségolène Royal

Manuel Valls autorise la consultation sur la construction de l’autoroute A 831, contre l’avis de sa ministre, qui s’y oppose. Les élus de l’ouest applaudissent le Premier ministre.

Ségolène Royal désavouée ? Dans une lettre rendue publique par les élus favorables au projet d’autoroute A 831, le Premier ministre autorise la consultation que sa ministre de l’Écologie refusait.

Sans préjuger de la construction de l’autoroute devant relier Fontenay-le-Comte (Vendée) à Rochefort (Charente-Maritime), Manuel Valls déclare que « le gouvernement n’a pas d’objection à ce que la procédure de consultation soit connue afin de connaître le coût de cet ouvrage ».

Quid du Marais poitevin

Le chef du gouvernement fait toutefois part de ses réserves, en raison de « l’insertion environnementale délicate » du projet. L’A 831 doit en effet contourner le Marais poitevin, Grand site de France, labellisé parc naturel régional. « Des modifications substantielles » au projet initial ont été apportées, note Manuel Valls, qui demande qu’elles soient « portées à la connaissance du public ».

Il demande aussi d’ « inscrire davantage le projet dans une démarche de développement durable ».

Enfin, le coût de certains aménagements : « Il conviendra de chiffrer parallèlement la solution alternative » de contournement du Marais poitevin.

En annonçant, le 24 juillet, qu’elle opposait son veto au projet d’autoroute, Ségolène Royal a provoqué la colère de nombreux élus locaux, de droite et de gauche. L’ex-présidente de région dénonce notamment le coût de l’équipement (900 millions d’euros) et son caractère non-prioritaire. Sans parler des enjeu environnementaux : « On ne va pas faire Notre-Dame-des-Landes dans le Marais poitevin » a notamment déclaré la ministre.

Les élus favorables au projet se félicitent de la décision du Premier ministre :

Dans un communiqué commun, Dominique Bussereau, président UMP du conseil général de Charente-Maritime, le sénateur UMP Bruno Retailleau mais également Jacques Auxiette, président socialiste de la région Pays-de-la-Loire, parlent d’une « excellente nouvelle. »

« Cette consultation des entreprises est une étape décisive, qui va nous permettre enfin de connaître le coût réel de cette autoroute, si essentielle pour le développement économique de nos territoires et la sécurité de nos automobilistes. »

 Lanouvellerepublique.fr, 1er août 2014

Relaxe du patron du domaine de Dienné

NdPN : le gouvernement précarise les migrants pour maintenir les prolos de toutes origines dans la situation d’une main-d’œuvre corvéable, soumise et sous-payée. Inversement, quand il s’agit de condamner les patrons qui en font leur beurre…

Domaine de Dienné : le patron relaxé

14 salariés roumains avaient été contrôlés sur un des chantiers du Domaine de Dienné. Le dirigeant et un intermédiaire sont relaxés.

Le patron du site touristique « Le Domaine de Dienné », tout comme Mihail Savoaia, un intermédiaire roumain, sont passés sous les fourches caudines de la présidente du tribunal et du procureur, hier lors d’une audience fleuve. Une affaire qui devait être examinée le 6 mars dernier avant d’être renvoyée en raison de sa complexité. Les faits remontent à la période du 1er janvier 2008 au 11 avril 2011, à la suite d’un contrôle sur le chantier de construction de cabanes en bois montées par des travailleurs roumains.

Faire «  l’interface  » entre les deux entités

Le contrôle va se transformer en enquête diligentée par la gendarmerie de La Villedieu-du-Clain sur ordre du parquet en lien avec les inspecteurs du travail (lire notre édition du 1er mars sur le statut du travailleur détaché).
Selon les faits, il s’avère que Jean-Michel Brunet, à la tête du Domaine de Dienné, commandite un architecte pour penser des chalets en bois et une salle construite en troncs d’arbre. Un appel d’offres est lancé et le choix se porte sur une entreprise roumaine spécialisée dans le travail du bois. Pour faciliter les démarches auprès de cette société SRL Terra Proiect, la société Forbise est créée par Mihail Savoaia et son épouse « afin de faire l’interface » entre les deux entités ; le chantier à Dienné et la société Terra Proiec en Roumanie.
Les deux hommes devaient répondre devant les juges de plusieurs poursuites : prêt de main-d’œuvre illicite, exécution d’un travail dissimulé, emploi d’étrangers sans autorisation de travail salarié, et pour Mihail Savoaia d’avoir bénéficié d’aides à retour à l’emploi et à la formation à la hauteur de 45.976,10 € versés par Pôle emploi.
Tout au long du procès, la question était de savoir quel rôle avait joué chacun des deux hommes. Pour Jean-Michel Brunet, la société roumaine existe bel et bien, il dit même avoir rencontré, en compagnie des époux Savoaia, son directeur en Roumanie et visité les locaux. Par ailleurs, il stipule n’avoir jamais été l’employeur direct des Roumains. Quant à Mihail Savoaia, il répète à la barre avoir agi au nom de la société Terre Proiec via sa société Forbise (société de droits roumains déclarée en Roumanie) par laquelle transitait le paiement des factures entre le Domaine de Dienné et Terra Proiec. Selon Mihail Savoaia, il recevait une commission pour chaque chantier (de 3 % à 18 % exceptionnellement) – le montant total des prestations s’élève à 1,650 M€ –, mais n’était pas le gérant en France de Terra Proiec et ne consacrait qu’une poignée d’heures sur le terrain.
Même si ce dernier précise avoir acheté les caravanes des travailleurs roumains mais aussi posséder une carte bancaire de la société afin de faire des retraits en liquide pour le compte du chef de chantier (ce dernier rémunérait les salariés pour leur quote-part française) sans pour autant toucher de salaire pour effectuer ces tâches.

Un dossier vide

Le procureur ne croit pas la version des deux hommes. Pour étayer ses propos, il distribue aux juges et avocats la photocopie d’une carte de l’Europe présentant les disparités du montant du Smic et des charges sociales (1.430 € en France contre 157 € en Roumanie pour le Smic). Il estime par ailleurs que la responsabilité des salariés reposait bien sur les deux hommes, la société roumaine ne servant qu’à mettre du personnel à disposition comme une société d’intérim.
Les avocats des deux prévenus se sont attachés à démontrer que le parquet essayait de combler « les vides du dossier par un renvoi de charge » sur leurs clients par manque de preuves. « Le parquet s’est obstiné à rechercher une infraction à partir d’une rumeur. »
Le tribunal a relaxé les deux prévenus de tous les chefs de prévention.

Marie-Laure Aveline, Nouvelle République, 4 juillet 2014

[Marigny-Brizais – 86] LGV : la galère d’un habitant

LGV : le riverain a fait ses comptes

Marigny-Brizay. En raison du chantier, la route qui passe devant chez Vincent Houllier a été coupée 15 mois. Il s’étonne qu’aucune indemnité ne soit prévue.

Cosea, le constructeur de la future ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique, a eu beau se mettre en quatre pour limiter les nuisances pour les riverains, il n’a pu empêcher quelques mécontents de se manifester. Parmi eux figure Vincent Houllier.

Cet habitant de Marigny-Brizay est le propriétaire d’une belle maison ancienne située à 400 mètres du chantier. Pendant 15 mois, la départementale 82, qui passe devant chez lui et rejoint le bourg de Marigny a été coupée à la circulation. Elle vient tout juste d’être rouverte.

Des indemnités pour les agriculteurs pas pour les particuliers

Les griefs de Vincent Houllier sont multiples. Il déplore tout d’abord le manque de concertation avant l’ouverture du chantier : « Si on nous avait prévenus, nous aurions pris nos dispositions. Peut-être que nos enfants seraient allés à l’école à Beaumont. » Vient ensuite l’absence totale de solutions : « Je ne comprends pas que sur trois départementales coupées à Marigny-Brizay, deux seulement aient eu droit à un aménagement pour que la circulation puisse se faire. Ni pourquoi ce sont les deux premières qui ont été rouvertes, avant la D 82 qui, elle, était complètement coupée. »
Enfin, le riverain déplore qu’aucune indemnité n’ait été envisagée pour compenser le désagrément de cette situation. Vincent Houllier a fait ses comptes : « Si j’avais normalement suivi les déviations mises en place par le conseil général, en utilisant d’autres départementales, j’ai calculé que j’aurais parcouru en 15 mois un peu moins de 12.000 km supplémentaires. Soit, rien qu’en frais d’essence, 927 €. Je ne parle pas des autres coûts, ni du temps perdu. » Vincent Houllier s’étonne que les agriculteurs qui doivent se dérouter pour gagner leurs champs soient indemnisés et que les particuliers ne le soient pas.
En fait, Vincent Houllier reconnaît que, comme la plupart des habitants du secteur et même comme le bus de transport scolaire, il a utilisé la très étroite et très abîmée route communale qui longe l’autoroute, ce qui a considérablement réduit les distances à parcourir. Mais là, c’est à sa mairie qu’il en veut : « Une pétition a été remise au maire mais la commune a considéré qu’elle n’avait pas à payer pour les conséquences des travaux de la LGV. »

Vincent Buche, Nouvelle République, 23 juin 2014

De quoi la fusion régionale est-elle le nom ?

Le gouvernement l’avait prévu, les aménageurs de territoires et de vies le souhaitaient : la France va donc réduire son nombre de régions administratives, de 22 à 14. Volonté de métropolisation des espaces, avec des centres (des « pôles ») politiques et économiques subordonnant tous les territoires à la logique du contrôle social, de la technocratie, de la marchandise, de la mise en concurrence.

Au vu des prises de position changeantes d’élus et de ministres, des annonces contradictoires et des démentis divers, le moins qu’on puisse dire est que cette question des fusions de régions, dans le cadre de la réforme territoriale, a été agitée par des enjeux économiques et politicards importants. Certains élus voire ministres se sont plaints d’être ignorés quand d’autres paraissaient plus entendus, et mieux au courant.

Dernière péripétie en date autour des Pays de la Loire, disputés par des barons locaux et annoncés comme fusionnés avec le Poitou-Charentes ou avec la Bretagne, pour finalement se retrouver en statu quo. Il n’y aura finalement pas de « réunification » de la Bretagne : le projet délirant de métropole Nantes-Saint-Nazaire (comprenant celui d’un nouvel aéroport à NDDL) est passé par là, avec son VRP Auxiette en tête.

Mais s’il y a bien un point commun entre tous ces bureaucrates et leurs petits calculs mégalomaniaques, c’est qu’il est hors de question de consulter les millions de personnes habitant les territoires concernés. Et puis quoi encore ? Voici leur conception de la « démocratie participative », magnifiquement présentée par Jean-François Macaire, nouveau président de la région Poitou-Charentes (extrait d’un article de la Nouvelle République du 3 juin 2014) :

Hier après-midi, avant l’annonce sur les réseaux sociaux d’un possible mariage avec les Pays de la Loire, Ségolène Royal tendait la main à son voisin qui, semble-t-il, avait prioritairement préféré le rattachement à la Bretagne. Sauf que les Bretons n’en voulaient pas. « Tout est parti de là », croit savoir Jean-François Macaire, président du conseil régional de Poitou-Charentes. Un président, sur la même ligne que Ségolène Royal, qui refuse très clairement « un référendum local ». « Ce n’est pas la décision adaptée à la situation : quand les élus posent la question, ils doivent être en mesure d’avoir la réponse. En matière de démocratie participative, on décide sur le champ de compétence sur lequel on est décideur. » Pour le successeur de Ségolène Royal, « le gouvernement et le parlement auront le dernier mot. »

Et le même président Macaire de conclure d’un superbe : c’est « la géographie qui commande ». La géographie ne sert-elle pas, d’abord, « à faire la guerre », selon le mot provocateur de Yves Lacoste ? Le géographe avait déjà compris l’enjeu stratégique de cette science, éminemment militaire mais aussi économique, avec le poids des multinationales dans la polarisation des espaces.

"Vous habitez là"
« Vous habitez là »

La région Poitou-Charentes fusionnerait donc administrativement avec les régions Centre et Limousin, selon le souhait du président de la République François Hollande. L’enjeu économique et stratégique ? Le député-maire Claeys, grand partenaire de l’entreprise Vinci à Poitiers et en région, nous donne quelques clés fort instructives dans cet autre article de la Nouvelle République : où l’on voit ressortir le projet de nouvelle ligne à grande vitesse entre Poitiers-Limoges, le tout assorti de considérations essentiellement économicistes. Fi des espaces trop grand, le PIB avant tout !

« l’État stratège doit ici montrer le chemin » […] « Ma préférence va pour une fusion d’une région Centre – Limousin – Poitou-Charentes » […]. La cohérence ferroviaire renforcée par le projet LGV Poitiers-Limoges associé à la LGV SEA en service 2017, pourrait, selon l’élu socialiste, « permettre de créer un tripôle Tours-Poitiers-Limoges » distant d’une trentaine de minutes entre chacune de ces villes, reliant ensuite Paris et Bordeaux en moins d’une heure.
Le nouvel ensemble, situé sur l’axe Amsterdam-Paris-Madrid, serait au cœur des flux entre l’Europe du Nord et du Sud. Ces 5 autoroutes (A10, A11, A 28, A 71, A 85) et ces 10 aéroports et son seul port en eaux profondes de la façade atlantique (La Rochelle) sont des arguments incontournables pour cette option. De surcroît cette trajectoire assiérait, selon l’élu, une coopération, déjà en marche, dans les domaines universitaires et médicaux.
Ce n’est pas la taille des Régions qui compte pour Alain Claeys mais leurs poids économiques. Le PIB (Produit intérieur brut) pour ce nouvel espace dans l’option 1 est estimé à environ 130 milliards d’euros. Pour la fusion Aquitaine Poitou-Charentes, l’ordre de grandeur se situe à 135 milliards d’euros.

Derrière cette réforme de métropolisation des territoires et de dépossession démocratique, se dessinent donc toujours plus de grands chantiers absurdes, toujours plus de logique de marchandisation et de circulation des capitaux, les populations n’étant traitées que comme des données comptables secondaires, dont ces encravatés semblent éperdument se foutre. Enième illustration, s’il en fallait encore, du mépris unanime avec lequel les gouvernants nous considèrent.

Face à ces logiques autoritaires et centralisatrices, pour le plus grand profit des capitalistes et de leurs fidèles serviteurs administratifs et technocrates, une seule réponse : l’autonomie et la libre coordination des luttes.

En deux mots, le fédéralisme libertaire !

Juanito, 3 juin 2014