[Rouillé – 86] Nouvelle action de blocage du TER

NdPN : on en a déjà parlé plusieurs fois sur ce blog : face à des horaires du TER qui délaissent les populations rurales (évidemment rien à voir avec la tentative d’imposer le projet d’une ligne TGV entre Poitiers et Limoges), les habitants luttent pour bloquer le TER et le forcer à s’arrêter.

86 –  Nouvelle action des usagers du TER en gare de Rouillé ce matin

Le Collectif des usagers rullicois du TER et les élus locaux renouvellent ce matin leur action pour bloquer le train La Rochelle-Poitiers vers 8 h. Loin d’être lassés par ce rendez-vous matinal du lundi depuis quatre semaines maintenant, ils ont décidé mercredi dernier de structurer leur mouvement en créant une association.

Nouvelle République, 7 janvier 2013

[Mexique] L’EZLN annonce les prochaines étapes (El Kilombo)

Communiqué du Comité révolutionnaire autochtone clandestin – Commandement général de l’Armée de Libération National Zapatiste, Mexique.

l’EZLN annonce les prochaines étapes (El Kilombo)

Sous-commandant Marcos

Au peuple du Mexique,
Aux peuples et gouvernements du monde,
Frères et soeurs,
Camarades,

Le 21 décembre 2012, dans les premières heures du matin, nous nous sommes mobilisés à plusieurs dizaines de milliers d’indigènes zapatistes et nous avons pris, pacifiquement et silencieusement, cinq municipalités du sud-est de l’État mexicain du Chiapas.

En traversant les villes de Palenque, Altamirano, Las Margaritas, Ocosingo et San Cristobal de las Casas nous vous avons regardé et nous nous sommes regardés en silence.

Nous n’apportons pas un message de résignation.

Nous n’apportons pas la guerre, la mort et la destruction.

Notre message est un message de lutte et de résistance.

Après le coup d’état médiatique qui vient de propulser l’ignorance au pouvoir fédéral, une ignorance mal dissimulée et encore plus mal maquillée, nous nous sommes montrés pour leur faire savoir que s’ils ne sont jamais partis, nous non plus.

Il y a 6 ans, une partie de la classe politique et intellectuelle a cherché quelqu’un qu’elle pouvait rendre responsable de sa défaite. À cette époque, dans les villes et les collectivités, nous luttions pour la justice dans un Atenco* qui, alors, n’était pas encore à la mode.

A cette époque, ils nous ont calomniés, puis ont tenté de nous réduire au silence.

Malhonnêtes et incapables de voir qu’ils sont eux-mêmes le levain de leur propre ruine, ils ont essayé de nous faire disparaître à coups de mensonges et de silence complice.

Six ans plus tard, deux choses sont claires :

– Ils n’ont pas besoin de nous pour échouer.

– Nous n’avons pas besoin d’eux pour survivre.

Nous, qui ne sommes jamais partis, contrairement à ce que tous les medias ont essayé de faire croire, nous nous manifestons à nouveau, comme les autochtones zapatistes que nous sommes et que nous continuerons d’être.

Ces dernières années, nous nous sommes renforcés et nous avons considérablement amélioré nos conditions de vie. Notre niveau de vie est plus élevé que celui des communautés autochtones environnantes inféodées au pouvoir officiel, qui reçoivent des aumônes qu’elles gaspillent en alcool et autres sottises.

Notre habitat s’améliore sans détruire l’environnement avec des routes étrangères à sa nature.

Dans nos villages, la terre qui autrefois servait à engraisser le bétail des ranchs et des propriétaires terriens, sert maintenant à faire pousser du maïs, des haricots et des légumes qui agrémentent nos repas.

Notre travail nous donne la double satisfaction d’avoir de quoi vivre honorablement et de contribuer à la croissance collective de nos communautés.

Nos enfants vont à une école qui leur enseigne leur propre histoire, celle de leur pays et du monde, ainsi que la science et les techniques nécessaires, pour grandir sans trahir leurs origines.

Les femmes zapatistes indigènes ne sont pas à vendre comme des marchandises.

Les Indiens du PRI [parti traditionnellement dominant au Mexique] fréquentent nos hôpitaux, nos cliniques et nos laboratoires parce que, dans ceux du gouvernement, il n’y a ni médicaments ni matériel médical ni médecins ni personnel qualifié.

Notre culture s’épanouit, non pas isolément, mais en s’enrichissant du contact avec les cultures d’autres peuples du Mexique et du monde.

Nous gouvernons et nous nous gouvernons nous-mêmes en privilégiant toujours la conciliation sur la confrontation.

Et tout cela nous l’avons fait tout seuls car, non seulement le gouvernement, les politiciens et les médias qui les accompagnent ne nous ont pas aidés, mais ils nous ont combattus et nous avons dû résister à toutes sortes d’attaques.

Nous avons démontré, une fois de plus, que nous sommes qui nous sommes.

Notre présence a été longtemps silencieuse. Aujourd’hui, nous ouvrons la bouche pour dire que :

Premièrement – Nous réaffirmons et renforçons notre appartenance au Congrès National Indigène, espace de rencontre des peuples autochtones de notre pays.

Deuxièmement -. Nous allons reprendre contact avec les compagnons qui ont adhéré à la Sixième Déclaration de la Jungle de Lacandón, au Mexique et dans le monde.

Troisièmement -. Nous tenterons de construire les ponts nécessaires aux mouvements sociaux qui ont surgi et continueront de surgir, non pas pour les diriger ou les supplanter, mais pour apprendre d’eux, de leur histoire, de leurs chemins et de leurs destins.

Pour cela nous avons constitué des équipes formées d’individus et de groupes de différentes régions du Mexique pour soutenir les Commissions de la 6e Déclaration et les Commissions Internationales de l’EZLN ; ces équipes de soutien deviendront des courroies de transmission entre les bases de soutien zapatistes et des individus, groupes et collectifs qui adhérent à la Sixième Déclaration au Mexique et dans le monde entier, et qui continuent de vouloir et d’oeuvrer à la construction d’une alternative de gauche non institutionnelle.

Quatrièmement -. Nous maintiendrons la même distance critique que par le passé vis à vis de la classe politique mexicaine dans son ensemble, qui prospère aux dépens des besoins et des espoirs des gens humbles et simples.

Cinquièmement – En ce qui concerne les mauvais gouvernements fédéraux, étatiques et municipaux, exécutifs, législatifs et judiciaires, et les médias qui les accompagnent, nous déclarons ce qui suit :

Les mauvais gouvernements de tout le spectre politique, sans aucune exception, ont fait tout leur possible pour nous détruire, nous acheter, nous soumettre. PRI, PAN, PRD, PVEM, PT, CC et le futur parti RN, nous ont attaqués militairement, politiquement, socialement et idéologiquement. Les grands médias de communication ont essayé de nous faire disparaître, d’abord en nous calomniant de façon servile et opportuniste, puis en faisant preuve d’un silence complice. Ceux que ces médias servaient et qui les faisaient vivre, ne sont plus et ceux qui leur ont succédé à présent ne dureront pas plus que leurs prédécesseurs.

Comme nous l’avons prouvé le 21 décembre 2012, ils ont tous échoué. Il revient donc aux instances fédérales exécutives, législatives et judiciaires de décider si elles vont continuer dans la voie de la contre-insurrection qui n’a donné aucun résultat à part les mensonges maladroits et débiles des médias ou bien si elles vont reconnaître et respecter leurs engagements en accordant aux Indigènes les droits constitutionnels et culturels inscrits dans les « Accords de San Andrés » signés par le gouvernement fédéral en 1996 alors dirigé par le parti qui détient à nouveau le pouvoir exécutif aujourd’hui.

Il reste au gouvernement de l’État à décider s’il y a lieu de poursuivre la stratégie malhonnête et méprisable de son prédécesseur si corrompu et menteur qu’il a pris l’argent du peuple du Chiapas pour s’enrichir, lui et ses complices, et acheter sans vergogne la voix et la plume des médias, plongeant ainsi le peuple du Chiapas dans la misère pendant que les forces de la police et des paramilitaires essayaient d’empêcher les communautés zapatistes d’améliorer leur organisation sociale ; ou bien, si, au contraire, avec justice et sincérité, l’Etat acceptera de respecter enfin notre existence et de se rendre à l’idée qu’une nouvelle forme de vie sociale est en train de fleurir dans le territoire zapatiste du Chiapas, au Mexique. C’est une floraison qui attire d’ailleurs l’attention des honnêtes gens partout sur la planète.

Il appartiendra aux autorités locales de décider si elles vont continuer longtemps encore à avaler les mensonges que les organisations anti-zapatistes ou prétendument « zapatistes » leur racontent pour qu’elles attaquent nos communautés, ou si ces autorités vont enfin utiliser l’argent qu’elles ont pour améliorer la vie de tous leurs administrés.

C’est au peuple du Mexique qui s’implique dans les luttes électorales et la résistance, qu’il appartiendra de décider s’il nous voit toujours comme des ennemis ou des rivaux sur qui décharger sa frustration engendrée par des fraudes et une violence qui, finalement, nous affectent tous, et si dans sa lutte pour le pouvoir il va continuer à s’allier avec ceux qui nous persécutent ; ou bien s’il reconnaît enfin en nous une autre façon de faire de la politique.

Sixièmement – Dans les prochains jours, l’EZLN, à travers les Commissions de la 6e Déclaration et les Commissions Internationales annoncera une série d’initiatives, civiles et pacifiques, pour continuer à marcher avec les autres peuples natifs du Mexique et du continent et avec ceux qui au Mexique et dans le monde résistent et luttent à partir de la base et à gauche.

Frères et soeurs,
Camarades,

Avant, nous avions la chance de bénéficier d’une attention honnête et noble de la part de divers médias. Nous avions exprimé notre reconnaissance alors. Mais leur attitude a changé notablement par la suite.

Ceux qui pensaient que nous n’existions que grâce aux médias et que le siège de mensonges et de silence qu’ils avaient élevé autour de nous aurait raison de nous, se sont trompés. Nous avons continué d’exister sans caméras, ni micros, ni stylos, ni oreilles, ni regards.

Nous avons continué d’exister quand ils nous ont calomniés.

Nous avons continué d’exister quand ils ont essayer de nous museler.

Et nous voici, nous existons toujours.

Notre chemin, comme nous venons de le démontrer, est indépendant de l’impact médiatique, il repose sur le fait d’intégrer le monde et tout ce qu’il contient, sur la sagesse indigène qui guide nos pas, sur la conviction inébranlable que notre dignité est en bas et à gauche.

À partir de maintenant, nous allons choisir nos interlocuteurs, et, sauf exception, nous ne pourrons être compris que par ceux qui ont marché avec nous et qui continuent de marcher avec nous, sans céder à la pression médiatique ni à la mode du temps.

Ici, non sans beaucoup d’erreurs et de difficultés, nous avons mis en place une autre manière de faire de la politique. Très rares sont ceux qui auront le
privilège de l’expérimenter et d’apprendre directement d’elle.

Il y a 19 ans, nous les avons surpris en prenant leurs villes dans le feu et le sang. Aujourd’hui, nous avons recommencé mais sans armes, sans mort, sans destruction.

De la sorte, nous nous différencions de ceux qui, quand ils détiennent le pouvoir, sèment la mort chez ceux qu’ils gouvernent.

Nous sommes les mêmes qu’il y a 500 ans, 44 ans, 30 ans, 20 ans, les même qu’il y a quelques jours.

Nous sommes les Zapatistes, les plus petits, ceux qui vivent, luttent et meurent dans le coin le plus reculé du pays, ceux qui ne renoncent pas, ceux qui ne se vendent pas, ceux qui ne se soumettent pas.

Frères et sœurs,
Camarades,

Nous sommes les Zapatistes, et nous vous embrassons.

Démocratie !

Liberté !

Justice !

Depuis les montagnes du sud-est mexicain.

Pour le Comité clandestin révolutionnaire indigène – Le Commandement général de l’Armée zapatiste de libération nationale,

Sous-commandant Marcos.

Mexique. Décembre 2012 – Janvier 2013

Vu sur legrandsoir, 2 janvier 2013

Histoires de binouze

NdPN : attention buveurs et buveuses, votre budget binouze va grimper ! L’occasion de rappeler l’histoire du contrôle politique de la bière par l’Etat : au moyen-âge, chaque communauté paysanne brasse sa bière, dont les secrets sont transmis parmi les femmes. Bien souvent, aucune trace de houblon : les herbes brassées sont sauvages… et souvent stimulantes, aphrodisiaques, voire quelque peu hallucinogènes ! L’occasion de perpétuer les liens sociaux, à travers des traditions riches de fête et de vivre-ensemble. Ce sont les moines qui développèrent l’usage intensif du houblon, une plante sédative qui, consommée à haute dose, abrutit et endort les réflexes. Face aux révoltes paysannes d’une part, et dans le souci d’autre part d’assurer un monopole aux abbayes qui brassent le houblon, ainsi que de frapper d’impôt une activité jusque là autonome, les Etats (la Bourgogne, la Bavière, puis de nombreux autres) promulguent des décrets sur la pureté de la bière, imposant le houblon comme ingrédient essentiel de ce breuvage populaire. Il sera désormais plus facile d’abrutir les gens au lieu de les voir boire des potions magiques. Et aussi de prélever de nouvelles taxes, sur des monocultures de houblon imposées et surveillées par les pouvoirs religieux et seigneuriaux. Les enjeux sont donc importants. Les femmes perpétuant la tradition de la bière de gruit dans leurs petits chaudrons sont les premières victimes de la répression : traquées, diabolisées et persécutées… par les bras armé de l’Eglise inquisitoriale et de l’Etat. L’image de la « sorcière » brassant un truc bizarre dans sa marmite, ça ne vous rappelle rien ? Visiblement, la longue histoire de taxation retombant sur producteurs et consommateurs continue de nos jours… une proposition pour cette nouvelle année de racket ? Soyons plus sobres en alcool (pas le choix !), mais ivres de révolte !

 

Taxe sur la bière : le demi sous pression

Avec le relèvement au 1 er  janvier de la taxe d’accise payée par les brasseurs,  le prix du demi va faire un bond de 5 à 40 centimes dans les mois à venir.

Avec un bénéfice attendu de 480 millions d’euros, la loi de financement 2013 de la Sécurité sociale a vu l’augmentation au 1er janvier de la taxe sur la bière. La mesure porte sur un relèvement des droits d’accise, payés par les brasseurs en fonction du volume de bière produit et de leur degré d’alcoolémie. Jusque-là compris entre 1.38 et 2.75 € aux 100 litres, ils feraient un bond de 160 %.

«  C’est encore le consommateur qui va payer  »

« C’est encore une taxe injuste et qui prouve que nos dirigeants n’ont aucune réalité du terrain, commente Pascal Pouilly, gérant de la brasserie de Bellefois à Neuville-de-Poitou. Une fois de plus, les petites entreprises qui se battent, réalisent des investissements et tentent de favoriser l’emploi ne sont pas respectées. Et au final, c’est encore le consommateur qui va payer. Nous avons déjà imputé cette hausse sur les factures de nos livraisons depuis le début de l’année et avons augmenté le demi au bar de 10 centimes et la bouteille de 15 centimes. » Même son de cloche dans les bars et cafés poitevins. « Actuellement, nous vendons le demi 2.60 € mais avec l’augmentation des charges et de cette taxe d’accise, je pense qu’il passera autour des 3 € à l’occasion du changement de notre carte en mars prochain », confie Pierre Mulot, gérant du Café de la Paix. Pour Wilfer, serveur au bistrot Le Gil, il est encore trop tôt pour connaître le montant de la hausse du prix de la bière : « Ce sera fonction de nos fournisseurs, mais il est certain qu’il y aura une augmentation dans les mois à venir ». « 2012 a été une très mauvaise année alors cette hausse n’est pas la bienvenue. Malgré tout, j’espère pouvoir en limiter les effets, mais le demi que je propose actuellement à 2.30 € va très prochainement prendre quelques centimes », assure François Kampmann, gérant du Café des Arts. Quant à Franck Borgeais, responsable de La Serrurerie, il s’insurge : « Trop c’est trop. En plus des charges qui ne cessent d’augmenter et des heures supplémentaires qui ne sont plus défiscalisées, la hausse de cette taxe, et donc du prix de la bière va encore nous pénaliser, en entraînant une baisse de la consommation. Et au final, c’est encore le client qui va payer au risque de moins fréquenter nos établissements. »

Delphine Léger, Nouvelle République, 6 janvier 2013

[Loudun] Argent public à gogo pour un Center Parcs à bobos

NdPN : nous avons plusieurs fois évoqué la gabegie du projet Center Parcs près de Loudun, du groupe capitalo Pierre et Vacances, généreusement subventionné par le conseil général. Encore un massacre en règle du paysage doublé d’un beau détournement d’argent public, pour un projet débile de parc d’attraction sensé distraire les classes dites moyennes qui pourront pioncer dans des simili-cabanes (pardon des « cottages »)… pour rêver à une « nature » qui disparaît justement au quotidien sous les tractopelles du Capital et de l’Etat. La Nouvelle République, qui dans ses voeux de bonne année ne manque de rappeler la « solidarité » indéfectible qu’elle porte à ce projet -ainsi qu’au chantier monstrueux de la LGV, au nom de l’emploi– nous livre quelques chiffres consternants. Ainsi qu’un véritable dossier de pub

Center Parcs : l’année des premiers travaux

Le projet de village vacances dans le Loudunais va entrer dans une phase  concrète sur le terrain. Premiers coups de pioche attendus en février.

Trois ans après l’annonce officielle du projet d’implantation d’un village de vacances Center Parcs (*) dans le Loudunais (sur le territoire des communes des Trois-Moutiers et de Morton), les premiers signes tangibles sont attendus sur le terrain en février prochain. Les différents permis de construire ont été signés en septembre dernier et n’ont pas fait l’objet de recours contentieux, selon le conseil général de la Vienne. Les premiers travaux de défrichement vont donc pouvoir démarrer dès janvier, puis ceux de l’archéologie préventive en février.

La société d’économie mixte sera constituée en janvier

De même que devraient commencer en avril ceux de la future voie d’accès au village vacances qui portera le nom du Domaine du Bois des Daims. Une route d’à peine 2,3 km de long qui va coûter la bagatelle de trois millions d’euros au Département, qui a inscrit cette dépense dans son budget 2013, voté il y a deux semaines. Le début de la construction des bâtiments, en revanche, n’est pas attendu avant le second semestre 2013. Le chantier devrait durer un an et demi, puisque le village doit ouvrir au premier semestre 2015. Les promoteurs du projet annoncent un potentiel de 600 à 1.000 emplois sur le site pendant la durée du chantier. Avant ça, un acte administratif important doit intervenir dans les jours qui viennent : la création officielle de la Société d’économie mixte locale (SEML) du Bois de la Mothe Chandenier qui va prendre à sa charge le financement des équipements collectifs (135M€, dont 68M d’emprunt). Le conseil général de la Vienne en est l’actionnaire majoritaire (19M€), au côté de partenaires publics et privés. Dans la foulée de la constitution de cette société, un bail de 20 ans sera signé avec l’exploitant, le groupe Pierre & Vacances.

(*) Le village comprendra 800 cottages en bois pour une capacité totale d’hébergement de 4.500 personnes et 26.000 m2 d’équipements couverts collectifs (piscine, ferme, spa, restaurants, commerces, équipements sportifs, etc.).

>>> Voir notre dossier spécial Center Parcs dans la Vienne

Philippe Bonnet, Nouvelle République, 6 janvier 2013

De Notre-Dame-des-Landes à la LGV Lyon-Turin : l’Europe des grands projets nuisibles

De Notre-Dame-des-Landes à la LGV Lyon-Turin : l’Europe des grands projets nuisibles

béton partout

De l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes à la ligne TGV Lyon-Turin, les grands projets d’infrastructure sont sous le feu des critiques. Des voix s’élèvent pour mettre en cause des projets disproportionnés, et dénoncer leur caractère économiquement et socialement inutile voire écologiquement nuisible [1].

Ces grands projets ne datent pas d’hier : dès les années 90, sous l’impulsion des lobbies patronaux et de la Commission européenne, le développement des infrastructures européennes de transport est mis à l’agenda. L’idée est la suivante : les lacunes de l’infrastructure de transport est une barrière à la libre circulation des produits au sein du Marché unique et, par conséquent, entravait la croissance économique de l’Europe, la « compétitivité », et l’« attractivité des territoires ».

A l’opinion publique, on explique à grands renforts de principes généreux qu’il s’agit d’affermir les liens entre les pays européens voire à moderniser et développer les pays de l’Est… Pourtant, les projets d’infrastructure ont surtout bénéficié aux grandes firmes, qui ont empoché la mise en laissant aux populations le soin de payer l’ardoise écologique et sociale.

(La grande majorité des informations et citations contenues dans cet article est issue du chapitre VIII de Europe Inc, honteusement plagié par nos soins)

***

A partir du début des années 90, de nombreux projets d’infrastructures, gigantesques et abondamment subventionnés, sont mis à l’agenda en Europe dans le cadre du TransEuropean Network (TEN) ou réseau transeuropéen. De nombreux ont déjà été réalisés, comme le tunnel sous la Manche, le pont d’Øresund entre le Danemark et la Suède, plusieurs lignes de trains à grande vitesse, de nombreux élargissements d’aéroports et 12 000 kilomètres de nouvelles autoroutes.

Avec un budget total estimé à 400 milliards d’euros pour près de 150 projets, le réseau transeuropéen (TEN) est le plus important programme d’infrastructures de transport de l’histoire mondiale [2]. Il comprend des milliers de kilomètres de nouvelles autoroutes, des réseaux de trains à grande vitesse, des lignes de fret ferroviaires, des extensions d’aéroports et des voies navigables.

Ce réseau voit le jour grâce à une intensive campagne de lobbying menée tout au long des années 80 et 90 par la Table Ronde des Industriels, un puissant lobby industriel européen [3]. Les grandes firmes européennes ont en effet plusieurs raisons de souhaiter le développement de l’infrastructure des transports :

- Pour les constructeurs automobiles comme DaimlerChrysler, Fiat et Renault, les producteurs de composants électroniques et autres pièces détachées comme Pirelli ou Pilkington, l’expansion du domaine autoroutier en Europe est le synonyme de l’expansion… du domaine du profit.

- Les extensions d’aéroports ouvrent quant à elles de nouvelles perspectives pour les compagnies aériennes ainsi que les constructeurs aéronautiques ; ou encore la construction de lignes à grande vitesse qui ouvrent de nouveaux marchés pour les constructeurs de trains à grande vitesse tels que Siemens, ABB et Alstom.

- Qu’il s’agisse de transports aériens ou routiers, les compagnies pétrolières telles que BP, Petrofina, Shell et Total, ont-elles aussi intérêt à favoriser le développement de grandes infrastructures de transport.

- Enfin, pour les compagnies de travaux publics comme Titan Cement, Bouygues ou Vinci, les projets géants d’infrastructures, amplement subventionné, représentent une source importante et sûre de profits… et garantie par des partenariats public-privé.

Mais les projets d’infrastructures ont aussi un impact sur l’ensemble de l’économie européenne, en développant des grands axes, jugés « stratégiques » pour l’économie, de transports des marchandises et des personnes. Ils ont permis de développer le transport routier de marchandise et d’en réduire considérablement le coût, ainsi que la restructuration par les firmes multinationales de leur production à l’échelle du continent.

Une infrastructure plus rapide telle que le TEN – notamment pour les autoroutes – est aussi une condition favorable aux nouveaux systèmes flexibles de « production à moindre frais ». Encouragés par les multinationales dès les années 1980, ces programmes participent à la production à « flux tendu » effectuée par des sous-traitants spécialisés et soumis directement aux demandes du marché.

- Le lobbying de la Table Ronde

Cette conjonction d’intérêts explique la vigueur avec laquelle la Table ronde des industriels – qui représente les intérêts des plus grandes multinationales européennes – s’est battue pour voir le TEN au cœur de l’agenda des institutions européennes.

La table ronde a publié deux rapports : « Missing Links » en 1984, et « Missing Networks » en 1991, dont elle fera activement la promotion auprès des institutions européennes. Avec succès : la Commission s’en inspirera activement et le principe du TEN sera repris dans le Traité de Maastricht en 1991 [4], et un organisme de consultation mi-public, mi-privé sera fondé en 1993 pour veiller à son avancement : le Centre européen pour l’étude des infrastructures [ECIS].

Les recommandations de l’ECIS, qui prend le relai de la Table ronde pour promouvoir les grands projets d’infrastructure, seront écoutées attentivement par les dirigeants européens. Le financement de projets public-privé d’infrastructures de transport devient une des pistes prioritaires pour stimuler la « compétitivité » et la croissance européennes.

Le commissaire européen aux transports Neil Kinnock expliquait en 1998 : « Mon objectif […] est de mettre en place les réseaux de transport transeuropéens et leurs extensions en Europe centrale et orientale aussi rapidement que possible afin que nous disposions d’un système de transport européen qui serve efficacement et avec cohérence le Marché unique européen. [5] »

- Le chantage à l’emploi…

Si le TEN est promu activement par les grandes multinationales des transports et l’ensemble du secteur privé, les gouvernements européens ne sont pas en reste : pour eux, les projets de grandes infrastructures sont synonymes de créations d’emploi. Une sorte de compromis keynesiano-libéral où le public, au nom de l’emploi, finance massivement les projets du privé… et garantit ses profits.

En 1998, les gouvernements italien, allemand et français ont ainsi tous soutenu l’idée d’une augmentation des dépenses publiques en faveur du TEN. En novembre, le ministre des Finances allemand, Oskar Lafontaine, et le Premier ministre italien, Massimo D’Alema, souhaitaient l’assouplissement des critères budgétaires de l’Union monétaire, recommandant d’en exempter les dépenses en investissements destinés au transport et aux travaux publics [6]. Cette proposition fut toutefois immédiatement rejetée par la Banque centrale européenne, le Commissaire aux Finances Yves-Thibault de Silguy et plusieurs autres monétaristes.

Le Parlement européen a également demandé à plusieurs reprises aux gouvernements des États membres d’augmenter leurs dotations financières dans le secteur des infrastructures de transport. En octobre 1998, les parlementaires demandèrent aux gouvernements de consacrer 1,5 % au moins, de leurs ressources budgétaires totales au TEN. À nouveau, l’argument utilisé était «

l’effet multiplicateur d’un tel investissement sur l’économie et l’emploi [7]. »

Les réseaux de transport ont toujours tenu une place de choix dans les initiatives européennes en faveur de l’emploi, parmi lesquels le Livre blanc de Delors en 1993 et le «

Pacte de confiance pour l’emploi » de Santer en 1996. Outre les emplois immédiats engendrés par les milliards d’écus consacrés à la construction, la stimulation indirecte du commerce international est supposée créer des tonnes d’emplois. Dans son rapport annuel de 1996, la Commission publiait des estimations concernant les effets du TEN : de 130 à 230 000 emplois seraient générés par les 14 projets prioritaires, et 594 000 à 1 030 000 pour le programme dans sa totalité. Ces chiffres étant dans une large mesure basés sur les calculs de l’ECIS, il est permis de douter sérieusement de leur objectivité. (Europe Inc., chap VIII)

- Grandes infrastructures = emploi ?

Cette équation selon laquelle plus de grandes infrastructures serait synonyme de plus emploi a pourtant été critiquée dès les débuts du TEN.

Publié en 1996 par la Fédération européenne du transport et de l’environnement [T&E], le rapport « Routes et économie » évite le débat officiel pour conclure qu’ « il n’existe aucune preuve ni aucune recherche disponible qui permette de conforter la supposition selon laquelle la construction de routes serait génératrice d’emplois à long terme [8]. »

Cette position trouva un soutien, en 1998, dans le rapport largement diffusé de l’organisation gouvernementale britannique SACTRA (Standing Advisory Commitee on Trunk Road Assessment), qui critique clairement les chiffres de la Commission européenne, soulignant qu’on ne pouvait être convaincu par les affirmations selon lesquelles le TEN créerait de nombreux emplois. Le doute portait en particulier sur le fait que ces projets puissent être un moteur de développement économique pour les régions périphériques : «

Si en certaines circonstances les programmes de transports peuvent générer des bénéfices économiques supplémentaires dans une région ayant besoin d’être régénérée, en d’autres circonstances, l’effet inverse peut se produire [9]. »

Ces critiques n’ont cependant pas convaincu la Commission européenne, qui, dans un rapport publié fin 1998 sur la mise en place du TEN, proclamait comme par le passé que les réseaux d’infrastructure créaient des emplois et qu’ils étaient « vitaux pour la compétitivité européenne [10]. »

(Europe Inc., chap VIII)

- Le coût social de la compétitivité

Est-il vrai qu’un fonctionnement plus fluide du Marché unique européen créera de nouveaux emplois ? Le transport des marchandises d’une extrémité à l’autre du continent crée-t-il des emplois ? En fait, le lien supposé entre l’intensification des transports et la création de nouveaux emplois est des moins certains.

Ainsi, le nombre de kilomètres parcourus par les poids lourds à travers l’Europe a augmenté de 30 % entre 1991 et 1996 ; sur la même période, le chômage augmentait dans les mêmes proportions. Les projets d’infrastructures de transports rapides sur de longues distances – les autoroutes et les réseaux de trains à grande vitesse en particulier – favorisent généralement une plus grande centralisation de la production. Le TEN procure donc surtout aux grandes firmes un accès facilité aux marchés européens, renforçant leur emprise sur l’économie de l’Union.

Les nouvelles infrastructures permettent en effet à la fois de faciliter les restructurations et délocalisations et bénéficie à un nombre restreint de secteurs industriels, et aux grands groupes intégrés, plus compétitifs, qui concurrencent les petits producteurs locaux « moins efficaces » à travers toute l’Europe. Cette pression exercée par les grands groupes est donc doublement destructrice d’emplois.

(Europe Inc., chap VIII)

C’est toute la perversité de la rhétorique de la « compétitivité » : les gouvernements font tout ce qui est en leur pouvoir pour favoriser les conditions d’exploitation des grandes entreprises au nom de l’emploi. En poursuivant cette logique, les gouvernements contribuent surtout à gonfler les profits des grands industriels… et à accroître la pression sur les marchés et en définitive, sur l’emploi. En d’autres termes, la compétitivité, sur le moyen-terme, c’est plus de chômage !

Des alternatives existent pourtant, pour un développement économique qui ne soit pas exclusivement consacré à soigner les industriels au détriment des salariés :

Le budget considérable du TEN – 400 milliards dans sa première phase – aurait pu être investi en partie dans le transport public local, le logement en milieu urbain et rural ou pour favoriser le travail dans les secteurs de la santé et de l’éducation, de nombreux emplois auraient sans conteste pu être créés. Quant à l’environnement, il aurait été épargné et les économies locales renforcées. Malheureusement, cette solution à la fois logique et rationnelle n’a pas été envisagée par les institutions européennes : à la place, il a servi en grande partie à construire des autoroutes, à faire gonfler le trafic des poids lourds et à fournir des infrastructures au service des grands groupes industriels européens. (Europe Inc., chap VIII)

- Le coût écologique du TEN

Le TEN n’a pas seulement un impact social. Pour les ONG écologistes, la réalisation du TEN pourrait entraîner de graves conséquences sur l’environnement dont, notamment, la destruction de plus de 60 sites naturels de première importance en Europe. On pense notamment à la destruction du bocage nantais, source importante de biodiversité, à Notre-Dame-des-Landes. Autre exemple de ces destructions, celui des Alpes.

Par le biais d’un référendum national « sur la protection des Alpes contre le transit », les Suisses ont décidé en 1994 que tout fret traversant leur pays devrait le faire par voie ferroviaire à partir de 2004. Dans cet objectif, le gouvernement suisse a projeté de taxer lourdement les poids lourds. À l’automne 1998, un second référendum confirma cette mesure.

S’opposant vigoureusement à ces restrictions sur le transit du fret, l’UE soumit le gouvernement suisse à une forte pression pour le faire revenir sur ces mesures, le menaçant par exemple de bloquer six accords commerciaux en cours de négociation. Le ministre des Transports hollandais, Annemarie Jorritsma, menaça même de suspendre les droits d’atterrissage de Swiss Air si la fédération helvétique campait sur sa position.

En décembre 1998, la Suisse finit par plier : le nombre de poids lourds européens autorisés à traverser le pays sera de 250 000 en 2000 et 450 000 en 2003, un accès illimité fut accordé aux camions plus légers à partir de 2001 et le tarif maximum prévu de 350 écus par voyage fut réduit à 200 écus. Les organisations écologistes suisses se sont néanmoins vigoureusement opposées à ce marché et l’accord final pourrait encore fort bien être refusé par la population suisse au cours d’un nouveau référendum.

Une étude de la Commission européenne note que le transport de fret à travers les Alpes a augmenté de 75 % entre 1992 et 2010. Le ressentiment et la colère publics grandissent également dans les pays alpins membres de l’Union situés, écologiquement menacés par le nombre croissant de poids lourds traversant de vallées étroites et la construction d’une nouvelle infrastructure de transport pour s’adapter à l’accroissement prévu de la circulation.

(Europe Inc., chap VIII)

Mais la destruction d’espaces naturels protégés est loin d’être la seule conséquence écologique néfaste de l’explosion des grands projets d’infrastructures.

Au fur et à mesure que se mettait en place le réseau transeuropéen dans tous les pays de l’Union, le trafic a augmenté de manière considérable – et particulièrement la circulation routière – bien au-delà des limites écologiquement raisonnables. Entre 1985 et 1995, la quantité de gaz carbonique générée par le transport routier a augmenté d’un tiers. Greenpeace estime de 15 à 18 % l’augmentation des émanations de gaz carbonique relatives au secteur des transports [11]. (Europe Inc., chap VIII)

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Les grands projets d’infrastructure mis en œuvre dans le cadre du TEN posent de nombreuses questions : la « compétitivité », dont ils seraient les moteurs, est-elle vraiment synonyme d’emploi, de lendemains qui chantent et de modernité ? Faut-il poursuivre envers et contre tout la bétonisation des espaces naturels, et continuer à faire gonfler les chiffres du fret malgré le réchauffement climatique ?

Comment, après la crise de 2008, des projets qui prévoient le financement public de projets économiquement, socialement et écologiquement contestés au bénéfice de grands groupes industriels peuvent-ils encore, en période d’économies budgétaires, se retrouver à l’agenda des gouvernements ? Que penser de la manière dont ils ont été décidés, en dehors du débat public, entre technocrates, gouvernants et grands industriels ?

Et surtout, que penser du modèle de développement dont ils s’inspirent, où les territoires doivent être aménagés en fonction des besoins du secteur privé, quelles qu’en soient les conséquences sociales ou écologiques ?

Car c’est bien d’un modèle de développement qu’il s’agit, pensé par et pour les grands groupes industriels contre les intérêts de la majorité… et dont la crise n’a semble-t-il pas permis la remise en cause. Un modèle duquel, pourtant, il devient urgent de sortir ; de même qu’il est urgent d’en finir avec des projets qui ne font qu’accentuer la crise sociale et écologique au bénéfice de quelques-uns.

Coupé, collé et rédigé par les Dessous de Bruxelles

[1] Consulter, par exemple, le site de l’ACIPA (http://acipa.free.fr/) concernant l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et le site du collectif No-TAV Savoie (http://www.no-tav-savoie.org/)

[2] Commission européenne, « 1998 Report on the Implementation of the Guidelines and Priorities for the Future », Bruxelles, 1998

[4] Un projet de 12 000 nouveaux kilomètres d’autoroutes, intégré au programme général, fut présenté en 1991 par la Commission. Plus tard dans l’année, la décision de réaliser trains à grande vitesse, canaux et aéroports fut incorporé au Traité de Maastricht

[5] Propos de Kinnock, commissaire au Transport, lors de la conférence « Combler les fossés du financement de l’infrastructure », à Amsterdam, le 31 mars 1998.

[6] Tim Jones, « Commission Urges Euro Area to Boost Investment », European Voice, 26 novembre 1998.

[7] Les PME ont également demandé à la Commission « de proposer de nouvelles formes de financement à long terme et de possibilités d’obtenir plus facilement des capitaux spéculatifs » cité dans Rory Watson, « MEPs Warn of Funding Shortfall Threat to TENs », European Voice, vol. 4, n° 40, 5 novembre 1998.

[8] T&E, « Roads and the Economy », Bruxelles, 1996.

[9] « Transport Investment, Transport Intensity and Economic Growth », rapport intérimaire du Standing Advisory Commitee on Trunk Road Assesment, publié le 9 février 1998 par le département britannique de l’Environnement, des Transports et des Régions.

[10] Commission européenne, « 1998. Report on the Implementation of the Guidelines and Priorities for the Future », Bruxelles, 1998, p. 5.

[11] Greenpeace Suisse, Missing Greenlinks, « Examination of the Commission’s Guidelines for a Decision about the Trans-European Networks and Proposal for Ecological Restructuring », 1995.

Les Dessous de Bruxelles, décembre 2012