[Expulsion à visage humain] Mayotte : un 2e centre de rétention va être construit d’ici fin 2014

Un deuxième centre de rétention administrative (CRA) va être construit « d’ici fin 2014 » à Mayotte, qui fait face à un afflux de migrants clandestins sans commune mesure avec la métropole, a-t-on appris vendredi de source gouvernementale.

Ce 101e département français, dans l’océan Indien et voisin de seulement 70 km de l’île d’Anjouan (Comores), a expulsé l’an passé 26.405 personnes dont 5.389 enfants, selon les chiffres officiels, et ne dispose que d’un CRA de 60 places, constamment surpeuplé.

« Le CRA actuel présente des conditions indignes, donc un projet de construction d’un nouveau CRA est en cours, la livraison est prévue fin 2014 », a déclaré à l’AFP cette source, précisant que « le dossier suit son cours » et que « le choix de l’architecte a déjà été fait ».

A Mayotte, où ne s’applique pas le droit commun du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), « la durée moyenne de rétention est de 20 heures », a-t-on précisé de même source.

Ainsi, la circulaire du ministère de l’Intérieur rendue publique le 7 juillet recommandant d’assigner les familles de sans-papiers avec enfants à résidence plutôt que de les placer en rétention ne s’applique pas à Mayotte.

« Pour ce qui est, dans l’immédiat, des conditions d’accueil, le préfet de Mayotte a reçu du gouvernement des instructions pour mettre en place un dispositif spécifique pour les familles d’ici à septembre », a ajouté la même source, parlant de « locaux provisoires et adaptés ».

« Il est difficile d’assigner à résidence des gens qui n’en ont pas de décentes, et l’alternative de l’assignation à résidence en hôtel n’est pas réaliste à Mayotte vu l’offre hôtelière », a-t-on expliqué.

De fait, la plupart des Comoriens en situation irrégulière habitent dans des bidonvilles, dédales de cahutes de tôles, souvent sans eau ni électricité.

Le ministre des Outre-mer Victorin Lurel, attendu à Mayotte à partir de dimanche soir et jusqu’à lundi, devrait préciser la mise en oeuvre de ces instructions.

Presse coloniale (AFP), 13 juillet 2012

[Anti-THT] Retour sur le week-end de résistance à la ligne THT, par quelques un-es du groupe « médical »

Nous publions ci-dessous un texte écrit par plusieurs militants ayant participé au week-end de résistance du Chefresne contre la THT.

Du 22 au 24 juin dernier a eu lieu un week-end de résistance à la construction de la ligne THT (Très Haute Tension) Cotentin-Maine. Ce week-end s’inscrit dans la continuité de réflexions, d’informations et d’actions collectives menées depuis plusieurs mois. Les deux premiers jours étaient consacrés à des échanges entre locaux et militants-es antinucléaires venus-es d’un peu partout ; le dimanche étant une journée d’action dont la finalité était double, à savoir rendre visible cette résistance et saboter l’avancée des travaux sur la ligne THT.

Retournons plus précisément sur cette journée :

Deux cortèges sont partis du camp, l’un marchant vers la mairie du Chefresne, l’autre vers les pylônes. Ces deux cortèges étaient totalement solidaires, en lien permanent, et poursuivant la même volonté politique. Au sein de ces deux cortèges nous étions une vingtaine de personnes, toutes antinucléaires, à s’être constituées comme un groupe « médical » autogéré en capacité d’assumer les premiers secours. Nous tenons à bien préciser que nous n’étions pas là en tant que prestataires de services, mais bien en tant que personnes participant activement a la construction de la lutte collective contre le nucléaire et son monde.

Au sein même de cette équipe médic, nous nous inscrivons dans une perspective politique d’échanges et de transmissions de savoirs et pratiques, rejetant les notions d’experts et de spécification des tâches.

Nous écrivons ce texte afin de faire un constat précis des événements et de dénoncer les violences « policières » assumées et préméditées par la préfecture de la Manche qui ont eu lieu ce dimanche 24 juin. Parce que cette journée n’est ni à oublier ni à banaliser, et qu’elle marque une nouvelle fois l’impunité et la monstruosité militaire, il nous semble important que ces constats et ces dénonciations soient diffusés largement aussi bien au cercle antinucléaire, aux professionnels en contact avec les victimes, qu’à n’importe qui ayant à faire aux forces de l’ordre. Cela, à la fois en solidarité avec nos amis-es et à visée d’auto-médiation.

Les moyens utilisés par la gendarmerie, outre les effectifs évidemment conséquents, étaient tous employés en vue de nuire et de blesser avec une détermination forte, pensée et assumée. Pour le cortège se dirigeant vers les pylônes THT était déployé un arsenal comprenant des grenades explosives dites assourdissantes ou de désencerclement, des grenades lacrymogènes et des matraques. Les tirs, au lance grenades ou à la main, étaient sciemment dirigés vers les personnes, arrivant au niveau du visage le plus souvent. Rappelons que les grenades sont mortelles lorsqu’elles sont lancées à tir tendu (pratique interdite par la loi), ce qui était le cas et qui devient une norme. L’attaque a débuté de façon immédiatement brutale (à environ 200m du camp) avec des blessés-es graves dès la première charge, et n’a pas diminué d’intensité même lors de notre repli vers le camp. Et même lorsque des cordons de sécurité étaient constitués par nous-même autour de nos blessés-es et qu’ils signalaient verbalement aux bleus la situation, les charges et les tirs ont continués exactement avec la même violence. L’autre cortège a essuyé des tirs de grenades lacrymogènes, sans sommation, au bout d’à peine quelques centaines de mètres de marche, ce qui a entrainé son repli immédiat.

En ce qui concerne les blessés-es :

une personne a été blessée à l’œil de manière très grave, elle a été transférée d’un hôpital périphérique au CHU de Caen le jour même, sa vision est largement amputée par une hémorragie du vitré et le pronostic est réservé quant à la récupération de son acuité visuelle.

une personne a subit un traumatisme crânien grave avec atteinte de l’œil suite à un tir tendu de grenade, il a été opéré le soir même. Il souffre d’une triple fracture du massif facial et la rétine de son œil a été touchée par la violence du choc. Sa vision est également altérée de manière irréversible à 1/20ème.

Ces deux personnes ont nécessité une évacuation en urgence. Or, la préfecture a volontairement saboté l’arrivée des véhicules médicalisés sur le camp. Les consignes étaient données de bloquer le premier véhicule médicalisé à quelques dizaines de mètres du camp. Une journaliste présente sur les lieux a constaté ce blocage par un cordon de gendarmes, ce qui a certainement permis son lever. Le deuxième a carrément été réquisitionné par la gendarmerie. Ces deux victimes ont donc attendu plus d’une heure trente. Peut-on parler d’autre chose que de cynisme et de sadisme ?

une autre personne a eu une plaie importante au niveau du front (coup de matraque), ayant nécessité des points de suture. Les blessés-es restants (environ 20) sont consécutifs aux multiples explosions de grenades assourdissantes et de désencerclement. En explosant, des impacts métalliques se logent dans les chairs en profondeur jusqu’à plusieurs centimètres sous la peau, sectionnant potentiellement nerfs et artères. Ainsi, une blessée a été transférée au CHU et 15 éclats ont été constatés (jambe os, genou, vagin, sein, bras). L’un d’entre eux a carrément sectionné un nerf de l’avant bras. Elle a été opérée (ce qui ne signifie pas qu’on lui ait retiré tous les éclats de son corps) mais garde des séquelles motrices et sensitives des doigts. Les autres gardent leurs éclats dans leur corps, ce qui n’est pas sans poser problème, à court comme à long terme. A noter : le médecin régulateur du SAMU, avec qui nous étions en lien, était harcelé par le chef de cabinet de la préfecture afin de fournir les identités des blessés-es et leur hôpital de destination. Si lui et d’autres soignants-es s’en sont tenu au secret médical, des employés-es de l’hôpital d’Avranches ont sciemment communiqué avec la gendarmerie préférant être indic plutôt que soignant… Chapeau les collabos ! Des policiers étaient également en faction devant certains hôpitaux du coin. Il a aussi été signalé de véritables barrages policiers (en ligne sur la route avec tenue de combat) arrêtant tous les véhicules et contrôlant les identités. Et ils ont même été jusqu’à surveiller l’entrée du CHU de Caen où deux fourgonnettes et « une ligne » de gardes mobiles attendaient sur la voie d’accès. La répression prime clairement sur l’assistance. Enfin, malgré la solidarité entre nous tous, le sentiment d’effroi laisse, pour certains-es d’entre nous, des marques dans nos psychés qui mettront du temps a cicatriser… Marques façonnant, mais n’effaçant rien de notre désir de révolte.

Notre propos n’est pas « de pleurer sur notre sort » car nous savions dans quoi nous nous impliquions. Nous ne sommes pas dupes, la France est un État policier qui montre son vrai visage quand on s’attaque à ses piliers fondateurs, notamment l’industrie nucléaire. Certes cela n’est pas nouveau, mais mérite d’être rappelé sans cesse. L’État ne supporte pas sa contestation, et avoir du sang sur les mains ne lui fait pas peur. Et ce texte a pour but d’informer, encore et toujours, que la violence étatique n’est pas que symbolique, mais s’incarne aussi dans le corps de nos compagnes et compagnons touchées-s.

source : site de l’Organisation Communiste Libertaire, 17 juillet 2012

[Routine du désastre] La France compte plus d’1,3 million de mètres cubes de déchets nucléaires

Un employé de l’Andra sur le chantier de forage d’un site expérimental de stockage de déchets nucléaires, à 500 mètres de profondeur près de Bure, le 11 juin 2012. (Photo Vincent Kessler. Reuters)

Ce volume pourrait doubler d’ici 2030, selon l’agence publique chargée de les gérer.

Plus de 1,3 million de mètres cubes de déchets nucléaires en tous genres étaient recensés en France fin 2010, un volume appelé à doubler d’ici 2030, selon l’inventaire publié mercredi par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).

Ces déchets radioactifs proviennent principalement des centrales nucléaires (59%) mais aussi de laboratoires de recherche (26%), des activités militaires (11%), de l’industrie non nucléaire (3%) et du secteur médical (1%), selon le dernier inventaire de l’Andra.

De 1,32 million de mètres cubes fin 2010, ce volume devrait atteindre 2,7 millions de mètres cubes en 2030, selon les nouvelles prévisions.

«En France, la production de déchets radioactifs représente l’équivalent de 2 kg par an et par habitant», souligne l’Andra dans son rapport.

Disponible sur le site de l’Andra, cet inventaire est «un outil de gestion» et un moyen «d’anticiper les besoins de stockage» pour l’avenir mais aussi une source d’informations précises pour le citoyen, a souligné devant la presse son président, François-Michel Gonnot.

Des déchets d’origine et de nature extrêmement diverses, qui ne présentent pas tous les mêmes risques, insiste l’organisme public, chargé de concevoir des solutions pour les stocker en toute sécurité.

Les plus dangereux sont les déchets dits «de haute activité», issus pour l’essentiel du traitement des combustibles usés dans les réacteurs nucléaires de l’Hexagone.

Fin 2010, ces déchets HA représentaient 2 700 m3, soit seulement 0,2% du total déjà produit. Mais ils contiennent à eux seuls 96% de la radioactivité totale des déchets nucléaires, à raison de plusieurs milliards de becquerels par gramme.

Durée de vie très variable

Ils peuvent être à vie courte ou très longue, comme le neptunium 237 dont la période radioactive (temps nécessaire pour que la radioactivité diminue de moitié) dépasse deux millions d’années.

Leur volume devrait doubler d’ici 2030, 5 300 m3.

Viennent ensuite les déchets de «moyenne activité à vie longue» (MA-VL), dont la période radioactive dépasse 31 ans. Ces déchets (40 000 m3 fin 2010, 3% du total), sont surtout issus des gaines entourant les combustibles nucléaires.

Les déchets HA et MA-VL ont vocation à être enfouis à grande profondeur dans le Centre industriel de stockage géologique (Cigéo) à l’étude par l’Andra, qui devrait ouvrir en 2025 à la limite de la Meuse et de la Haute-Marne. En attendant, ils sont entreposés sur les sites où les colis de déchets sont produits, à La Hague (Manche) et Marcoule (Gard).

La majeure partie des stocks français est constituée de déchets de faible et moyenne activité à vie courte (63% du volume total pour 0,02% de la radioactivité). Ils sont liés à la vie des installations nucléaires ou produits par les laboratoires de recherche ou médicaux.

Après avoir été stockés dans la Manche, un centre ouvert en 1969 et désormais fermé, ils sont pris en charge dans l’Aube depuis 1992.

Issus du démantèlement des premières centrales au graphite ou de l’ancienne industrie du radium, les déchets de faible activité à vie longue constituent 7% du volume total et environ 0,01% de la radioactivité. Ils sont le plus souvent entreposés sur les sites qui les ont produits, faute de solution définitive.

Ils incluent également des milliers d’objets radioactifs anciens (fontaines au radium, paratonnerre au radium, vieux détecteurs d’incendie, etc.).

Le reste est constitué de ferrailles, béton et gravats produits par l’industrie ou le démantèlement des installations nucléaires, soit 360 000 m3 de déchets dits «à très faible activité» (TFA). Le volume de TFA, stockés en surface dans l’Aube depuis 2003, devrait atteindre 1,3 million de m3 en 2030.

Plus anecdotique, l’Andra a également répertorié en France 43 sites marqués par une pollution nucléaire. Pour la plupart réhabilités ou en voie de l’être, ils correspondent à des locaux où du radium était produit ou stocké au début du XXe siècle.

Presse radioactive (liberation.fr), 11 juillet 2012

« On croyait que ça allait s’arranger avec la préfecture pour les étrangers, mais c’est pire qu’avant ! »

Une fois par mois, les associations de soutien aux sans-papiers de retrouvent devant le palais de justice. Mercredi soir, Yves Judde, de la Cimade 86, et les représentants des autres associations se sont étonnés que rien ne bouge. Au contraire.

« On attendait de voir ce qui allait se passer avec le nouveau gouvernement et la préfecture. De ce côté-là, c’est pire qu’avant, notamment avec la responsable du service des étrangers. » Et de citer plusieurs cas jugés emblématiques que la mauvaise foi ambiante. Notamment celui d’un Camerounais. « On lui a dit qu’il ne figurait pas dans la liste des métiers en tension. Il travaille pourtant dans la restauration, c’est n’importe quoi ! La préfecture lui a répondu que pizzaïolo, ce n’était pas de la restauration ! »

Presse préfectorale (La Nouvelle République), 7 juillet 2012