[Poitiers] Artistes de l’urbanisme, ou l’art du sécuritaire

NdPN : présentation d’une des trois « œuvres d’art » qui agrémenteront le jardin du Puygarreau, ouvrant le 15 février prochain juste derrière la mairie. Il s’agit de la grille qui fermera l’accès au jardin pendant la nuit. A l’image de la mairie mécène du projet, la conceptrice de ladite grille semble s’être donné beaucoup de mal pour gommer la fonction sécuritaire du dispositif, pour conférer à la fonction de « contrainte » une apparence de « qualité »… ainsi qu’elle le dit elle-même. La clôture de l’espace social renvoie en effet à la nature même du capitalisme, celui des espaces « privés » aussi bien que « publics », qui compartimentent l’espace pour contrôler les hommes depuis l’âge des enclosures. Comment conférer à un dispositif liberticide des aspects positifs ? Comment gommer ses fonctions sécuritaires ? Encore une fois, au-delà de la « subversivité » du discours à l’aide de laquelle les artistes stipendiés par les pouvoirs tentent de justifier leurs oeuvres, on constate qu’ils participent in fine à des projets injustifiables, leur fonction ne consistant qu’à légitimer un système barbare par une couche de vernis. Ce n’est pas parce qu’un artiste énonce avec ruse la nature liberticide du dispositif qu’il habille, qu’il n’est pas pour autant responsable de sa mise en œuvre (voir la fameuse main jaune de Châtellerault). Car c’est bien l’une des grandes forces du capitalisme que de digérer et s’approprier toute sa critique : le nihilisme, paradigme du Capital, n’apparaît plus que sous sa propre critique désabusée, à l’image de tous ces comiques de plateaux télé gagnant leur croûte sur le maquillage du néant. Car ce qui apparaît in fine du pouvoir, c’est que malgré toute son horreur manifestée, il serait écrasant, invincible. Histoire de rappeler à la populace déprimée qu’elle est impuissante (voir le Léviathan de Kapoor) ? L’œuvre d’art dans l’espace public, en imposant cyniquement la représentation de l’omniprésence du pouvoir, ne raille pas le pouvoir qui nourrit son artiste, mais les habitants ! Nous reviendrons prochainement sur une autre œuvre qui hantera ce jardin, « l’Obélisque brisé » de Didier Marcel ; artiste ayant déjà produit quelque chose de semblable à Dijon… et dont la production au service d’un urbanisme de gentrification, prenant l’aspect d’un arbre totémisé sur une place de la liberté bien éloignée de 1848, par-delà la dénonciation apparente de l’ordre établi, mérite déjà toute notre critique.

Tout l’art d’ouvrir le jardin de Puygarreau

Le jardin de Puygarreau ouvrira sa grille au public poitevin le 15 février. Commandée à l’artiste Élisabeth Ballet, elle est avant tout une œuvre.

Mon travail porte sur la limite, sur le seuil, sur les différences entre l’intérieur et l’extérieur, mais c’est la première fois que je fais une grille fonctionnelle, se réjouissait hier la plasticienne parisienne Élisabeth Ballet, retenue dans le cadre de la commande publique artistique de Cœur d’agglo pour réaliser l’œuvre associée à la « fermeture » des jardins de Puygarreau. Confiée à la société poitevine Pain, la réalisation de la grille est actuellement en cours et prendra fin avant le 15 février, jour de l’ouverture au public du jardin.

«  Pas trop sécuritaire  »

Présente hier sur le site, Élisabeth Ballet a commenté son œuvre : « On a beaucoup travaillé avec Yves Pétard sur les détails techniques liés à la stabilité. Ce qui m’intéresse, c’est de transformer les contraintes en qualités. » Minimaliste, l’œuvre intitulée Tourne-sol est en acier inoxydable satiné. Elle se distingue de ses voisines les grilles ouvragées de l’hôtel de ville et de l’hôtel Jehan-Beaucé. « Elle est plus légère, plus transparente, pour une grille, elle n’est pas trop sécuritaire », souligne l’artiste. De 38 mètres de longueur, elle a une hauteur qui décroît de 4,40 m à 2 m du côté de l’entrée des jardins : « Elle ne comporte aucune ligne horizontale, on a l’impression qu’elle glisse à l’inverse du terrain. » Et si la grille va permettre de fermer le jardin pendant la nuit, elle n’en reste pas moins une œuvre. « C’est la singularité de ce projet, explique David Perreau, directeur artistique, réussir à créer une intensité dans ce site réunissant trois interventions artistiques. »

à suivre

> Le jardin de Puygarreau. Dernière pierre au projet de Cœur d’agglo, l’aménagement se veut un lieu convivial où se mêlent jeux d’enfants, espace paysager et œuvres d’art (ouverture le 15 février). > En chiffres. Sur une superficie de 1.000 m2, ce jardin en terrasses aux (futures) allures de sous-bois comprendra 12 arbres, 5 arbrisseaux et de nombreux arbustes. Le coût global des travaux est de 1.000.000 € > Trois œuvres artistiques sont installées dans le jardin : « Aire/air/erre/ère » de Pierre Joseph, « L’obélisque brisé » de Didier Marcel et « Tourne-sol » d’Élisabeth Ballet. > Élisabeth Ballet. La créatrice de la grille est née à Cherbourg en 1957, elle vit et travaille à Paris. Artiste de renommée internationale, son travail est visible sur le site elisabethballet.net.

Dominique Bordier, Nouvelle République, 16 janvier 2014

[86] Des nappes phréatiques toujours plus polluées

NdPN : l’agriculture industrielle constitue un véritable cas d’école pour constater l’inanité des discours sur la « croissance verte ». Illustration avec le dernier rapport de l’ARS sur la qualité des eaux destinées à la consommation humaine.

La ressource en eau potable se dégrade en sous-sol

Un rapport de l’agence régionale de santé s’inquiète de la pollution des nappes superficielles par les activités agricoles intensives.

C’est l’enseignement le plus édifiant du dernier rapport sur la qualité des eaux destinées à la consommation humaine publié tous les deux ans par l’Agence régionale santé (ARS) : la ressource en eau se dégrade de manière très sensible dans la région. Particulièrement dans les plaines céréalières de l’ouest de la Vienne où l’activité agricole intensive a entraîné une hausse des pollutions par les pesticides et les nitrates.

Dans ce secteur, du Loudunais au Civraisien, la plupart des nappes superficielles dépassent par exemple le seuil de 50 mg/l qui marque la concentration maximale de nitrates à respecter dans les eaux brutes destinées à la potabilisation. L’ARS juge d’ailleurs cette « contamination préoccupante ».

«  Le syndicat d’eau de Civray a opté pour la création d’une usine de dénitrification  »

« Jusqu’à présent, il n’y avait aucune unité de traitement pour les nitrates dans la Vienne ; il n’y avait que des mélanges entre les eaux des nappes superficielles, dites libres, et plus profondes, que l’on appelle captives, pour parvenir à distribuer une eau qui réponde aux exigences », explique Jean-Claude Parnaudeau, ingénieur sanitaire à la direction de la santé publique de l’ARS. « Le problème devient tel avec un certain type d’agriculture sur un certain type de sol en cas de pluies abondantes que le syndicat d’eau de Civray a opté pour la création d’une usine de dénitrification. » Les quatre programmes d’actions menés dans les zones vulnérables pour protéger les nappes sont parvenus à freiner le phénomène mais pas à inverser la tendance, ajoute le spécialiste. Quant aux pesticides, plusieurs contaminations ont été constatées. Y compris depuis l’étude de l’ARS. Le problème s’est posé en 2013 à Chauvigny où du métolachlore utilisé dans l’agriculture a été retrouvé dans l’eau du robinet nécessitant la mise en place d’une unité mobile de traitement en juillet. Mais aussi à La Trimouille où la présence d’acétochlore, un herbicide utilisé dans la culture du maïs, a été détectée.

Trop de fer et de fluor en profondeur

Dans le cas de Chauvigny, l’UFC Que Choisir vient d’ailleurs de faire savoir qu’une plainte avait été déposée. « La solution du mélange des eaux profondes et superficielles va rapidement montrer ses limites », estime Jean-Claude Parnaudeau. « On a été obligé d’abandonner de très belles nappes libres comme celle de La Grimaudière qui produisait 400 m3/h mais on ne trouve pas de nappes captives partout sur le territoire, leur débit et plus faible et elles se renouvellent plus difficilement. » Autre inconvénient : les eaux issues des nappes profondes présentent souvent de fortes teneurs en fer, en arsenic, en sélénium ou en fluor qui nécessitent « des traitements coûteux », fait remarquer le rapport de l’agence de santé. « On a la chance de disposer globalement d’une eau de bonne qualité dans la Vienne mais la question des périmètres de protection n’est pas réglée pour préserver la ressource », estime l’ingénieur sanitaire. « Il faudra surtout réfléchir à une politique agricole différente»

Baptiste Bize, Nouvelle République, 16 janvier 2014

« Pacte de responsabilité », une scénette de plus dans le petit cirque de la « sociale-démocratie »

Des nouvelles des administrateurs du désastre…

Les médias accompagnent le naufrage de l’insubmersible

Tandis que le maire UMP de Tarascon vient d’être condamné pour avoir favorisé des filiales de Vinci sur le marché public d’une cité judiciaire, que Bechter (lui aussi maire et lui aussi UMP) a été placé en garde à vue pour achats présumés de votes à Corbeil-Essonnes (une tradition locale bien connue depuis Dassault), les administrateurs PS du désastre travaillent à poursuivre la politique de la droite au pouvoir.

Guillaume Poitrinal, ex-PDG d’Unibal (entreprise étudiant les marchés du bricolage, du jardinage et de l’aménagement des habitats), dirigera avec le député Thierry Mandon le fameux « choc de simplification », visant à réduire à une quinzaine le nombre de régions. Autour de 13 métropoles qui verront leur pouvoir très élargi (loi votée en décembre). Pour Mandon, il s’agit d’une « digestion des départements par les métropoles ». Comme c’est joliment dit, ça fait rêver. La réduction budgétaire n’explique pas tout ; il s’agit avant tout d’une inscription toujours plus assumée dans un processus de métropolisation, c’est-à-dire d’assujettissement des espaces à une logique de diktat de l’économie comme politique.

Tandis que l’UMP Bertrand jalouse le discours du président procapitaliste Hollande (« Il lui restait d’une certaine façon le coeur de l’électorat de gauche qu’il n’avait pas encore trahi. C’est fait depuis hier. »), Moscovici, sinistre PS de l’Economie, enfonce le clou en rappelant ce qu’est la gauche, à savoir que la gauche a toujours trahi : « C’est une politique de gauche. La social-démocratie, c’est la gauche, depuis toujours dans l’histoire de la gauche, c’est la gauche qui est dans le réel, c’est la gauche des résultats, c’est la gauche du compromis, de la négociation sociale ».

Ledit président a donc produit un discours plus clairement procapitaliste que jamais, annonçant un nouveau seuil dans l’offensive capitaliste, salué à l’unanimité par les organisations patronales, ainsi que par des journalistes et « experts » aux tronches d’enterrement. Hollande ne promet rien moins que de filer 50 milliards d’argent public aux entreprises et un renforcement de l’austérité, bref une politique assumée de gestion du capitalisme, démontrant une fois de plus la véritable nature de l’Etat. Quant aux alliés de gauche au gouvernement, Cosse, secrétaire d’EELV, ne reproche que le manque de dimension environnementale et réclame des « actes concrets ». Le PCF fait comme d’habitude semblant de s’indigner, tout en faisant alliance un peu partout avec le PS pour les prochaines municipales.

Le navire fuit de partout, et la musique d’ascenseur continue de jouer. Vivement qu’il coule pour de bon.

Pavillon Noir

Valeurs et réalité présente

Valeurs et réalité présente

Les « valeurs » anarchistes, c’est quoi ? Liberté, égalité, solidarité… ah oui ? Qu’on les prenne un à un ou ensemble, ces mots ne veulent rien dire si nous les abstrayons de nos situations réelles.

Un patron pourra se sentir tout à fait partisan de ces notions, s’il se targue de la liberté… d’entreprise et du libre marché, de l’égalité… des chances, et de la solidarité… nationale via les cotisations sociales versées par « lui » à l’Etat – ou de cette solidarité… caritative quand il « donne aux pauvres ». Or la libre entreprise et le libre marché n’existent pas, parce qu’il n’y a de contractualité qu’entre égaux, et que le capital n’est pas réparti également puisque c’est sa raison d’être même que d’être monopolisé. Donc pas d’égalité des chances, d’autant plus que l’inégalité intrinsèque au capitalisme s’applique tout aussi bien à ce fameux « capital culturel » délimité par le cadre étriqué de normes sociales. Et pas de solidarité non plus, puisqu’elle n’est ici que la rustine sur la jambe de bois de la guerre totale au vivant, ne faisant que cautionner, avec une auto-légitimation bien misérable, la concurrence féroce qu’implique le système actuel de domination sociale.

On le voit bien ici, ces termes abstraits ne sont donc que des slogans, qui s’avèrent même de véritables alibis pour l’ordre établi – s’ils ne sont questionnés, affinés, contextualisés.

Mais retournons un peu la critique contre nos réflexes confortables, et voyons un peu le fond de nos « valeurs » : un libertaire qui se déclarerait « libre », « égal » aux autres, et « solidaire », s’abstrait aussi de sa situation réelle. De quoi est-il réellement et présentement « libre », lui qui de fait se trouve enfermé, tout comme quiconque, dans des rapports sociaux de dépendance économique, politique et sociale, que n’éclipseront jamais de simples résolutions théoriques et pratiques ? « Egal »… aux plus pauvres que lui, aux femmes, aux individus racialisés, psychiatrisés, etc., ah oui vraiment ? Et « solidaire » de qui, sinon de qui se rapproche de son idéologie, et encore, en fonction de ses moyens réels ?… de toute évidence limités à des queues de cerise. En quoi peut-il par ailleurs se flatter d’échapper à tout dogme, d’être « libre dans sa tête » ? Vanité de l’éducationnisme.

Nous ne pouvons nous affirmer comme libres, égaux et solidaires qu’autant que nous nions désespérément nos dépendances à des dispositifs oppresseurs, que nous éludons nos positions respectives dans le cadre d’une société hiérarchisée et donc inégalitaire, que nous nous dissimulons nos difficultés à nous organiser de façon à bouleverser réellement l’ordre établi avec les autres opprimés et exploités.

Il n’y a pas d’anarchie ni d’anarchistes, il n’y a que de l’anarchisme, comme dynamique vers moins d’aliénation et de répression, moins d’inégalité et d’exploitation, moins de concurrence et de narcissisme. Certes, encore faudrait-il saisir ce qui nous motive réellement, dans toutes nos participations « actives » à des « dynamiques » anarchistes et à des « mouvements ». A bien y regarder, à bien gratter… pourquoi ce besoin de nous manifester comme anti-autoritaires/anarchistes/libertaires/communistes/etc. ? Pourquoi mettons-nous tant en avant des valeurs, des slogans et des images, des actions, pourquoi mobiliser, afficher, apparaître, dire ? Pourquoi cet impératif convenu et tacite de nous « organiser » ? Nous répondons souvent que c’est ce que nous désirons vraiment, face à l’ordre établi, à la domination, à la société du spectacle, etc.

Vraiment ? Désirons-nous réellement la fin du patriarcat, de l’Etat et du capitalisme, ou désirons-nous nous rattacher à une identité et des valeurs qui nous distingueraient de la routine morne, comme individus originaux, exceptionnels, à part, voire au-dessus ? Par la surabondance de nos expressions et il faut bien l’avouer, de nos gesticulations, désirons-nous  réellement participer à, voire susciter, des mouvements sociaux amenant à un seuil révolutionnaire, ou nous convaincre nous-mêmes qu’un autre monde est possible, à la mesure de notre nullité à questionner et modifier, en profondeur, nos situations présentes ? Désirons-nous réellement nous organiser, ou nous sentir au chaud avec des potes dans un entre-soi autosatisfaisant, avec l’occasion de se faire des plans cul de temps à autre, entre deux séances de biture ou d’écran numérique  ?

A bien y regarder, nous ne « valons » évidemment pas moins ni mieux que les autres. Valeurs ou réalité présente ?

Mes sensations, ici et maintenant, du monde qui m’entoure, mes sentiments, mes peurs et mes désirs, qui m’agitent ici même, tels quels ; les gestes et les paroles des gens que je rencontre ; mes pensées confrontant tout cela avec les expériences passées et les projets de celles à venir… En-dehors de la présence à cette réalité présente, à toutes ces réalités présentes, il n’y a que de l’idéologie, de l’illusionnisme, de la prestidigitation. Du divertissement. L’idéologie ne nous rend pas plus heureux, conscients, vivants. Elle ne fait que dévier l’attention à nous-mêmes, aux autres et au monde, disperser nos consciences, paralyser nos capacités d’analyse et d’action. L’idéologie obère et occulte, ce qui se trouve là, ici, maintenant.

Or ici, maintenant, ce sont toujours le lieu et le temps exactement adéquats pour cesser de nous projeter sur les écrans du spectacle social et intime. Le lieu et le temps d’en finir avec l’absence, la routine et ces habitudes qui nous étouffent. Le lieu et le temps d’observer en nous et autour de nous, en silence, la réalité présente, au lieu de regarder ailleurs avec nos lunettes palliatives. Ici et maintenant, la réalité dans tout ce qu’elle a de misérable, d’automatique, de mortifère, de révoltante. Mais aussi la réalité infiniment multiple, aventureuse, poétique et vivante, quand nous prenons le temps de l’observer en silence, quand nous reconstituons nos forces, pour vivre au lieu de mourir à petit feu.

A nous de jouer. Un peu de silence, s’il-nous-plaît.

J., Pavillon Noir

[Chasseneuil-du-Poitou – 86] LGV : le ministre et l’habitant

NdPN : voir notre article précédent sur la venue du ministre du travail Michel Sapin.

LGV : la visite du ministre dérange le riverain

Benoît Tercier a été réveillé samedi par les engins de chantier de la LGV, qui n’ont pas le droit de travailler le week-end. La faute au ministre ?

Benoît Tercier, administré de Chasseneuil-du-Poitou, le sait depuis longtemps : il va devoir s’habituer à voisiner avec la ligne à grande vitesse. Comment pourrait-il l’ignorer d’ailleurs ? Les premiers piliers du viaduc de l’Auxance sont plantés à moins de 200 mètres de ses fenêtres.

Samedi, pourtant, Benoît Tercier s’est levé plus en colère que d’habitude, réveillé, comme tous les matins, par les engins de chantier. Sauf que samedi, en principe, le chantier doit être arrêté pour respecter la tranquillité des riverains durant le week-end, conformément à un arrêté préfectoral pris en bonne et due forme. Le riverain mécontent a appelé la mairie de Chasseneuil où on lui a dit qu’on allait voir ce qu’on pouvait faire, la préfecture et Cosea (le constructeur de la ligne) où, pour cause de week-end, on ne lui a passé personne, enfin les gendarmes qui se sont engagés à aller jeter un œil sur le chantier et voir ce qui s’y passe. Toujours est-il que Benoît Tercier a dû supporter jusqu’en milieu de journée les bruits des moteurs et des sirènes de recul. Nous n’avons pas eu plus de succès que lui pour savoir pourquoi diable, pour la première fois depuis le début de ce chantier, des engins ont travaillé ce samedi. Une explication nous a cependant été fournie officieusement : il s’agissait de mettre le terrain en état en prévision de la visite, ce matin, sur le chantier du ministre du Travail Michel Sapin (lire page 3). Plus précisément de couler à la va-vite une couche d’enrobé pour éviter que la voiture officielle du ministre ne se salît. On n’ira sans doute pas jusqu’à reprendre à notre compte la remarque aigre-douce de Benoît Tercier : « Il y a de l’argent à dépenser pour ça ! » Mais on s’étonnera quand même que personne n’ait eu la délicatesse de prévenir la mairie de Chasseneuil et les quelques riverains concernés de la petite entorse au règlement et de ses motifs. Ainsi procède normalement tout bon citoyen qui s’apprête à déranger ses voisins à une heure inhabituelle.

V.B., Nouvelle République, 13 janvier 2014