Archives de catégorie : Répression

La répression menace les personnes qui campent à l’année

Une retraitée qui vit depuis 15 ans dans un camping municipal près de Toulouse, pénètre à l'intérieur de son mobil-home, le 19 janvier 2012.

Une retraitée qui vit depuis 15 ans dans un camping municipal près de Toulouse, pénètre à l’intérieur de son mobil-home, le 19 janvier 2012.
 

Audrey Dupuis (*), une retraitée de 74 ans à la situation précaire, vit depuis 13 ans au camping municipal Le Rupé, à Toulouse, mais depuis peu l’angoisse la ronge: elle craint de devoir quitter son mobil-home si est voté une proposition de loi visant à interdire la résidence au camping à l’année.

Droit au logement (DAL) et Habitants de logements éphémères ou mobiles (Halem) tirent la sonnette d’alarme, avançant que de 70 à 120.000 personnes en France (étudiants, chômeurs, travailleurs pauvres) ont comme résidence principale un emplacement de camping.

Le texte présenté par le député UMP de Charente-Maritime Jean-Louis Léonard, adopté mi-novembre à l’Assemblée nationale, obligera à fournir un justificatif de domicile principal pour les séjours au camping de plus de trois mois.

« C’est scandaleux. L’Etat attaque ceux qui n’ont pas d’autres recours que d’habiter dans ce type de logement », s’étrangle Clément David, un porte-parole d’Halem. Le camping « est soit l’ultime recours, dit-il, soit un choix provisoire. Une conséquence de la pression foncière ».

La proposition de loi doit encore passer au Sénat, mais son examen n’a pas encore été programmé.

« Si je peux plus vivre au camping, je sais pas où aller. Je vais me retrouver sous les ponts. Comment je vais faire avec ma retraite de 595 euros ? », s’interroge Audrey Dupuis, une ancienne monitrice d’auto-école, qui était arrivée dans le camping en pensent n’y séjourner que quelques semaines.

« Je veux rester ici. Cette loi, c’est une catastrophe, on a toute notre vie ici », confie cette dame coquette, qui habite un grand mobil-home avec terrasse, jardinet et chambre d’amis, où elle peut accueillir enfants ou petits-enfants.

Tous les jours, elle prend le café avec sa fidèle voisine et amie, Christine Malois (*), 69 ans. Elle-aussi est inquiète. « Ici, je suis heureuse, je ne suis pas à la rue. Si on me met à la porte, on me retrouvera morte huit jours plus tard », redoute cette Marseillaise qui vit avec 700 euros, dont 325 versés chaque mois au camping.

Une trentaine de personnes, essentiellement des retraités, vivent à l’année dans ce camping situé près du Canal du Midi, d’un parc, d’une zone industrielle et d’un camp de roms. C’est un camping modeste avec une atmosphère de village. Les pensionnaires se connaissent, s’entraident et ont pris goût à ce style de vie. « C’est comme une famille », disent en choeur les deux retraitées.

Contacté par l’AFP, le député UMP Jean-Louis Léonard affirme que l’objectif de sa proposition de loi est d’éviter qu’apparaissent des bidonvilles, et diverses dérives, comme les « marchands de sommeil ». « Les campings n’ont pas été conçus pour l’habitat permanent », relève le député, tout en assurant que l’objectif du texte « n’est pas d’empêcher les gens d’habiter au camping ».

Face aux critiques, M. Léonard envisage de reformuler l’amendement incriminé par les associations de défense des mal logés.

« Le camping, note Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL, ce n’est pas la bonne solution, c’est sûr, mais c’est une solution pour beaucoup. (La loi Léonard) est une disposition brutale au niveau social, qui traduit l’état d’esprit de ceux qui nous gouvernent. Ils n’ont pas d’égard pour les plus vulnérables ».

Dans son vieux mobil-home défraîchi, mais bien chauffé, équipé d’un téléviseur dernier cri et d’un ordinateur portable connecté au réseau Wi-Fi du camping, Jacques Susset, pilier du Rupé depuis 12 ans, « ne partirait pour rien au monde ».

« Moi, si vous me mettez dans un studio, dans un HLM, je meurs », dit en sirotant un vieux whisky ce Parisien de 65 ans, commercial à la retraite, un des mieux lotis du Rupé avec plus de 1.000 euros par mois. Lui vit par choix au camping et si la loi Léonard passe, il « trichera ». « Qu’on ne me mette pas au 5e étage d’une cage à lapin. Vivre en appartement, affirme-t-il, c’est la dépression nerveuse assurée ».

(*) Les noms des deux retraitées, attachées à leur anonymat, ont été modifiés à leur demande.

AFP, 23 janvier 2012

[Notre Dame des Landes] Appel à la résistance contre l’expulsion imminente !

Les expulsions sur la ZAD se rapprochent ! Préparons-nous pour une résistance active et déterminée !

Un article de ouest torche paru aujourd’hui (le 22/01) mentionne le fait que le juge des expropriations va passer sur la ZAD ce mardi 24/01 pour signifier aux propriétaires, qui ont résisté aux négociations à l’amiable, leur prochaine expulsion.

Un rassemblement de soutien est prévu à cette occasion à partir de 9h30 à Notre Dame des Landes le 24/01 (voir en bas de l’article). Nous rejoignons cet appel, avec la conviction forte que, par notre nombre et notre rage, nous pourrons stopper ces procédures et le projet d’aéroport de NDDL !

Nous ne pouvons que nous battre avec détermination contre ces prochaines expropriations, qui visent à vider une zone de 2000 hectares de toute sa vie paysanne et rurale et à saper toute la résistance qui pourrait s’y mener et qui s’y mène !

Le bétonnage de ces terres agricoles ne se fera pas si nous savons résister à cette première vague d’expulsions, et signifions aux autorités que leur aménagement du territoire est contraire à notre droit à l’auto-détermination de vivre sur un territoire comme nous l’entendons !

N’oublions pas que l’aéroport de NDDL ne bétonnera pas seulement 2000 hectares, mais qu’il augmentera l’urbanisation du 44 et de tout le grand ouest de la France.

A l’heure où l’équivalent d’un département français disparait sous le béton tous les cinq ans, soit l’équivalent de la Bretagne en 20 ans, et que notre autonomie alimentaire est de plus en plus menacé, cela ne peut que nous renforcer à résister vivement contre le projet d’aéroport de NDDL !

Toute une biodiversité et un bocage unique en France disparaitrait par ce projet ! L’hypocrisie du développement durable qui permet de détruire de nombreux écosystèmes en le cautionnant par des mesurettes grotesques de greenwashing doit cesser !

Préparons-nous à la résistance contre ces expulsions imminentes ! Contre ce projet inutile et dangereux, nous lutterons avec joie et rage !

Le collectif de lutte contre l’aéroport de NDDL

N.B: les propriétaires ne sont pas les seul-e-s à être concerné-e-s. Ainsi les occupant-e-s de la ZAD, venu-e-s s’installer sur la ZAD pour soutenir la résistance, seront pour la plupart concerné-e-s plus rapidement par les expulsions. Nous ne pouvons que les soutenir et appeler à défendre les lieux qu’ils occupent ! Voir leur appel ici :

http://zad.nadir.org/spip.php?article166

L’appel au rassemblement de soutien aux propriétaires expulsables, vu sur l’agenda de l’ACIPA :

Mardi, 24 janvier à partir de 09:30

Solidarité avec les propriétaires qui refusent de vendre à Vinci

Lieu : Notre-Dame-des-Landes – L’Epine (plan)

Description :
L’ACIPA appelle à une présence de solidarité avec les propriétaires qui ont refusé la vente à l’amiable de leurs terrains, à l’occasion du déplacement sur place du juge aux expropriations, le mardi 24 janvier.

Rendez-vous à 9h30 à la sortie du village de l’Epine, route de la Paquelais (D42) en venant de Notre-Dame-des-Landes, à côté des containers de tri sélectif, à gauche de la route.

http://maps.google.fr/maps?q=notre-dame+des+landes&hl=f…15.64

Le lien vers l’article de ouest torche :

http://www.ouest-france.fr/ofdernmin_-Notre-Dame-des-La…A.Htm

Le blog du collectif de lutte contre l’aéroport de NDDL :

http://lutteaeroportnddl.wordpress.com/

Indymedia Nantes, 22 janvier 2012

Solidarité avec les engeôlés de la guerre sociale

Bonne nouvelle : dans « l’affaire » de Labège, l’un des quatre embastillé-e-s est sorti de la taule de Seysses (près de Toulouse) il y a deux jours. La sortie des trois autres est possible… on en sait pas beaucoup plus pour l’instant. Le procès est en mai, la mobilisation doit se développer !

Pour rappel donc (voir agenda local), rassemblement de soutien aux inculpé-e-s de Toulouse, à Poitiers devant le palais d’injustice, le 18 février à 14h. Un concert de soutien est aussi dans les tuyaux pour début mars (précisions à venir), toujours avec l’antirep 86.

Voici aussi un texte rédigé par l’un des inculpé-e-s, que nous retranscrivons ici (paru sur le Jura Libertaire) :

En taule pour des tags et du lisier ?

La répression des mouvements « subversifs » comme moment d’une totalité

Ce texte n’a aucune prétention particulière, si ce n’est proposer un retour sur l’affaire du 15 novembre et une rapide analyse d’un moment de la totalité, d’un moment de la lutte de classe au sein du mode de production capitaliste, dans le contexte historique à la lisière d’une crise de la valeur jamais apparue auparavant. Le titre peut paraître trompeur mais il n’est en aucun cas question, dans ce texte d’indignation face à une quelconque démesure judiciaire mais plutôt d’une réflexion par démonstration autour de l’utilissation de la symbolique et de diverses formes idéologiques dont la bourgeoisie se munit afin d’assurer la reproduction des rapports sociaux capitalistes. La Justice en est un exemple.

Le 5 juillet 2011, un groupe d’individus s’invitait dans les locaux de la PJJ (Protection Judiciaire de la Jeunesse) dans le but, selon le tract, d’orner les murs, très certainement ternes et austères de ce bâtiment administratif, de quelques lettres de noblesse, colorées qui plus est, et d’y ajouter un peu de lisier, pour donner du corps à l’ouvrage.

Cette performance artistique, la PJJ, en tant qu’entité symbolique représentant la Justice des mineurs, l’avait héritée des diverses prises de positions des éducateurs intervenants à l’Établissement Penitentiaire de Lavaur, qui avaient reclamé plus de moyens pour leur sécurité et la revalorisation de leur statut, à la suite d’une mutinerie ayant fait la Une des journaux, remettant encore une fois l’incarcération, et la justice des mineurs, sur le devant de la scène des opinions légères.

Faut-il s’étonner que la branche judiciaire jeunesse — que « tout le monde » s’entend à qualifier d’indulgente, de « sociale » et de juste, contestée et mise à nue par des détenus très certainement lucides quant à la place de chacun dans le système carcéral — adopte une position de repli et revendique sa légitimité (et la nécessité de la renforcer dans le cadre du conflit) au sein de l’incarcération des mineurs, au risque de perdre quelques couches de guenilles idéologiques construites autour des concepts d’État de raison et de Justice humaine ?

La symbolique est amovible. Elle est un mécanisme stratégique destiné à cristalliser des ambiances, des méthodes d’appréhension en corrélation avec l’air du temps. Celle-ci est une force de coercition, tout du moins le manteau qu’arbore cette force, dans le cadre de le reproduction des rapports sociaux capitalistes. Faire tomber le manteau et montrer  les dents c’est simplement une autre façon de faire… Les divers organes étatiques, agents de cette reproduction, en ont l’habitude.

À la suite de l’action du 5 juillet, le procureur de la République de Toulouse promit vengeance face à cette attaque, qualifiée « d’extrêmement grave, bien qu’ayant fait très peu de dégâts ». La symbolique répond à la symbolique et devient elle-même la force motrice de l’engrenage judiciaire. L’enjeu idéoligique supplante les faits, ou plutôt devient le fait.

Le 15 novembre 2011, de  bon matin, à l’heure où les équipes de jour relaient les équipes nocturnes, une centaine de gendarmes, dont les unités de choc de PSI (Peloton Surveillance Intervention), investit trois maisons, cagoulés, armés, casqués, berger-allemandés, sous les directives de la Section Recherches Midi-Pyrénées de la gendarmerie nationale.

S’en suit l’arrestation d’une dizaine de personnes, dans un coup de fliet qui a déjà un petit goût de bancal dans la bouche des gros costauds, qui, j’en suis sûr, s’attendaient à un peu plus d’action en pénétrant dans le repère de « l’ultra-gauche » toulousaine. Une perquisition destinée à la mise en lumière d’éléments à charge, comme des bouquins, des affiches ou encore des produits d’entretien…

Une quantité considérable de documents est donc saisie, accompagnée d’ordinateurs, de téléphones, disques durs, envoyés à la Tech’, ces fameux Experts, à l’accent toulousain. Ça casse un peu le mythe…

La garde à vue porte essentiellement sur les liens que les personnes étiquettées « ultra-gauche », entretiennent entre elles, le fond de nos pensées, nos « méthodes d’action » et j’aurai droit à la scène « Nous ne sommes plus en interrogatoire, je veux qu’on puisse débattre librement », jouée tout de même six fois par six OPJ différents. Un certain décalage entre l’exposition des faits et la prise ADN de force m’interpelle alors.

Déférés au parquet, cinq d’entre nous sont mis en examen dont quatre placés en détention provisoire.

La question ne se pose pas dans les termes judiciaires du coupable et de l’innocent. Nous sommes retenus ici sur la base de nos positionnements politiques et des dossiers RG, bien garnis — que l’on ferme certainement à l’aide de sangles de bâche pour 33 tonnes dans les locaux spécifiquement affectés à cette tâche — que ces positionnements ont générés. Il n’y a rien de prétentieux dans cette affirmation, seulement le strict détail des diverses constructions judiciaires autour de ces mouvements insaisissables que sont « l’anarcho-autonome », « l’ultra-gauche » ou tout autre délire tape-à-l’œil si cher à la DCRI.

Dans l’argumentation en faveur de notre maintien en détention, notre appartenance supposée à « la mouvance ultra-gauche […], mouvance politique déniant les autorités judiciaires ou de police » semble se satisfaire à elle-même, épaulée par l’existence toujours virtuelle de complices de « l’opération commando ». Il faut prendre cette appellation aussi sérieusement que lorsqu’une grève est surnommée de « prise d’otage »…

Cette appartenance représentant « un fort risque de réitération » selon les autorités judiciaires, devons-nous comprendre une détention provisoire à perpétuité ou jusqu’à un éventuel repentir? Nous ne sommes pas la parodie minimale de la fin des années de plomb, l’étape de sa farce historique bien évidemment ; mais l’épisode justifiant sans complexe notre incarcération par notre appartenance à cette mouvance, aussi mystérieuse que terrifiante, obligeait un léger clin d’oeil. Et le tout reste une farce dont nous rions bien jaune.

Mais l’affaire du 15 novembre est à inscrire dans un contexte général.

La répression des mouvements « subversifs », construite de manière exogène par les forces de police, trouve sa légitimité sur le terrain de la symbolique des Grandes Idées, mais son intensité dépend du même cadre qu’avec n’importe quel autre type de répression sociale : le cadre des tensions sociales au sein du mode de production capitaliste. Il suffit de jeter un œil aux peines d’emprisonnement particulièrement lourdes qui tombent à la pelle autour des cambriolages, des trafics, et des braquages pour réaliser ce que veut dire actuellement le terme de guerre sociale. Comme certains disent ici, « ça charcle sévère au TGI  de Toulouse ». Mais il faut comprendre pourquoi « ça charcle ».

La justice est un organe de la reproduction sociale, et la prison comme moment de sanction-gestion d’une partie de la population qui était déjà, au préalable, excédentaire, en est une particularité, sa dimension la plus hostile.

La crise que nous vivons actuellement est une crise particulièrement grave du mode de production capitaliste et comme toute crise, une crise spécifique au mode d’accumulation. Elle met en jeu l’ensemble du rapport social capitaliste sur la base du rapport salarial qu’entretiennent le Prolétariat et le Capital. Rapport salarial qui émane de la restructuration (financiarisation/mondialisation) des années 70/80 et qui est entré en crise, logiquement.

Avec la crise du régime fordiste d’accumulation et la restructuration qui suivit, c’est toutes les séparations, les garanties sociales, les protections diverses et variées, que l’État-Providence (comme agent de la reproduction de la force de travail) conférait à la classe ouvrière, qui ont été désignées comme entrave à la valorisation du Capital (à sa reproduction donc) et traitées comme telle. C’est la fin de l’accumulation capitaliste sur des aires nationales où la reproduction du prolétariat était liée à la productivité. Le prolétariat était confirmé comme pôle nécessaire du capital et la lutte de classe se structurait autour de cette confirmation dans ce qu’on appelait « le mouvement ouvrier », où l’enjeu révolutionnaire était l’affirmation du prolétariat en tant que libération du travail, de la force productive.

Avec la restructuration, c’est toute cette confirmation qui est balayée, la fin de l’identité ouvrière, la fin de cette stabilité sur laquelle les mouvements sociaux s’appuyaient pour revendiquer, l’existence sociale du prolétariat et sa nécessité étant incontestables. Dans ce capitalisme restructuré, la reproduction de la force de travail par le biais du nouveau rapport salarial a connu une double déconnexion, d’abord au niveau de la valorisation du Capital, ensuite au niveau de la consommation ouvrière (où la centralité du salaire n’est plus de mise).

Avec ce qu’on appelle la mondialisation, il n’y a plus de rapport entre la reproduction de la force de travail (segmentée en zones à modalités différentes) et la valorisation du Capital (qui elle est unifiée mondialement).

Nous pouvons repérer trois zones à modalités de reproduction différentes. Une première, que nous pouvons appeler hyper-centre capitaliste, se caractérise par des salaires conséquents où les vestiges du fordisme se représentent par la privatisation des garanties sociales, mais où la pression du « nouveau compromis » (la concurrence mondiale de la force de travail) affecte de plus en plus de fractions de la force de travail de cette zone.

Ce « nouveau compromis », c’est une donnée structurelle qui veut que « le prix de référence des marchandises, y compris la force de travail, [soit] le minimum mondial ».

Une zone secondaire, où nous retrouvons les activités de logistique, de diffusion commerciale et de sous-traitance. Les salaires sont bas et tendent encore à baisser par la pression interne de la force de travail disponible inemployée. Il n’y a pas ou peu de garanties sociales, le rapport salarial trouve sa définition dans la précarité structurelle.

La troisième zone, véritable poubelle sociale, joue le role de réceptacle pour un prolétariat excédentaire, qui n’est pas nécessaire à la valorisation du Capital et où les moyens de survie se bricolent entre aide sociale, économie informelle, débrouille.

Une population familièrement avisée de que ce qu’est la répression et la prison.

Ce zonage se dessine à plusieurs échelles, « du monde au quartier ».

Il y a donc bien rupture du lien qui reliait, territorialement, auparavant, la valorisation du Capital (sa reproduction) et la reproduction de la force de travail, du prolétariat. La seconde déconnexion se situe entre la valeur de la reproduction de la force de travail et la consommation effective du prolétariat.

Quand le salaire n’est plus cette instance régulatrice de la reproduction de la force de travail, en gros que la vie est de plus en plus chère, il faut trouver une solution. Cette solution a été le crédit, mis en avant par la financiarisation de l’économie. Avec la baisse des salaires, le prolétariat s’est vu contraint d’assurer sa reproduction immédiatement par le biais de crédits, donc à l’endettement. Il y a déconnexion entre salaire et consommation ouvrière. La crise de 2008, des subprimes, dans laquelle nous sommes aujourd’hui, a été déclenchée suite à un nombre considérable d’impayés chez les ménages pauvres. Cette crise financière est une crise de la reproduction du capital et l’expression de la limite de ce mode d’accumulation. Ce qui faisait la dynamique de la valorisation, « la baisse des salaires », devient, poussée à terme, le blocage de la reproduction du Capital (parce que blocage de la reproduction d’un de ses pôles, le prolétariat). La Capital cherche toujours à accroître sa plus-value, son profit, et c’est en réduisant les coûts de la force de travail qu’il y parvient. Plus de surtravail (travail « gratuit ») et moins de travail nécessaire (rémunération de la force de travail). Voilà l’illustration du Capital comme contradiction en procès et l’exploitation comme enjeu-cible de la lutte des classes. Seulement, avec les modifications structurelles précisées plus haut, ce nouveau cycle de la lutte des classes a formalisé une limite bien particulière : l’appartenance de classe comme limite même de la lutte des classes, la prolétariat n’est rien sans le Capital.

Avec la précarité comme définition du rapport salarial, l’instabilité structurelle du prolétariat ne permet plus aux prolétaires en lutte de revendiquer, à partir de leur situation sociale, la légitimité de leur existence. C’est la non-confirmation du prolétariat qui structure actuellement la lutte des classes. Le prolétariat est désormais posé comme nécessaire mais toujours de trop. Revendiquer de meilleurs conditions de vie, dans la configuration actuelle de la concurrence mondiale, s’apparente à un coup d’épée dans l’eau. Et face à cette limite, de nombreuses fractions de prolétaires en lutte ont produit une déduction pratique : l’appartenance de classe comme contrainte extérieure donc sa remise en question. Et c’est sous cette forme que s’amorce le contenu et la probabilité révolutionnaire de l’époque : l’abolition du Capital dans son intégralité, dans la lutte des prolétaires qui ne veulent simplement plus l’être.

L’essentiel de ces moments de lutte a révélé que la contradiction qui opposait le prolétariat au Capital se nouait au niveau de leur reproduction respective (bien que l’un n’aille pas sans l’autre). Que ce soit la révolte des banlieues en 2005, les diverses luttes suicidaires (ne réclamant que des indemnités) autour des sites de production destinés à être démantelés durant tout la décennie, les émeutes en Grèce, à Londres, ou encore les conflits en Guadeloupe ou à Mayotte, ces luttes ont produit l’appartenance de classe comme contrainte extériorisée dans l’objectivité du Capital. On ne peut rien faire en tant que prolétaire mais tout part de là. Il est impossible de faire un détail exhaustif des diverses productions d’écarts (la remise en cause de l’appartenance de classe) dans les luttes actuelles tellement ces phénomènes sont présents de manière constante à l’intérieur de celles-ci.

Et les temps ne vont pas en s’arrangeant. Avec la crise, nos conditions de vie vont nécessairement en s’aggravant, par le biais de l’accroissement de la dévalorisation de la force de travail et de la surnumérisation de fractions du prolétariat. Pour beaucoup d’entre nous déjà, la reproduction du rapport salarial capitaliste est vue comme simple coercition et par-delà rend caduc parce qu’hostile. Cette citation donne le ton de l’antagonisme social actuel : « Partout la disciplinarisation de la force de travail face à un prolétaire redevenu, en tant que prolétaire, un pauvre, est le contenu de l’ordre du jour capitaliste » (Le moment actuel, SIC, n°1, 2011). Cette disciplinarisation, c’est la police, la justice et la prison.

Les formes idéologiques qu’adopte le Capital pour réprimander les mauvais joueurs (toujours perdants dans le jeu de l’exploitation) dépendent des conditions économiques de la reproduction du capital. Elles ne sont pas là par hasard ou fantaisie. Leur rigueur est rigueur économique et la police est la matérialisation la plus concrète de l’austérité.

Dans la situation présente, la violence sociale est amenée à se renforcer, les émeutes à se multiplier, les résistances face à la dégradation des conditions de vie à se généraliser mais la seule question qui reste en suspens est bien celle de la naissance ou non, d’un mouvement révolutionnaire portant en lui, de par les conditions de son apparition, l’abolition du mode de production capitaliste. Pour la suite, il n’y a qu’expectative…

C’est une probalité d’époque, nécessaire face aux limites actuelles de la lutte des classes. La guerre sociale s’intensifiant, les temps s’annoncent sportifs. Et ça, les capitalistes et leurs  défenseurs le savent bien. Il n’y a pas d’alternative, pas de programme commun, uniquement un simple « réflexe ».

Prolétaires de tous pays, Niquez tout !

Solidarité avec les engêolés de la guerre sociale. Bises aux camarades.

20 janvier 2012.

[Orléans] Procès en appel des 4 de Tours

PROCES EN APPEL DES 4 DE TOURS 30 JANVIER A 14 H AU TRIBUNAL D’ORLEANS

PROCES EN APPEL DES 4 DE TOURS 30 JANVIER A 14 H AU TRIBUNAL D’ORLEANS

Le 30 janvier 2012 aura lieu au Tribunal d’Orléans le procès en appel des 4 de Tours. Le ministre de l’intérieur a porté plainte contre deux militants de SOIF D’UTOPIES et deux de RESF 37. Ils sont accusés de « diffamation publique contre une administration publique ». Ces deux structures ont publié en février 2010 un communiqué de presse intitulé « les baleiniers ». Ce texte faisait part de soupçons quant à l’utilisation de fichiers de l’Education nationale (en l’occurrence Base-élèves) à des fins policières afin d’organiser la chasse aux familles sans papiers. Il comparait ces pratiques à certaines employées par la police sous le régime de Vichy. Comme lors de l’audience du 5 avril 2011 devant le tribunal correctionnel de Tours, nous poserons quatre questions à la Cour d’Appel. * Est-ce que des individus, des structures ont le droit de faire part publiquement de leurs soupçons sur d’éventuelles exactions, dérives de la part de l’administration, de la police ou de la gendarmerie ? * Peut-on faire des comparaisons historiques afin d’analyser les évolutions actuelles au regard de l’expérience, notamment, du régime de Pétain ? Précisons qu’une comparaison n’est pas un amalgame. Il est hors de question de dire que Sarkozy c’est Pétain, etc. Comparer c’est prendre en compte l’expérience historique que nous apporte, en l’occurrence la période de Vichy, afin d’interroger notre passé pour agir sur le présent et tenter d’envisager différents avenirs. Faire des comparaisons et alerter est plus que nécessaire. Que le ministre ne soit pas d’accord avec ce type de comparaisons, c’est son opinion. Mais peut-il tenter d’en censurer d’autres, différentes de la sienne ? * Est-ce que la justice va entériner le traitement inégalitaire de l’Etat suivant qu’on soit notable ou manant ? Dans un deuxième temps, nous essayerons de montrer qu’il est normal, souhaitable de s’insurger contre la politique raciste et xénophobe de l’Etat. Par exemple, comment qualifier la décision du ministère de l’intérieur ordonnant, à travers la circulaire du 5 août 2010, la chasse aux Roms ? Comment se fait-il qu’aucun fonctionnaire (de l’administration, de la police et de la gendarmerie) n’ait refusé d’exécuter cet ordre illégal ? Nous avons fait citer comme témoin par huissier, entre autres, le préfet d’Indre-et-Loire et son directeur de cabinet. En effet, la préfecture, en réponse au communiqué « Les baleiniers », en avait publié un. Elle « … s’insurge contre les propos inexacts et mensongers… Les pratiques de ’’chasse à l’homme’’… sont totalement fausses ! La préfecture n’a jamais interrogé les directeurs d’établissements scolaires pour connaître la situation de leurs parents ressortissants étrangers. Cette consultation serait en tout état de cause inutile puisque le fichier national des étrangers AGDREF (Application de Gestion de Dossiers des Ressortissants Etrangers en France) auquel la préfecture a accès fournit tous les renseignements utiles à la connaissance du dossier de l’étranger. » Ainsi, la préfecture affirme qu’elle connait tous les ’’clandestins’’ vivant dans le département et donc leur nombre. C’est un fait unique en France ! Même le ministère ne peut donner de chiffre exact. Il publie seulement des estimations (environ entre 200 000 et 400 000 ’’clandestins’’ survivraient actuellement en France). Il est manifeste que le préfet est très embarrassé par cette affaire et qu’il fait dire à ses services des absurdités. En tout cas, comme tous les témoins cités par huissier, le représentant de l’Etat en Indre-et-Loire et son subordonné sont obligés d’être présents à l’audience. « …La non-comparution est punie par la loi », comme le précise la citation que les témoins ont reçus. On pourra leur demander quelques explications et savoir qui tient des propos mensongers ! Le 26 mai 2011 le Tribunal correctionnel de Tours donnait son jugement. Une des prévenues, militante de RESF 37, a été relaxée. Par contre, les trois autres sont condamnés à 500 € d’amende avec sursis, 300 € de dommages et intérêts et 3000 € solidairement pour les frais de justice. La lecture du délibéré laisse pantois. Rappelons que l’audience du 5 avril a commencé vers 9 h pour finir vers 19 h. Les 4 prévenus s’y sont exprimés, ainsi que 11 témoins de la défense, leurs 2 avocates, celui de la partie civile et le procureur. Dans ce compte rendu de jugement, il n’est fait aucune mention des témoignages, des plaidoiries des avocates de la défense, ainsi que des interrogatoires et interventions des prévenus. Que s’est-il passé, que s’est-il dit pendant toutes ces heures ? On appellera cela le mystère de la transparence ! La cerise sur le gâteau est la motivation des 3000 € pour les frais de justice (en fait le payement de l’avocat de l’Etat). « Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la victime, les sommes exposées par elle et non comprises dans les frais et dépens ; à ce titre, il lui sera alloué 3000 €, au regard de la longueur des débats consécutives aux exceptions soulevées et aux témoins cités. » (souligné par nous)

Ce procès est politique, tant mieux ! La relaxe des quatre prévenus de Tours permettra à ce que des personnes ou des structures puissent dénoncer publiquement les exactions de l’administration, de la police et de la gendarmerie ; que des comparaisons historiquement, même dérangeantes pour les tenants du pouvoir, puissent être faites ; qu’il est inacceptable que l’Etat nous traite différemment selon qu’on soit notable ou manant. A travers la relaxe, c’est aussi affirmer qu’ « on a raison de se révolter » ! Qu’on ne peut accepter que l’Etat enferme, expulse, détruise sous prétexte qu’on ne soit pas né au bon endroit, qu’on se mobilise pour exiger un partage égalitaire des richesses, qu’on soit libre de vivre avec qui l’on veut et comme on veut, qu’on puisse habiter où l’on veut dans les formes qu’on veut. La répression ne nous empêchera jamais de réfléchir à d’autres choix de société et de commencer à les vivre dès maintenant ! Nous n’accepterons aucune condamnation. Si la Cour d’Appel nous condamne à son tour, nous irons devant la Cour de Cassation et si besoin devant la Cour Européenne Des droits de l’Homme pour faire condamner l’Etat. Notre objectif est de contribuer à constituer une jurisprudence en la matière. Fondamentalement, si l’on ne veut plus que ce genre de procès ait lieu, si l’on ne veut plus voir des militants, des personnes trainés devant des tribunaux parce qu’ils dénoncent des exactions de la police, de la gendarmerie ou de l’administration (qui ne sont pas des bavures, mais sont inhérentes à la xénophobie d’Etat, voire au racisme de celui-ci), cela passe avant tout par la régularisation de tous les sans papiers, l’ouverture des frontières, la liberté de circulation et d’installation, la fermeture et la disparition des camps de rétention. Sinon, l’Etat continuera d’organiser la chasse aux sans papiers, générant les drames humains que nous connaissons tous les jours, les dérives policières et administratives. Le régime de Vichy est de ce point de vue riche d’enseignements. Aussi, il y aura toujours des militants, des personnes pour dénoncer les actions de l’Etat dans le cadre de cette politique.

RELAXE DES QUATRE PREVENUS DE TOURS LIBERTE D’EXPRESSION NON A LA CENSURE D’ETAT DES PAPIERS POUR TOUS Tours, le 22/01/2012 Jean Christophe Berrier, Muriel El Kolli deux des quatre prévenus de Tours membre de SOIF D’UTOPIES

soifdutopies@yahoo.fr

Vu sur Indymedia Paris-IDF, 22 janvier 2012

[Poitiers] Le spectacle de l’insécurité

Pour de nombreuses personnes (étrangers, jeunes, militants, personnes faisant de la récup, ou tout simplement se retrouvant ensemble, etc…), un véritable sentiment d’insécurité « se ressent » avec les patrouilles de flics : contrôles d’identité se multipliant (y compris sur des personnes déjà connues), chasse aux étranger-e-s sans-papiers, pressions grandissantes sur le militantisme…

On pourrait naïvement attendre du soutien de la part de journalistes pour la libre expression, alors même que la diffusion d’un journal militant (L’Epine noire) a été réprimée il y a peu par des flics venus avec six bagnoles (garde à vue, exemplaires confisqués), que celle du Monde Libertaire a été contrôlée par des flics arrivés dans une fourgonnette, que les tractages des libertaires ou d’antirep 86 sont eux aussi quasi-systématiquement surveillés, filmés voire contrôlés par la police, que le campement pacifique des indignés a été évacué à plusieurs reprises avec confiscation de nourriture, de tentes… Il y aurait bien des occasions pour la presse de relater des atteintes graves à la liberté d’expression.

Mais c’est compter sans cette presse aux ordres d’une « république nouvelle », soutenant systématiquement cette ambiance répressive qui s’est installée à Poitiers et ailleurs, n’hésitant pas à relayer carrément des mensonges (comme affirmer à deux reprises qu’un militant « anarchiste » a été condamné à « un mois avec sursis », alors qu’il ne s’agissait que du réquisitoire du procureur et que le militant a été relaxé pour ces faits). Voire à soutenir activement la préfecture (par exemple sur le fichage biométrique des étrangers, traduit en « meilleur accueil« ).

Aujourd’hui encore, on appréciera à juste mesure le « ressenti » de ce gratte-papier, tout empreint d’impartialité journalistique face à tous ces faits préoccupants pour les libertés publiques : 

La délinquance ne fait plus de chiffres

[…]

L’expérience des patrouilleurs de la police nationale a été concluante à Poitiers. Le dispositif a d’ailleurs été étendu à l’ensemble du territoire national. « L’idée est d’augmenter la visibilité des policiers dans la rue, à pied ou à VTT, et dans les bus », explique le commissaire divisionnaire Jean-François Papineau. « Là où la population a besoin de les voir. » L’insécurité ne se mesure pas qu’en chiffres. Elle se ressent aussi.

Leur presse, Nouvelle République, Baptiste Bize, 21 janvier 2012