Archives de catégorie : Construction du désert

TER Poitiers – Limoges : création d’un collectif d’usagers

NdPN : nous l’avons déjà dit plusieurs fois sur ce blog, la baisse de service sur le TER Poitiers-Limoges suscite la grogne des riverains. On voudrait casser la ligne TER pour favoriser le projet de LGV Poitiers-Limoges qu’on ne s’y prendrait pas autrement… Un collectif d’usagers s’est donc créé pour maintenir le TER et améliorer le service. Pour rappel, bientôt une manif à Limoges contre le projet de LGV !

TER Poitiers – Limoges : création d’un collectif d’usagers

Un groupe d’usagers de la ligne ferroviaire Poitiers – Limoges se constitue en collectif. Ils protestent depuis décembre et estiment ne pas être suffisamment entendus.

Depuis décembre, nous n’avons toujours pas de réponses à nos questions, s’indigne Romain Papuchon, usagers de la ligne ferroviaire Poitiers-Limoges. « Les courriers envoyés à la SNCF et au conseil régional Poitou-Charentes sont restés sans réponse. La région Limousin nous a bien répondu, mais elle est totalement incohérente. »

La grogne depuis l’automne

A l’automne dernier la SNCF a modifié ses horaires sur la ligne Poitiers-Limoges. Plusieurs usagers sont montés au créneau pour s’indigner de la suppression de plusieurs trains en début ou en fin de journée. Depuis, ils protestent. Un collectif d’usagers est même en cours de constitution (*). Il vient de rédiger un « livre blanc » de ses revendications. « Nous empruntons (ou empruntions) quotidiennement cette ligne de train pour nous rendre sur nos lieux de travail, majoritairement dans le centre-ville de Poitiers. A l’heure où les mots écologie et écomobilité sont dans toutes les bouches, nous recherchons une alternative à la voiture personnelle. » Les usagers du train soulignent que « le soir comme le matin, les entrées et sorties sur Poitiers sont engorgées. Particulièrement l’entrée sud-est, concernée par les embauches du secteur hôpital – université. Il est difficile voire impossible de se garer à Poitiers. Plus d’un an d’attente pour un abonnement mensuel dans les parkings souterrains. » Les bus Vitalis ? « Ils s’arrêtent aux limites de Grand Poitiers ». Les bus du conseil général qui desservent Lathus, Montmorillon et Lussac-les-Châteaux ? « Ils ne disposent pas d’un niveau de service suffisant et attractif pour les déplacements quotidiens domicile – travail ». Le TER, en revanche… « En dix minutes vous allez de la gare de Mignaloux au centre-ville de Poitiers. Le bilan carbone du TER est de 43 grammes de gaz carbonique par kilomètre-voyageur ». Et le train est « économique » : un abonnement mensuel Mignaloux-Nouaillé/gare de Poitiers coûte 32€, généralement remboursé à 50 % par l’employeur. De même pour un abonnement Montmorillon/gare de Poitiers : 80 € pris en charge à 50 % « soit même pas le prix d’un plein de carburant ! » Les usagers mécontents listent plusieurs priorités : horaires de train plus adaptés, réhabilitation des gares de Mignaloux et Lathus, amélioration des correspondances entre bus et trains… Dans l’espoir que la constitution de leur collectif fera bouger les élus et la SNCF.

«  TER d’Avenir » : rendez-vous mardi

Selon l’association « TER d’Avenir » les nouveaux horaires du TER Poitiers-Limoges ne sont pas de nature à inciter la population à délaisser la route pour le rail : horaires inadaptés, dessertes trop rares, arrêts à Mignaloux abandonnés alors que cette gare peut desservir le Campus universitaire et le CHU. […] Pour protester contre cet état de fait « TER d’Avenir » prendra symboliquement le TER à Mignaloux mardi 5 février à 15 h 09 pour descendre en gare de Poitiers à 15 h 20 afin de rencontrer usagers et élus.

Jean-Jacques Boissonneau, Nouvelle République, 1er février 2013

[Poitou-Charentes] Une nouvelle préfète, à point nommé[e] pour Vinci

Nous rappelions hier l’une des priorités du préfet précédent, Yves Dassonville : le pilotage du chantier pharaonique de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux, confiée à l’inénarrable multinationale Vinci. L’une de ses dernières décisions fut d’ailleurs de trancher en faveur de Vinci, pour l’exploitation d’une carrière de granulats destinés à l’édification de remblais pour la LGV… Ce préfet a montré combien l’enjeu de métropolisation est crucial pour l’Etat et le Capital.

Les grands chantiers sont aussi destructeurs socialement et écologiquement que ruineux. Mais ils permettent de soutenir la Kroissance, à coups de subventions massives et de partenariats (dette) publique – (profit) privé. Il ne s’agit ni plus ni moins que d’un soutien pur et dur au capitalisme, certes très financiarisé mais dont l’aspect spéculatif nécessite, pour maintenir la valeur de la valeur, le maintien d’activités productives, fussent-elles manifestement inutiles.

Ces chantiers, comme celui d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes, de lignes THT en Cotentin-Maine, d’un EPR à Flamanville, d’un stade géant à Lyon ou d’une LGV de Lyon à Turin, sont imposés aux forceps par l’institution étatique aux populations, de l’échelle locale (comme Coeur d’Agglo à Poitiers, là aussi une collaboration entre le PS et Vinci) à l’échelle internationale.

Après le départ de Dassonville, l’Etat nomme donc une personnalité dont la formation et l’expérience technocratiques, en matière d’urbanisme (à Paris), de grands travaux (pour Eiffage) et de stratégie de développement pour la SNCF, cadrent parfaitement avec ces nouvelles exigences de l’Etat et du Capital, et sont symptomatiques d’une collaboration étroite entre Etat et multinationales privées. Le fait que la préfète soit aussi responsable des forces de police cadre tout aussi bien avec le fait que ces chantiers suscitent, comme on l’a dit, des contestations sociales.

Jugez-en vous-mêmes avec cet article de la Nouvelle République, nous présentant le CV de la nouvelle préfète de Vienne et de Poitou-Charentes, Elisabeth Borne.

Ils s’organisent, organisons-nous.

Pavillon Noir, 31 janvier 2013

 

Une nouvelle préfète nommée à Poitiers

 

Le nouveau préfet de la Vienne et de la région Poitou-Charentes est une préfète. Elisabeth Borne, 52 ans, a été nommée en conseil des ministres, hier matin, sur proposition de Manuel Valls, ministre de l’Intérieur.

Ingénieure générale des ponts, des eaux et des forêts, cette spécialiste des questions de transports était directrice de l’urbanisme de la Ville de Paris depuis près de cinq ans après avoir été quelques mois directrice des concessions chez Eiffage et directrice de la stratégie à la SNCF pendant cinq ans. De manière plus politique, Elisabeth Borne a surtout été conseillère chargée de l’urbanisme, de l’équipement, du logement, des transports et de la ville, à Matignon, entre 1997 et 2002, au sein du cabinet du Premier ministre Lionel Jospin qu’elle avait déjà conseillé au ministère de l’Education nationale en 1991 avant de poursuivre avec Jack Lang jusqu’en 1993.

Une polytechnicienne

La nouvelle représentante de l’Etat dans la région n’est par ailleurs pas une énarque mais une polytechnicienne diplômée de l’Ecole nationale des ponts et chaussées. « Une femme à la tête de l’Etat en Poitou-Charentes ! », s’est réjouie Catherine Coutelle, la députée PS de la Vienne et présidente de la délégation aux Droits des femmes à l’Assemblée nationale, dès hier, en souhaitant la bienvenue à la préfète. Une femme de plus dans le département puisque Véronique Schaaf-Lenoir est aussi sous-préfète de Châtellerault. A Poitiers, Elisabeth Borne succède à Yves Dassonville qui a fait valoir ses droits à la retraite.

B. B., Nouvelle République, 31 janvier 2013

Mittal : licenciements, « écologie » et profit

Scandale : ArcelorMittal engrange des millions d’euros de profits grâce à la fermeture de Florange

 

Pendant que les métallos de Florange se démènent pour sauver leur emploi et que l’Etat indemnise leurs périodes de chômage partiel, ArcelorMittal engrange des profits grâce à l’arrêt de ses hauts-fourneaux lorrains. Leur fermeture définitive pourrait rapporter 19 millions d’euros en 2013. Tel est le miracle permis par le « capitalisme vert » et la vente de droits à polluer sur les marchés carbone. Explications.

Ils se sont enchaînés aux grilles d’une fenêtre de Matignon le 24 janvier aux aurores. Avant d’être délogés manu militari. Les salariés d’Arcelor Mittal du site de Florange en Lorraine refusent de tirer leur révérence. Ils ont remis aux conseillers de François Hollande une pétition de 31 000 signatures pour la nationalisation du site industriel mosellan. Ils ne croient pas au projet d’accord [1] signé le 30 novembre entre l’État français et ArcelorMittal, dans lequel le géant mondial de l’acier s’engage à réaliser un montant minimum d’investissements de 180 millions d’euros d’ici fin 2017. L’arrêt définitif des hauts-fourneaux est toujours prévu en mars 2013. Il entraînera la suppression de 1 500 emplois, sous-traitants compris. Mais rapportera des millions d’euros à ArcelorMittal grâce aux miracles du « capitalisme vert ».

Des droits à polluer très rentables pour ArcelorMittal

Car Florange fait partie des quelques 10 000 sites industriels européens qui ont été intégrés au système d’échange de quotas d’émissions de CO2 mis en place en 2005. Comment cela fonctionne-t-il ? Les gouvernements allouent à chacun de ces sites un quota d’émissions de CO2. Pour le site de Florange, il est de 4 millions de tonnes de CO2 par an. En fin d’année, si le site industriel le dépasse, il doit acheter des « droits à polluer » sur le marché carbone pour compenser ses émissions. S’il n’utilise pas tout son quota, il peut engranger et accumuler ses permis d’émissions pour ensuite les revendre à des entreprises qui ont dépassé leurs propres quotas (lire également : les marchés carbone, ou comment gagner des millions grâce à la pollution).

doc basta

D’après un document que s’est procuré le magazine Terra Eco auprès du cabinet londonien Carbon Market Data, ArcelorMittal n’a pas dépassé son quota annuel en 2009, 2010 et 2011, économisant environ 4,7 millions de tonnes de CO2 [2]. Et ce, en partie grâce à la mise en sommeil de ses hauts-fourneaux de Florange. Même si le cours du CO2 s’est effondré sur les marchés, ce surplus de droits à polluer représente une belle aubaine. A environ 5 euros la tonne, ArcelorMittal pourrait empocher près de 24 millions d’euros s’il décidait de les vendre. Pendant ce temps, les salariés du site ont multiplié les périodes de chômage partiel, en partie indemnisées par l’État.

Au niveau mondial, ArcelorMittal est la compagnie qui a accumulé le plus grand excédent de quotas, selon l’ONG britannique Sandbag, avec près de 123,2 millions de tonnes. Alors que la multinationale de la sidérurgie est, par son activité, l’une des plus polluantes ! Chaque année, la multinationale valorise une part de ces surplus sur le marché du carbone et engrange des profits faciles : 140 millions en 2010 de dollars et 93 millions de dollars en 2011 [3].

Un cadeau de 19 millions d’euros en 2013

ArcelorMittal a prévu de fermer les hauts-fourneaux de Florange en mars 2013. Mais la multinationale devrait percevoir ses quotas comme si de rien n’était. « Lorsqu’une installation a cessé ses activités, l’État membre concerné ne lui délivre plus de quotas d’émission à compter de l’année suivant la cessation des activités », précise la réglementation européenne [4]  Le nouveau plan d’allocation français sur la période 2013-2020 prévoit bien un quota gratuit de 3,8 millions de tonnes de CO2 de permis à polluer pour le site de Florange. Un cadeau de 19 millions d’euros au cours du marché carbone actuel.

Dès avril 2012, la CFDT interpellait les pouvoirs publics « pour qu’ils mettent un terme au « pillage » orchestré par Mittal. L’État français ne peut plus accepter de payer avec l’argent public le chômage partiel, ne pas broncher sur les quotas de CO2 non utilisés et vendus en bourse sans oublier les multiples exonérations d’impôts accordées à Mittal ».

Sophie Chapelle

@Sophie_Chapelle sur twitter

Photo Florange : CC Benjamin Géminel

Notes

[1] Document à télécharger ici.

[2] Les données de 2012 ne sont pas encore connues.

[3Source pour 2010 et 2011.

[4Source.

Vu sur Bastamag, 28 janvier 2013

[Saint-Léger-de-Montbrillais – 86] Le préfet passe en force en faveur de Vinci

NdPN : c’est l’une des failles du capitalisme : entre grands chantiers inutiles, existe aussi la concurrence. Dans la bagarre opposant les élus locaux pour leur Center Parcs à bobos à proximité de Loudun, et Vinci pour l’exploitation d’une nouvelle carrière de granulats pour sa LGV, le préfet a tranché hier en faveur de Vinci, en passant en force contre les élus locaux. Encore une victoire arrachée par Vinci, avec la complicité de l’Etat PS et la bénédiction de la ministre de l’écologie Batho… Et un paysage ravagé. Le préfet a pris sa décision à la veille de son départ, de même que sur la question du syndicat unique de l’eau dans la Vienne. Une belle leçon de « démocratie », pour toutes celles et ceux qui croient encore en ce simulacre.

Contre l’avis des élus le préfet dit oui à la carrière

Les travaux d’extraction pourraient commencer dans les tout prochains jours.

Saint-Léger-de-Montbrillais.   Le préfet de Région a signé hier l’arrêté autorisant Vinci à exploiter une carrière de granulats très contestée.

Sans surprise, Yves Dassonville, le préfet de Région qui doit prendre sa retraite la semaine prochaine, a annoncé hier qu’il venait de signer un arrêté autorisant la société Vinci construction terrassement à exploiter au lieu-dit « Le Moulin-à-Vent » (commune de Saint-Léger-de-Montbrillais) une carrière de granulats. Ceux-ci seront destinés aux remblais de la future ligne ferroviaire à grande vitesse Sud Europe Atlantique.

Pour le préfet, il n’existe aucun motif de dire non

Le préfet, qui affirme que la ministre de l’Écologie Delphine Batho « ne s’est pas opposée à cette signature », n’a donc pas tenu compte des nombreuses interventions d’élus de tout bord (hormis la plupart des élus locaux) opposés à ce projet de carrière de 4 hectares, situé dans le prolongement d’une première carrière abandonnée le long de la route de Saumur. « On est dans un état de droit, martèle Yves Dassonville. Je vois mal comment je pourrais refuser l’autorisation à cette carrière. Le dossier a été examiné sous toutes les coutures. Supposons que je ne donne pas l’autorisation, immédiatement Vinci m’attaque et immédiatement Vinci gagne. » Le préfet fait valoir qu’il n’existe aucun motif administratif ou environnemental de s’opposer à ce projet, qui constitue « la moins pénalisante des solutions ». Ce projet a d’ailleurs obtenu l’avis favorable du commissaire enquêteur chargé de l’enquête d’utilité publique, puis de la Commission départementale de la nature. L’arrêté préfectoral stipule que Vinci est autorisé à exploiter la carrière et à concasser les granulats jusqu’au 31 décembre 2013, de façon à ne pas interférer avec le chantier du futur Center Parcs des Trois-Moutiers, situé à 5 km de là. Le site devra être réhabilité au plus tard le 31 mars suivant. Les travaux d’extraction pourraient commencer dans les tout prochains jours. Hier soir, Gérard Leclerc, porte-parole de l’Association de protection du patrimoine architectural et rural (Appar), principal opposant au projet, a indiqué qu’un recours administratif est à l’étude. Il a dénoncé « un coup de force sous la pression d’intérêts privés », précisant : « On se demande ce qui a bien pu se passer. Jusqu’à avant-hier, on nous disait que le préfet laisserait la décision à son successeur. »

Vincent Buche, Nouvelle République, 26 janvier 2013

Incompréhension et colère des élus

Ségolène Royal présidente de la Région

Je m’étonne que le préfet puisse prendre une décision aussi lourde de conséquences, à quelques jours de sa fin de fonction. Cet arrêté préfectoral intervient malgré l’avis négatif de tous les élus du territoire et alors que le ministère de l’Environnement avait pris soin de consulter tous les élus locaux qui sont contre cette ouverture. Cette décision va ralentir les travaux de Center Parcs et les activités nouvelles ainsi que les emplois qui doivent être créés.

Jean-Pierre Raffarin sénateur de la Vienne

Je suis surpris que Mme Batho (ministre de l’Écologie, proche de Ségolène Royal, NDLR) n’ait pas demandé au préfet de protéger l’environnement dans ce nord de la Vienne pour lequel nous avons choisi le développement durable. On a voulu inscrire Center parcs ans une stratégie de développement durable. Cette décision ne me paraît pas compatible avec ce choix. En général, c’est un ministre qui donne des ordres au préfet et non pas l’inverse. Quelle est l’autorité de Mme Batho ? Et quelle est l’influence de Mme Royal sur Mme Batho ?

Claude Bertaud président du Département

Je regrette la décision prise par la commission départementale de la nature, qui a donné un avis favorable. Je souhaite que la ministre Delphine Batho prenne une décision qui ne suive pas ce vote (1). Si l’exploitation de la carrière a finalement lieu, il faudra que nous soyons certain qu’elle s’arrête avant la fin 2013.

Véronique Massonneau députée

Je suis à la fois surprise et très déçue de cette décision, ayant clairement fait savoir depuis plusieurs mois mon opposition à ce projet, non seulement au préfet de région mais également à la ministre de l’Écologie, qui m’avait consultée. Je suis très inquiète des conséquences de cette décision, qui va entraîner un trafic intense de poids lourds dans le secteur du chantier de Center Parcs, avec des nuisances inévitables pour les riverains des communes avoisinantes. Alors que des solutions alternatives existent, il est regrettable de porter ainsi atteinte à l’exemplarité souhaitée pour les chantiers de la LGV et du Center Parcs, en terme de respect de l’environnement et de la population locale.

(1) En fait, la ministre n’a pas le pouvoir de revenir sur la décision du préfet. Seul le tribunal administratif peut désormais suspendre puis annuler l’arrêté contesté.

Nouvelle République, 26 janvier 2013