Archives de catégorie : Écrits

Livre blanc : le bras armé de l’Etat se porte toujours bien

« Un processus d’accompagnement politique est nécessaire pour établir, à défaut d’une pleine adhésion, une confiance minimale entre les différentes composantes d’un pays ainsi que vis-à-vis de l’autorité étatique. Sans cette confiance minimale, l’État rencontrera les plus grandes difficultés à établir un monopole sur l’usage de la force » – Livre Blanc Défense et Sécurité nationale 2013 (p. 80).

terminator

Le livre blanc est sorti : horreur ! l’Etat PS s’apprêterait donc à saborder l’armée française avec la suppression de 24.000 postes entre 2014 et 2019 ? La droite hurle au scandale ; oubliant que sous Sarkozy, la dernière loi de programmation militaire, courant de 2009 jusqu’en 2014, en avait supprimé 54.000. Quant à Mélenchon et à Le Pen, c’est à qui renchérira le plus sur la gloire de l’armée de la Patrie : le coprésident du Parti de gauche parle d’un « nouvel étiolement de la puissance militaire de la France », quant à la présidente du FN, elle préconise d’interdire que le budget de la Défense passe sous la barre des 2% du PIB (il est actuellement à 1,5%, ce qui est déjà bien assez monstrueux).

Que les fanatiques, de droite ou de gauche, de la Grande Muette et de l’Etat (qui ne sont qu’une seule et même chose) se rassurent tout de même. Sur les plus de 285.000 postes dépendant actuellement du Ministère de la Défense (dont plus de 218.000 militaires et près de 67.000 « civils »), il en restera tout de même environ 260.000 en 2019. Pour le menu détail des postes de chair à canon supprimés, il faudra attendre la nouvelle loi de programmation militaire, examinée en automne par le parlement.

Surtout, on oublie de dire que le budget du ministère de la Défense est… maintenu. Il continue de caracoler en tête des premiers postes de dépense avec l’Education Nationale (où, ce n’est pas un hasard, l’on apprend aussi à obéir). La machine de guerre (pardon, de maintien de la paix) de la Brave Patrie consume tout de même 11% du budget de l’Etat, ce qui est honorable. Pas moins de 179,2 milliards en euros constants devront être consacrés à l’institution bidassière, entre 2014 et 2019. Si l’on déduit cette coquette somme des 364 milliards d’euros prévus entre 2014 et 2025, il y aura même une augmentation entre 2020 et 2025, avec 184,8 milliards.

Saperlipopette, maiz’alors, pourquoi ces suppressions de postes et de casernes, si elles ne répondent pas au prétexte foireux de la « crise » et du manque de sous ? Pour rediriger l’argent public vers autre chose que de rémunérer des êtres humains, eussent-ils le crâne rasé et le cerveau dûment lavé pour tuer et être tués : les « crises », c’est bien connu, sont l’occasion de dégraisser le personnel pour augmenter les profits. En l’occurrence, s’il s’agit pour Hollande de « sanctuariser » le budget de l’armée, c’est pour préserver « l’impératif industriel », à l’échelle française comme à l’échelle européenne.

Jugeons-en : l’industrie militaire en France pèse actuellement plus de 4.000 entreprises, avec un chiffre d’affaires global de 15 milliards d’euros, exportant entre 25% et 40% de sa philanthropique production. Hormis l’entretien du parc nucléaire militaire océanique et aéroporté, faisant « l’excellence de notre industrie de défense », le livre blanc affiche le soutien de l’Etat aux vendeurs de canons pour la recherche technologique et le développement des matériels de guerre innovants. Tuer oui, mais avec inventivité !

Les industries de boucherie traditionnelle ne seront pas les seules favorisées par l’Etat ; au nom de la lutte contre le « terrorisme » et les risques « d’instabilité politique », aussi bien dans certaines régions du monde que sur le territoire national (sécurité intérieure et extérieure faisant « continuité »), le renseignement et la « cyberdéfense » sont appelés à se développer encore plus. Les technologies big-brotheriennes de flicage des moyens de communications, dont internet, sont une priorité (le LB appelle cela la « capacité informatique offensive »). Avec développement des satellites, des systèmes d’interception électromagnétique, et autres « charges utiles adaptées aux aéronefs » (sic). A l’intérieur, il faudra encore accroître vidéosurveillance, flicage des communications, biométrie et autres vigipirateries, pour renforcer notamment le « dispositif gouvernemental de lutte contre la radicalisation ». Le parc technologique gravitant autour du dispositif Frontex est aussi appelé à se développer, contre les hordes d’immigré-e-s menaçant notre beau pays (au nom de la lutte contre les « trafics d’êtres humains »). Dans la même obsession étatiste de la surveillance total, un accroissement substantiel de la flotte de drones est aussi annoncé, bien que la France compte déjà 30 engins tactiques et 12 de surveillance de théâtre. La machine remplaçant l’humain pour broyer les humains, c’est vieux comme la baisse tendancielle du taux de profit.

L’Etat-VRP devra comme de bien entendu persévérer encore dans son concours diplomatique pour augmenter les exportations d’armes estampillées Franchouillie. Et aider les industriels aux nécessaires « restructurations »… Bref, si on lit entre les lignes, ce livre blanc est tout bénef pour les capitalistes vendeurs d’armes ou de technologies de surveillance bien de chez nous, biberonnés depuis toujours par les mamelles de l’Etat, qui pourvoit généreusement à leur gloutonnerie en leur déversant le bon lait de l’argent public.

Les priorités stratégiques (renforcement du contrôle des territoires d’outre-mer, d’Afrique, du Proche-Orient et du Golfe arabo-persique) couvrent elles aussi les intérêts d’autres lobbys industriels bien connus, ceux ayant le monopole sur certains minerais (dont l’uranium), le pétrole ou le gaz, toutes choses indispensables à la sacro-sainte Croissance du Développement Durable du Profit. Quant aux belles promesses d’en finir avec la Françafrique, c’en est fini : l’occupation de nombreux pays d’Afrique par l’armée française n’est pas un instant remise en question.

Comment les révolutionnaires peuvent-ils-elles lutter face à l’ogre militariste, coeur même de l’Etat, lorsque celui-ci promet de seconder les forces de police et de gendarmerie en cas de « crise intérieure » ? Le dogme de la lutte armée généralisée n’a guère montré son efficacité face à la puissance de feu des Etats, ou alors au prix de nouveaux Etats plus sanglants encore à la clé. Mais s’il est facile, aux types mêmes de l’organisation autoritaire que sont l’Etat et le capitalisme, de surveiller et de réprimer des organisations aux décisions centralisées, il est beaucoup moins aisé de contrecarrer la puissance d’un mouvement social d’ampleur si elle est animée, de façon aussi décentralisée que solidaire, par une multiplicité d’initiatives autonomes de lutte et de vie, librement fédérées et résolues à se défendre contre la violence de toutes les formes de domination.

Juanito, Pavillon Noir, 29 avril 2013

Les impôts, c’est pour les pauvres

Dans la Nouvelle République de ce 20 avril 2013, un article croustillant annonce le bilan de la fraude fiscale en Poitou-Charentes : rien moins que 1,5 milliard, soit l’équivalent des budgets cumulés du Conseil régional et du conseil général de Charente-maritime. « Le chiffre donne le vertige », nous dit le journaliste : c’est plutôt lui qui donne l’impression de débarquer !

De leur origine historique, où l’exaction se pratiquait encore à la truelle avec son lot de massacres, de viols et d’esclavage, jusqu’à nos jours plus policés : les impôts d’Etat n’ont jamais eu pour autre but que de perpétuer l’exploitation des pauvres, chargés de financer leur propre mise au pas. La « fraude fiscale » n’est que la partie émergée de l’iceberg de l’ « optimisation fiscale », et toutes deux se sont toujours faites avec la bénédiction de l’Etat, qui n’est bon prince qu’avec ceux qui tiennent le manche. Le capitalisme et le salariat perpétuent le racket institutionnel des richesses produites par les dominé-e-s, sous le ripolinage de la démocratie.

De fait en France, les 10% les plus aisés détiennent 62 % du patrimoine total. Pire, les 1% les plus aisés en France détiennent à eux seuls un quart du patrimoine total, et 32,4% des revenus du patrimoine. Quant à la « progressivité de l’impôt » ? Encore une bonne farce des droits de l’homme riche. Si les taux d’imposition varient entre 41 % et moins de 48 % pour les 50% des Français-e-s les plus modestes, ils baissent pour les plus friqués, passant même sous la barre des 40 % pour les 1 % les plus richards. « La plupart des hauts revenus et des revenus du capital (intérêts, dividendes, plus-values, loyers) bénéficient d’exemptions et de règles dérogatoires leur permettant d’échapper au barème de l’impôt sur le revenu », selon les économistes Camille Landais, Thomas Piketty et Emmanuel Saez.

Là où nous devrions davantage nous étonner quant à nous, c’est de voir le syndicat Solidaires (s’affichant pourtant plus « radical » dans ses analyses et ses actions), réclamer un machin consternant en guise de solution. A savoir donner plus de moyens aux services des impôts de l’Etat… pour lutter contre ses propres fondements. Beau tableau du syndicalisme « révolutionnaire », dont le but originel était l’abolition du salariat et de l’Etat… il s’agit à présent de demander à l’Etat, principe même de la domination sociale et du racket institutionnel, d’aiguiser ses armes… dans l’espoir qu’il les retourne contre lui-même et ses petits copains. Autant conseiller au petit poucet de demander à l’ogre  de se bouffer une main ! Oh les copains, on aime bien croire aux histoires des endormeurs de tout poil, mais à la condition qu’elles aient au moins un minimum de réalisme.

Les pauvres payent et trinquent toujours plus au final que les riches qui les exploitent, ce n’est pas un scoop : ça durera tant qu’on n’aura pas aboli l’Etat, le salariat et ce qui va avec, à savoir l’argent lui-même. Rien à attendre des jérémiades hypocrites des étatistes de gauche ou de syndicalistes glorifiant l’impôt, ni même par des déclarations d’intention libertaires ; nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes, par la pratique ici et maintenant de la réappropriation, de l’autonomie et de l’entraide. Ca ne tombe pas du ciel : ça s’organise, sur tous les champs de la lutte sociale.

Juanito, Pavillon Noir, 20 avril 2013

1,5 milliard de fraude fiscale en Poitou-Charentes ?

Le syndicat Solidaires finances publiques pointe le poids de la fraude fiscale dans la région et déplore la baisse des effectifs censés lutter contre ce fléau.

L’affaire Jérôme Cahuzac pousse le personnel politique à lever plus haut le flambeau de la lutte contre la fraude fiscale. Mais quelle est la situation réelle du phénomène dans les régions et les départements ? Le syndicat Solidaires finances publiques a une idée de la question, et le fait savoir (*). « En Poitou-Charentes, le montant de la fraude fiscale peut-être estimé entre 1,33 et 1,78 milliard d’euros par an », assure Patrick Gonzalez, délégué syndical dans la Vienne.

«  L’impôt est un pilier de la démocratie  »

Le chiffre donne le vertige. Il représente l’addition des budgets annuels du conseil régional et de la Charente-Maritime. Comment en être sûr ? « Nous basons notre calcul sur deux estimations, explique le syndicaliste. D’abord celle de la commission d’enquête du Sénat (en 2012), qui estime la fraude en France entre 30 et 60 milliards et y ajoute les 90 milliards d’avoirs français détenus en Suisse. Ensuite, l’estimation de la Commission européenne (en 2006) qui avançait une fraude de 2 à 2,5 % du produit intérieur brut. » Face à de tels montants, on se dit qu’il y a là de quoi renflouer pas mal de déficits publics. A condition d’aller à la chasse aux fraudeurs. C’est ce que fait l’administration fiscale, mais avec quels moyens ? « Depuis 2002, notre administration subit des vagues importantes de suppressions d’emploi, 25.000 en moins en dix ans, déplore Patrick Gonzalez. Dans la Vienne, entre 2005 et 2012, on a compté 115 suppressions d’emploi, principalement des agents de catégorie C, soit 15 à 20 % des effectifs. » L’arrivée de la gauche au pouvoir ne semble pas vouloir changer la donne : « On prévoit 2.023 suppressions d’emploi au niveau national cette année et autant l’an prochain, le budget de la Direction générale des finances publiques est en baisse de 9 % en 2013. » Dans ce contexte, la promesse récente de François Hollande d’un recrutement de 50 agents supplémentaires, fait sourire le syndicaliste : « Ça fait un demi-poste par département. » Pour conforter la collecte de l’impôt, « pilier de la démocratie », le syndicat Solidaires finances publiques demande des moyens humains et matériels supplémentaires, mais aussi « une réforme de la fiscalité en France et en Europe et l’intensification de la coopération européenne et internationale ».

(*) Nous avons sollicité la Direction régionale des finances publiques pour qu’elle nous communique des informations sur la réalité de la lutte contre la fraude fiscale localement. Elle n’a pas souhaité s’exprimer, considérant que cela relève « des orientations nationales du gouvernement ».

repères

Le lexique de la fraude

La fraude fiscale : « C’est une infraction à la loi commise dans le but d’échapper à l’imposition ou bien d’en réduire le montant. » L’infraction suppose la réunion de trois éléments : légal (le non-respect du droit fiscal), matériel (l’impôt éludé), moral (l’intention de commettre l’infraction). > L’optimisation fiscale : Pratique utilisant les moyens légaux comme les régimes dérogatoires, les niches fiscales (crédit d’impôt, déduction, réduction, exonérations, etc.). > L’évasion fiscale : Souvent utilisée et confondue avec la fraude fiscale, elle n’a pourtant pas de définition juridique, mais elle est illégale, puisqu’elle permet d’échapper à l’impôt.

Philippe Bonnet, Nouvelle République, 20 avril 2013

Banalisation de l’homophobie et répression des antifascistes/antisexistes : NO PASARAN !

Le « débat » interminable et puant pour ou contre le mariage homo, s’étalant au Parlement et dans les médias, ne cesse de banaliser l’homophobie. Avec des conséquences parfois tragiques. Aucun débat n’est possible avec les fachos attaquant les libertés et l’égalité !

Les associations de soutien aux LGBT croulent sous les appels de jeunes en détresse, qui ont triplé en 2012 par rapport à 2011. Les agressions homophobes ont sensiblement augmenté depuis novembre 2012 (+30%), soit le début du « débat », et ont littéralement explosé depuis le début de l’année 2013. Les homophobes tentent de prendre la rue avec des manifs moisies à répétition, et radicalisent leurs actions. Les propos appelant à la haine se banalisent : « Hollande veut du sang, il en aura ! » (dixit Frigide Barjot). Des membres d’organisations fachos (comme le GUD) appellent ici et là à passer les homos à tabac. Le cas de Wilfried ayant publié sa photo sur facebook, après avoir été agressé à Paris par des fachos, lui et son copain à qui il tenait la main, n’est hélas pas un cas isolé.

Ainsi hier soir 17 avril à Lille, des fachos ont agressé des gens dans un bar homo. Il n’y a pas de hasard : hier ont aussi eu lieu, à nouveau, des manifs homophobes un peu partout en France. Y compris à Poitiers (voir ici l’article de la Nouvelle République).

A Paris, ces nuisibles ont manifesté devant l’Assemblée Nationale, avec des contingents de brutes fascistes. Des camarades antifascistes/antisexistes, dont des copains et copines de la Fédération Anarchiste, ont fait une petite action pour protester. Comme d’habitude, c’est sur nos camarades que la répression policière a frappé. Sur la quarantaine d’arrestations sur toute la manif, environ un tiers d’entre nos camarades, soit 24 personnes, se sont faites embarquer dans un bus où il faisait au moins 50°, et sont sorties au bout de deux heures de contrôle d’identité…

Si les fachos se sentent pousser des ailes, c’est bien avec la complicité active des forces de répression. L’Etat a beau jeu de faire des discours contre l’homophobie ! Non seulement les flics de l’Etat permettent aux fachos d’exprimer leur vomi haineux dans la rue, dans des rassemblement homophobes ou anti-avortement, mais ils répriment les antifascistes et antisexistes.

A Poitiers aussi, ce sont aussi les camarades qui tentent de s’opposer aux manifestations homophobes qui sont systématiquement filmé-e-s et intimidé-e-s par la police locale.

Tout cela, bien loin de nous décourager, ne fait que renforcer notre détermination à lutter contre l’homophobie et le fascisme, partout où ils attaquent. Continuons tou-te-s à nous défendre et à défendre la rue contre les manifestations homophobes et fascisantes !

A Poitiers comme ailleurs : No Pasaran

Pavillon Noir, 18 avril 2013

NdPN – Mise à jour : répression des antifascistes et antisexistes à Nantes aussi.

NDPN – Mise à jour : 3 dates prévues de rassemblement contre l’homophobie : le Groupe d’action unitaire de la Vienne contre l’extrême-droite appelle à un rassemblement dimanche 21 avril à 10 h 30 sur le parking d’Auchan Poitiers Sud (là où se sont donnés rdv les homophobes). Ainsi qu’à un rassemblement contre l’homophobie mercredi 24 avril à 18 h place d’armes (devant l’hôtel de ville). Le Collectif LGBTI (Lesbiennes Gays Bis Transgenres Intersexués) appelle aussi à un rassemblement mardi 23 avril à 18h30, place d’armes.

[Poitiers] Avec la FAE, à bas les pauvres et vive la marchandisation de l’espace urbain

NdPN : La Fédération des agents économiques, une association de boutiquiers du centre-ville de Poitiers, n’a cessé de tenir des propos insupportables à l’égard des « marginaux », qui ont déjà été relatés plusieurs fois sur ce blog (voir par exemple ici). Avec la FAE, c’est à bas les pauvres et vive la marchandisation de l’espace urbain. Après la présidence de Claude Lafond, celui qui se félicitait que la mairie PS l’ait écouté pour transformer le théâtre en commerces, la FAE passe la main à Philippe de Bony, « agent général de la Mutuelle de Poitiers ». Ce monsieur s’était lui aussi exprimé directement par voie de presse contre les « marginaux », qu’il considérait comme un « problème »… Les réunions répressives à l’encontre des pauvres à Poitiers, entre FAE, mairie et police, ont encore de beaux jours devant elles.

86 –  POITIERS Philippe de Bony succède à Claude Lafond à la tête des commerçants

Lors de son assemblée générale, la Fédération des agents économiques voyait son président Claude Lafond passer la main. Dans le même temps, la FAE devenait « Poitiers le Centre ». Ce soir le conseil d’administration de l’association des commerçants du centre-ville a élu son bureau et son nouveau président. Philippe de Bony prend les rênes de « Poitiers le Centre ». Le bureau est désormais ainsi constitué. Président Philippe de Bony (Mutuelle de Poitiers), vice-présidents Carine Naudin (Maison Boncenne), Suzanne Mathieux-Ségeron (Bien-être Ségeron), Éric Paquet (Paquet immobilier), Jérôme Lacroix (Table du Chai), Éric Soulard (Différence), Christophe Vergnaud (Côté Place), trésorier Benoît Delsuc (Excalibur).

Dépêche Nouvelle République, 17 avril 2014

Mise à jour 20 avril : présentation du parcours de Ph. De Bony ici.

Le désastre automobile

Malgré le licenciement sauvage de milliers d’ouvrier-e-s et d’employé-e-s du secteur automobile (et de ses boîtes sous-traitantes), traité-e-s comme des chiens par leurs patrons et par les vigiles en uniforme de l’Etat-laquais, ne nous y trompons pas. La gabegie de l’automobile de masse, avatar saisissant du saccage capitaliste et étatique depuis des décennies, se porte encore assez bien. En France, ces quatorze dernières années, l’utilisation de l’automobile a augmenté de 30%.

A quoi répond l’automobile ? En moyenne, 99% des déplacements automobiles sont locaux, c’est-à-dire qu’ils se font à moins de 80 kilomètres du domicile. Chaque habitant-e passe en moyenne une heure par jour enfermé-e dans son cercueil roulant, pour une moyenne de 25 kilomètres parcourus. 41% des déplacements sont pour motifs professionnels, et si l’on ajoute les déplacements sur un autre lieu, celui de la formation au monde du travail (ce que sont de fait l’école et l’université), on atteint une majorité des déplacements, consacrés à remplir le devoir quotidien de l’esclave moderne.

Si l’on y ajoute encore les déplacements pour se procurer de quoi survivre, en faisant les courses dans l’une de ces métastases du cancer capitaliste sur les échanges humains, que l’on appelle « centre commerciaux », on atteint une écrasante majorité des déplacements en bagnole. Rien d’étonnant ; la logique capitaliste concentre les lieux de production d’une part et de distribution d’autre part, mais la spéculation immobilière chasse toujours plus loin les prolétaires de ces mêmes lieux de l’économie où ils et elles produisent tout.

A bien y regarder, les autres déplacements dits de « loisirs » répondent eux aussi au système capitaliste : familles et amitiés dispersées aux quatre vents de l’oppression économiste ; parcs de loisirs et de paradis artificiels vendus aux prolétaires éreinté-e-s.

singer 2

L’industrie automobile n’est pas que la conséquence et le corollaire intimes du monde moderne de la production capitaliste. Née pour relancer le capitalisme en crise, elle constitue, avec l’armement ou l’industrie électronique et numérique d’aujourd’hui, la caricature d’un produit industriel imposé aux forceps. Avec son lot de publicités sexistes insupportables. Avec son lot d’axes routiers et autoroutiers, remplaçant des voies ferrées elles-mêmes précédemment imposées, axes de défrichement du rouleau compresseur d’une métropolisation socialement et écologiquement dévastatrice. Avec l’aide gracieuse des Etats racketeurs, pourvoyeurs des infrastructures et des subventions indispensables à son développement. Sans parler de l’exploitation corollaire forcenée des ressources pétrolières, qui animent depuis près d’un siècle les guerres les plus atroces à travers le monde entier. Les nouvelles bagnoles dites « écologiques » entérinent la perpétuation d’un monde invivable, qu’il s’agisse des agrocarburants vouant à la misère et à la mort des populations paysannes du monde entier, ou des voitures électriques prolongeant le cauchemar nucléariste.

Nous sommes racketé-e-s par le patron sur le lieu de travail, par le vol capitaliste de la plus-value ; sur le logement par la rente capitaliste immobilère ; sur la consommation par les marges de la grande distribution capitaliste ; nous sommes qui plus est contraint-e-s de verser des sommes colossales en achat, entretien et carburant de ces monstres automobiles que le mode de production capitaliste nous impose.

Quand ce ne sont pas nos propres vies, en nous mutilant et en nous tuant au volant. Bilan de ce progrès technologique : le long de la chaîne de production et de consommation de cet engin destructeur et de son carburant, ce sont des dizaines de millions de mutilé-e-s et de mort-e-s, et un saccage environnemental sans précédent.

Nous devons aussi payer les autoroutes. Deux fois : après les avoir financées par les taxes d’Etat, nous sommes racketé-e-s aux péages des firmes privées comme Vinci ayant récupéré ces autoroutes pour une bouchée de pain, avec le benedicite de l’Etat complice.

Et comme si cela ne suffisait pas, nous sommes racketé-e-s sur la route, par des radars automatiques ou mobiles qui se multiplient (1). Au nom de la « sécurité » ou de la « protection », on banalise le quadrillage de l’espace. Il s’agit d’expurger toute responsabilité, toute liberté, toute autonomie sociale de nos vies. Tout l’espace doit devenir « privé » ou « public ». Entre le domicile, l’école, le lieu de travail et le supermarché, entre la naissance et la mort : les sentiers bien tracés de la domination sont balisés par des dispositifs de flicage de plus en plus orwelliens, normalisant notre exploitation et notre aliénation.

the-last-child-to-sleep

Et si pour notre part nous n’avons pas de bagnole, à laquelle nous préférons les pieds ou le vélo, ni plus de taf salarié, auquel nous préférons une vie modeste mais plus libre, nous n’échappons pas plus aux caméras de vidéosurveillance.

Caméras brisées, radars saccagés… il n’est guère étonnant de voir parfois éborgnés, au coin d’une rue ou le long d’une route de campagne, quelques-uns de ces multiples avatars modernes de l’oeil du maître. Témoignages anonymes et diffus d’un sursaut de dignité retrouvée… en attendant d’en finir une bonne fois pour toutes avec le monstre automobile, et le monde qui l’engendre.

Pavillon Noir, 14 avril 2013

(1) : (voir articles de la NR ci-dessous)

***

Les radars fixes flashent de plus belle dans la Vienne

En 2012, les radars fixes ont flashé à 93.574 reprises soit 70 % de plus qu’en 2011. Un nouveau radar est prévu sur l’A 10 vers Naintré. Et cinq vont bouger.

Ils sont connus, repérés, et pourtant ils flashent toujours à tour de bras.

En 2012, les vingt-quatre radars fixes implantés dans la Vienne ont flashé à 93.574 reprises. Un chiffre qui explose par rapport à la précédente année où les statistiques du contrôle automatisé relevaient 54.869 infractions. La hausse est de plus de 70 % avec seulement trois nouveaux appareils implantés au cours de l’année 2012: un à Sillars et deux à Poitiers (voir notre infographie). Mais, à eux seuls, ils totalisent plus de 35.895 flashes !

Deux radars totalisent 33.169 flashes !

Les deux dispositifs discriminants, les totems gris flashant voitures et poids lourds sur la RN 147 à hauteur de la Folie y sont pour beaucoup avec 33.169 infractions ! Les dernières statistiques officielles exhaustives dont nous disposions dataient de 2009. Les dix-huit radars alors en service avaient flashé à 56.756 reprises. Le plus actif était alors celui qui était en service depuis le début 2008 sur la RN 10 à Vivonne. A lui seul, il avait réagi près de 19.000 fois. Les deux appareils implantés sur l’A 10 à Vouneuil-sous-Biard suivaient alors dans le palmarès en terme de performances. Curieusement les regards se tournent uniquement ou principalement vers les radars fixes alors que les unités mobiles sont aussi très actives, beaucoup plus que la plupart des équipements fixes. Et, surtout, elles sont de plus en plus discrètes. En 2012, elles ont relevé plus de 33.000 infractions (1). L’arsenal des forces de l’ordre se développe : davantage de radars mobiles à disposition, mise en service de véhicules à lecture automatisée des plaques d’immatriculation. Ces nouveaux véhicules, insérés dans le flux de la circulation, ne sont pas encore en service dans la Vienne, mais ils promettent de relever encore plus d’infractions que ne le font les appareils fixes qui focalisent tant l’attention sur eux. Au printemps 2011, le débat faisait rage à propos de leur signalisation. Le gouvernement annonçait la fin des panneaux avertisseurs, remplacés parfois par des radars pédagogiques au fonctionnement erratique. La pluie et le temps gris ont beaucoup nui à leur efficacité dans la Vienne. Depuis le 14 mars, c’est officiel, ces panneaux signalant un ou plusieurs dispositif automatique doivent faire leur réapparition. Quand ? « Cela se fera de manière progressive et prioritairement dès qu’une défaillance ou une dégradation d’un radar pédagogique aura été constaté », précise la préfecture de la Vienne. Le ministère de l’Intérieur évoque, lui, un délai de deux à trois ans.

(1) En revanche, les infractions relevées par les radars feux rouges sont passées de 10.894 en 2011 à 8.010 l’an passé.

Cinq radars doivent changer de place

Un radar efficace est un radar qui flashe peu, assurait récemment le ministre de l’Intérieur Manuel Valls dans une interview accordée au magazine Auto Plus. Autrement dit, c’est un radar qui joue son rôle de prévention et qui incite les automobilistes à ralentir dans les zones qualifiées d’accidentogènes. La France comptera 4.250 radars fixes à la fin de l’année. Et ce sera la fin du déploiement de nouveaux équipements. Désormais, les radars pourront être renouvelés par des équipements plus neufs, voire… être changés de place. Cinq appareils sont concernés dans la Vienne par cette mobilité. Le directeur de cabinet du préfet, en charge de la sécurité routière, l’a confié récemment lors d’une session de code de la route destinée aux seniors. Ces radars ne seraient plus considérés comme se trouvant dans des zones accidentogènes. Est-ce que ce sont des radars utiles car ils flashaient peu, selon la classification établie par Manuel Valls, ou des radars inutiles car flashant trop ? La préfecture dit que ces radars, sans les nommer, se trouvent « dans des zones où les aménagements réalisés depuis leur installation permettent d’assurer la sécurité des usages. » Le choix de ces appareils serait actuellement toujours à l’étude.

Emmanuel Coupaye, Nouvelle République, 14 avril 2013

Un nouveau dispositif discriminant va être installé sur l’A10

Le troisième dans le département

Les travaux ont commencé il y a quelques jours pour permettre son installation future. Sur le bas-côté de l’autoroute A 10, à hauteur de Naintré, un nouveau radar fixe, le vingt-cinquième, va être installé. Il flashera à la fois les voitures et les poids lourds en excès de vitesse qui circuleront dans le sens Poitiers Châtellerault. Ce radar sera le troisième de type discriminant. Ils ont la forme d’un totem, gris foncé, très discret. Les deux implantés sur le territoire de la commune de Poitiers, sur la RN147, font des ravages depuis qu’ils ont été mis en service début 2012. Le plus actif est situé juste derrière un pont. Il a flashé près de 21.000 fois les automobilistes venant de Migné-Auxances et roulant vers Limoges, peu après la sortie de Poitiers-Niort de l’A 10 pour rejoindre la capitale régionale.

Nouvelle République, 14 avril 2013